Argenteuil_2023_03_03

S P O R T S

FÉLIX LAFOND: DEUX PLANCHES ET UN BÂTON

logés dans le tendon. On lui prescrit des anti-inflammatoires et des antidouleurs, en vain. Le mal progresse au point que Félix peine à terminer ses parcours. Lors des Championnats canadiens de 2021, il doit renoncer à certaines compétitions pour ménager son bras. Au retour, il apprend que son cas est irréversible et qu’il doit choisir entre le sport et sa santé. Certes, une opération serait possible, mais comme ses chances de succès sont minces et que sa qualité de vie risque d’être affectée à tout jamais, on la lui déconseille. Voilà donc Félix confronté à la pire décision de sa vie: renoncer à sa passion. Une jeune femme rencontrée à Whistler, Nathalie Wilkie, une athlète paralympique qui a perdu quatre doigts dans un accident, lui suggère de réclamer le statut d’athlète paranordique (c’est ainsi qu’on nomme les athlètes de ski de fond et de biathlon qui présentent une déficience physique). Félix n’y croit pas tellement mais il accepte quand même de courir sa chance. À sa grande surprise, il est accepté dans la catégorie nationale, son handicap n’étant pas assez sévère pour l’inclure dans l’équipe internationale. C’est dire qu’il aura accès aux compétitions provinciales et nationales, mais pour le moment la Coupe du monde et les JO sont exclus. C’est toujours mieux que de devoir renon- cer aux courses. En réalité les conséquences d’un abandon seraient énormes. Depuis qu’il pratique la compétition, toute sa vie tourne autour de son sport. Tous ses amis sont des skieurs comme lui. Durant l’été qui a précédé son inclusion parmi les cou- reurs paranordiques, il a même continué de s’entraîner avec ses copains parce qu’il n’avait «jamais fait autre chose pendant l’été.» Désormais, il court avec un seul bâton. Cela semble de peu de conséquences, mais la réalité c’est qu’il lui a fallu réapprendre à skier; il continue de s’entraîner au rythme de six fois par semaine dans les mêmes circuits et avec les mêmes personnes (qu’on appelle «valides») qu’avant son changement de sta- tut, mais «c’est la technique qui change». La manière de compter les points aussi. «Si un skieur valide fait 30,05 minutes et un autre 30 minutes pile, ce dernier gagne. En paranordique celui qui fait 31 minutes peut battre celui qui en fait 30, tout dépend de la pondération.» Cela ressemble au principe du handicap au golf. Depuis son acceptation, il a participé à deux circuits de la Coupe Canada où il arrive premier et deuxième. Il a aussi participé à des compétitions régionales. Pour le plaisir. À l’heure où vous lisez ce texte, Félix est à l’Île-du-Prince-Édouard pour disputer les Jeux du Canada. Ensuite il s’envole vers Thunder Bay pour participer au Championnat canadien de ski nordique Canada. Avec un seul bâton.

Félix Lafond, de Brownsburg-Chatham, est actuellement à l’Île-du-Prince-Édouard livrer une performance en ski de fond aux Jeux du Canada. -photo François Daniel

FRANÇOIS DANIEL nouvelles@eap.on.ca

en substance, commence par le plaisir. Ce n’est que plus tard que l’on consent à investir ce qu’il faut pour bien profiter de cette activité. Or le ski de fond demande beaucoup d’énergie. «On peut avoir du fun en ski alpin sans grand effort. Il suffit de louer une paire de skis et voilà.» Tous les amateurs de ski de fond ne font pas de la compétition. Félix a connu l’ivresse de la course dès le primaire alors qu’un enseignant à l’école Bouchard l’a inscrit à une compétition. C’est là qu’il a attrapé la piqûre. Naturel- lement assez compétitif, son objectif n’est pas nécessairement d’arriver premier tout le temps. Il relativise: « Au départ (d’une course), on est une centaine, alors c’est certain que d’arriver premier c’est quelque chose, mais se classer dans les dix pre- miers, c’est aussi une sorte de victoire.» Jusqu’à présent, Félix Lafond s’est classé premier ou deuxième dans les courses provinciales auxquelles il a participé; au National, sa catégorie depuis trois ans, il domine ou finit dans les tops cinq.

Il y a quatre catégories dans le ski de fond de compétition: les plus jeunes (10-12 ans) courent au Régional, de 13 à 16 ans, on passe au Provincial, à partir de seize ans, on skie National. Puis, il y a les compétitions internationales (Coupe du monde, Jeux olym- piques) pour lesquelles il faut se qualifier lors de courses nationales. Félix a fait les qualifs, mais comme cette compétition ne faisait pas partie du circuit de la Coupe du monde, elle n’a pas été homologuée. Il a eu au moins la satisfaction de savoir qu’il possédait les qualités requises pour accéder aux podiums mondiaux. Mais voilà qu’en 2020, un événement imprévu vient modifier un parcours ascen- dant jusque-là sans fautes. Plus jeune, Félix s’était fracturé le coude. La fracture avait apparemment guéri, mais voilà que durant l’entrainement et les com- pétitions il ressent des douleurs de plus en plus vives dans son bras droit. Il voit un médecin qui diagnostique une épicondylite d’autant plus sévère que des éclats d’os, souvenirs de l’ancienne fracture, se sont

Il est jeune (18 ans), grand, beau bon- homme avec sa barbe de huit jours, calme comme le roc et sérieux comme un pape. Il lui arrive parfois de lâcher son fou, mais avec ses amis. Il est bon en classe (85% dans toutes les matières). Il joue de la trompette et du piano. Mais surtout, Félix Lafond est champion de ski de fond. Au point que la ville de Brownsburg-Cha- tham a décidé de lui octroyer en 2022 une assistance financière de même qu’à son jeune frère, Xavier, 15 ans, qui marche dans ses traces. Ce sont leurs parents qui ont initié les deux frères au ski de fond, ce dont Félix leur est reconnaissant. Il a reçu sa première paire de planches à deux ans et demi. Le ski de fond, c’est un sport de baby- boomer, non? Les choses changent dit Félix. «Il y a de plus en plus de jeunes qui en font». Toute passion sportive, poursuit-il

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