FNH N_ 1209

POLITIQUE

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FINANCES NEWS HEBDO LUNDI 30 SEPTEMBRE 2025

Reconnaissance de l’Etat de Palestine

La grande bascule diplomatique En annonçant la reconnaissance officielle de l’Etat de Palestine, Emmanuel Macron a fait basculer la France dans le camp des grandes puissances qui considèrent la solution à deux Etats comme la seule issue possible au conflit israélo-palestinien. Une décision saluée par une majorité de la communauté internationale, mais qui divise en Europe, irrite Israël et embarrasse Washington. Par D. William L

e moment était attendu et espé- ré par certains, mais redouté par d’autres. Le lundi 22 sep- tembre à New York, Emmanuel Macron a franchi le Rubicon diplomatique en prononçant ces mots simples : «La France reconnaît aujourd’hui l’Etat de Palestine» . Dans l’hémicycle, l’applaudimètre a confirmé que ce n’était pas juste une promesse, mais une réalité politique. Une grande puis- sance, membre permanent du Conseil de sécurité, bascule du côté des Etats qui jugent que la solution à deux Etats est la trajectoire à suivre pour une éventuelle paix durable au Moyen-Orient. Ce mouvement n’est pas isolé. Il arrive porté par une

vague qui a déferlé ces der- niers mois. Royaume-Uni, Canada, Australie, Portugal, Belgique, Luxembourg, Malte, Monaco et Andorre sont autant de pays qui ont rejoint le camp de ceux qui recon- naissent l’Etat de Palestine. Selon les décomptes relayés par l’AFP, «au moins 151» des 193 membres de l’ONU reconnaissent désormais la Palestine. Nous ne sommes plus dans la marginalité sym- bolique, mais dans une quasi- norme internationale. Mais que signifie, dans la pra- tique, cette reconnaissance ? Paris, co-organisateur avec Riyad d’une conférence sur la «solution à deux Etats», a choisi d’utiliser son poids pour

peser dans le conflit israé- lo-palestinien. «Nous sommes là, car le temps est venu. Le temps est venu de libérer les 48 otages détenus par le Hamas. Le temps est venu d’arrêter la guerre, les bombardements à Gaza, les massacres et les populations en fuite. Le temps est venu, car l’urgence est partout. Le temps de la paix est venu, car nous sommes à quelques instants de ne plus pouvoir la saisir» , a dit avec emphase le président français. On peut adhérer ou non à ses propos, mais le message est limpide : reconnaître la Palestine n’est pas « récom- penser» le Hamas comme le prétendent certains. C’est, au contraire, tenter d’isoler la logique de guerre en recrédi- bilisant une issue politique et en remettant en selle l’Autorité palestinienne.

Colère à Jérusalem, clivages en Europe

Côté israélien, la réaction a été immédiate et menaçante. Benjamin Netanyahou a mar- telé son «non» définitif à tout Etat palestinien et fustigé une «récompense au terrorisme». Il a même laissé planer l’idée d’une accélération de la colo- nisation en Cisjordanie, une ligne cohérente avec celle défendue par les ministres les plus durs de sa coalition. A Washington, le malaise est palpable. Les Etats-Unis esti- ment que cette reconnais- sance de la France risque de compliquer les négocia- tions sur les otages et d’offrir des dividendes politiques au Hamas. Pour Washington, le tempo n’est pas le bon et la reconnaissance doit être une «sortie de processus», pas une porte d’entrée.

Les puissances régionales en question

Le rôle des puissances régionales est déterminant dans l’évolution de la situation en Palestine. Le Maroc, poids diplomatique croissant en Afrique et dans le monde arabe, participe activement aux efforts multilatéraux autour de la solution à deux Etats. Sa diplomatie, qui met en avant le consensus et la médiation, peut contribuer à transformer l’onde de choc symbolique en acquis négociés. De son côté, l’Arabie Saoudite a coprésidé la conférence avec la France, en parfaite cohérence avec son agenda : normaliser un jour avec Israël, oui, mais à condition d’avoir un horizon politique crédible pour les Palestiniens. L’Egypte et la Jordanie, pour leur part, poussent pour une stabili- sation de la situation à Gaza.

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