Précis d’économie comportementale

Introduction

La vie quotidienne est ponctuée d’un nombre considérable de décisions, qui débutent dès l’heure du lever et concernent, par exemple, l’agencement de la journée, le choix des aliments qui seront consommés et leur mode de consommation, ou encore le choix du ou des trajets qui seront utilisés pour effectuer les diverses activités professionnelles, familiales ou de loisir prévues dans la journée. À ces décisions routinières s’ajoutent celles, moins nombreuses, dont les conséquences sont de plus grande importance : réaliser un examen médical ou une opération chirurgicale, accepter ou refuser une proposition d’embauche, contracter un prêt pour réaliser un achat, etc. Certaines de ces décisions sont fondamentalement de nature économique ou financière : en choisissant entre différentes offres de prêt, il s’agit d’arbitrer entre des durées de remboursement différentes, des taux d’intérêt différents, et des frais de dossier qui varient d’une proposition à l’autre ; tandis que d’autres décisions, comme la réalisation d’un examen médical gratuit, n’ont pas d’impact écono- mique flagrant. La plupart des décisions qui rythment nos vies quotidiennes se situent entre ces deux extrêmes et comprennent à la fois des aspects économiques et des aspects extra-économiques (sociologiques, culturels, etc.). Jusqu’au début des années 1970, cette myriade de décisions n’avait que peu d’importance pour la compréhension de l’économie qui nous était donnée par les travaux de recherche académique. L’approche privilégiée était alors celle de l’équilibre général, et le saint-graal qu’espéraient trouver les chercheurs en économie était d’aboutir à une modélisation complète de l’ensemble des secteurs de l’économie et des relations d’échanges qu’ils entretenaient afin de comprendre la formation des grands agrégats économiques – la consommation globale, l’épargne, l’investissement, le niveau d’emploi, l’inflation. Face à l’extraordinaire complexité de ces modélisations, qui limitaient l’ana- lyse de l’économie à une compréhension purement mathématique et théorique de son fonctionne- ment, de nombreux chercheurs ont décidé de se tourner vers une approche à la fois plus modeste et plus empirique de leur discipline : plutôt que d’essayer de se représenter le fonctionnement de l’économie dans son ensemble, et d’en réduire les acteurs à des agents représentatifs dont le rôle est secondaire, ce renouvellement de l’approche consiste à se concentrer sur des aspects beaucoup plus circonscrits des décisions individuelles et en prise directe avec des réalités économiques clairement identifiées. Cette révolution correspond à l’émergence de l’approche par l’équilibre partiel, qui a permis le développement de l’économie du travail, de l’économie industrielle, de l’économie de la santé, de l’assurance, ou encore de l’économie du développement (Fontaine & Leonard, 2005). C’est désormais grâce à l’éclairage conjoint de l’ensemble de ces champs de l’analyse économique que le fonctionnement global de l’économie est appréhendé. Ce changement radical d’approche s’est accompagné d’un changement tout aussi majeur des outils sur lesquels s’appuie l’analyse économique. Puisqu’il s’agit désormais de comprendre de manière précise le fonctionnement et les raisons d’être de chacun des aspects de la vie écono- mique (par exemple, l’offre de travail, la création d’emploi de la part des entreprises, l’effet de différentes règles de concurrence sur l’innovation, l’influence des règles de rémunération des médecins sur leurs comportements de pratique), la manière dont se prennent les décisions des

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