Précis d’économie comportementale

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PRÉCIS D’ÉCONOMIE COMPORTEMENTALE

« agents économiques » aux prises avec ces situations est devenue un élément central de l’analyse de l’économie.

Homo œconomicus : comprendre la multiplicité des décisions économiques dans un cadre simple et unifié Comme toute réalité sociale, le processus de décision est infiniment complexe. La réaction des économistes a été la même que celle d’un navigateur partant explorer les mers : aucune carte, aussi détaillée soit-elle, ne saurait faire justice à l’extraordinaire complexité du monde, mais elle consti- tue un outil indispensable pour quiconque cherche à tracer sa route. On peut, bien sûr, agrandir la dimension d’une carte, y ajouter des détails, en affiner les tracés jusqu’à aboutir à un reflet parfait du territoire qu’elle cherche à représenter ; mais un tel exercice conduirait à se priver de la sim- plification indispensable qui lui permet de jouer son rôle. De la même manière, l’analyse écono- mique s’est dotée d’un ensemble d’outils permettant d’appréhender les décisions qui influencent le fonctionnement de l’économie de manière suffisamment simple pour permettre une réflexion structurée et unifiée – sans aucunement prétendre à une représentation fidèle de la complexité et de la très grande diversité des modalités de prise de décision par différentes personnes et dans différents contextes. L’analyse économique se définit elle-même comme la science de l’allocation des ressources rares, car toute décision économique est coûteuse. Le premier de ces outils repose donc sur la notion d’arbitrage, qui implique que les décisions procèdent d’une comparaison entre les coûts et les avantages qui doivent en résulter. Cette idée d’arbitrage resterait au mieux triviale si elle n’était complétée par une réflexion sur la manière dont les coûts et les avantages de différentes natures peuvent être comparés entre eux. La décision de travailler un certain nombre d’heures dans la semaine, par exemple, a certes des implications financières (le revenu qui rémunère ce travail) mais implique aussi de devoir trouver des solutions de garde pour ses enfants, de passer du temps dans les transports et, bien sûr, de se consacrer à une activité souvent difficile, stressante et fatigante ; d’un autre côté, elle permet aussi de développer des relations sociales avec des collègues, de se consacrer à un projet collectif, etc. Le concept qui a été développé à partir du xviii e siècle afin de construire un système de mesure permettant de comparer les conséquences associées à une décision, qui peuvent être de différentes natures, est la notion d’utilité : les conséquences, monétaires comme non monétaires, sont toutes évaluées en fonction de ce qu’elles procurent et de ce dont elles privent, et la décision résulte d’un arbitrage entre les différentes fluctuations de ces éléments, résumées par un indice « d’utilité » pro- curée par la décision. Prendre une décision en fonction de l’utilité des différentes options implique de prendre en compte les coûts et les avantages de toutes les décisions possibles. Pour éclairer les modalités de la prise de décision, le concept d’utilité doit ainsi être couplé à la notion de « coût d’opportunité », qui correspond à l’ensemble des avantages auxquels on décide de renoncer en choisissant une décision plutôt qu’une autre. Pour prendre la meilleure décision possible, il ne suf- fit pas que ses bénéfices soient supérieurs au mécontentement qu’impliquent ses coûts ; il faut éga- lement que cette décision soit « optimale », au sens où aucune des décisions auxquelles on renonce n’aurait pu être meilleure. Ce cadre d’analyse correspond à ce que l’on appelle aujourd’hui la théo- rie de la décision qui, en se fondant sur les préférences individuelles, formalise grâce à la notion d’arbitrage les décisions prises de manière isolée en fonction des conséquences qui y sont associées. Dans de nombreuses situations qui affectent la vie économique, les conséquences d’une déci- sion ne peuvent pas être évaluées de manière isolée car elles dépendent de celles qui sont prises par les autres. Lorsqu’il s’agit de réaliser un travail en équipe, par exemple, la production dépend non

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