ECONOMIE
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FINANCES NEWS HEBDO LUNDI 30 SEPTEMBRE 2025
F. N. H. : Quels méca- nismes économiques permettraient de réduire efficacement les inéga- lités de niveau de vie et de garantir une réparti- tion équitable de la crois- sance ? Y. G. : La réduction des iné- galités ne peut s’opérer sans une répartition équitable des richesses. Depuis plusieurs décennies, nos investisse- ments, que ça soit en infras- tructures ou en industries, se sont concentrés sur l’axe atlan- tique Tanger-Casablanca- Settat, ce qui a négligé les autres régions telles que Fès- Meknès, Béni Mellal-Khénifra et l’Oriental. Cependant, il est temps de se tourner vers ces zones et d’orienter les futurs investissements dans ces régions. Lesdites régions ont besoin d’investissements pro- ductifs qui créent de l’emploi et stimule la croissance, parce que la majorité de leurs jeunes se dirige vers les régions de l’axe atlantique pour faire car- rière ou entreprendre, ce qui accentue le vide dans leurs régions d’origine. Sur le plan social, le facteur proximité est primordial. Les régions qui réalisent de faibles taux de PIB doivent se doter des mêmes services sociaux et avec la qualité nécessaire si l’on veut attirer plus d’inves- tisseurs nationaux ou étran- gers. L’amélioration du niveau de vie des populations qui résident dans les régions les plus reculées est un facteur déterminant pour la valorisa- tion du capital humain, en vue de leur permettre de s’intégrer dans le circuit économique. F. N. H. : Comment le Maroc peut-il concilier poursuite du développe- ment humain et réduction des inégalités ? Quelles réformes et innovations économiques sont néces- saires pour un dévelop- pement inclusif et soute- nable à long terme ? Y. G. : On ne peut pas par-
Entre 2019 et 2022, au niveau national, l’effectif total des personnes pauvres est passé de 623.000 à 1,42 million, dont 512.000 en milieu urbain.
ler de développement inclusif et soutenable sans préserva- tion des ressources naturelles. Actuellement, nos traversons une période difficile en matière de stress hydrique. L’eau a une dimension économique avérée sur les secteurs éco- nomiques, que ça soit l’agri- culture, l’industrie ou le tou- risme. Certes, les projets de dessalement de l’eau de mer ont permis de sauver momen- tanément la situation. Mais nous avons besoin de projets innovants permettant de ratio- naliser l’utilisation de nos res- sources hydriques, avec une dynamique d’inclusion écono- mique qui contribue à rehaus- ser le niveau de vie des gens tant en milieu urbain que rural. Sans oublier les énergies renouvelables (le solaire, l’éo- lien, l’hydrogène…), qui sont des gisements de producti- vité et de croissance. Nous avons besoin d’une nouvelle dynamique entrepreneuriale qui permet de créer des pro- jets autour de ces énergies, à travers une bonne politique d’inclusion économique faci- litant l’accès au financement et le soutien technique pour la réussite des projets. F. N. H. : La question du genre a également été évoquée dans ce rapport. Quels sont, selon vous,
les principaux freins éco- nomiques et sociaux à la participation des femmes au marché du travail, et quelles politiques proac- tives pourraient transfor- mer les acquis légaux en une réelle égalité écono- mique ? L’autonomisation économique des femmes s’est détériorée ces dernières années, plus particulièrement en milieu rural. L’amélioration des conditions de travail pour la catégorie femme est primor- diale. Il va falloir changer de modèle économique, et sortir du mode de travail domestique vers le mode de travail collec- tif où l’on créera des coopé- ratives ou de petites unités économiques structurées, qui organisent le travail et créent de la richesse durable. Il faut professionnaliser le travail féminin et le mettre en valeur afin de favoriser une meilleure approche genre en milieu rural. Un autre volet important, c’est la formation et la mise à niveau des femmes en milieu rural. La montée en compétences est exigée pour leur intégra- tion économique. La formation Y. G. :
continue et par alternance sont des solutions envisageables.
F. N. H. : Quelles straté- gies macroéconomiques devraient être mises en place pour stabiliser et accroître durablement le pouvoir d’achat, en particulier des classes moyennes fragiles, tout en protégeant les ménages des chocs exo- gènes (inflation, crises internationales, séche- resse) ? Y. G. : L’amélioration du niveau de vie des citoyennes et citoyens est synonyme de sau- vegarde du pouvoir d’achat. Et pour absorber les chocs intérieurs et extérieurs, des mesures doivent être mises en œuvre. Cependant, la pré- servation du pouvoir d’achat des classes moyennes et sous-moyennes doit s’opérer à travers des mesures gouver- nementales courageuses qui permettront de maîtriser les prix. Je cite, entres autres, le contrôle de la formation des prix à leurs sources (prix de vente depuis les sites de pro- duction jusqu’aux marchés de gros), la lutte contre les spécu- lations entre les fournisseurs de gros et de détail, et la maî- trise des flux logistiques des biens, et plus spécifiquement les coûts de transport. ◆
L’émergence d’une nouvelle génération d’entreprises qui créent de la richesse locale et génèrent de l’emploi améliorera significa- tivement le niveau de vie des ménages.
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