Précis d’économie comportementale

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Introduction

Si l’essor de cette discipline est dû en grande partie à l’émergence de l’approche expérimen- tale décrite dans la section précédente, ces notions ne se recouvrent que partiellement (et sont trop souvent confondues). L’économie expérimentale fait référence à une méthode d’investigation empirique permettant d’analyser les décisions économiques dans un environnement contrôlé. Cette méthode est certes l’un des outils privilégiés de l’économie comportementale, mais son champ d’application n’est pas restreint à cette dernière. Elle peut tout aussi bien être utilisée dans le cadre d’une approche classique de l’économie, pour tester la véracité des prédictions de la théorie économique traditionnelle ou pour aider à la prise de décision en matière de politique publique 3 . L’économie comportementale, quant à elle, fait référence à un ensemble de résultats certes majo- ritairement empiriques, mais également théoriques visant à décrire les comportements écono- miques sur la base d’une représentation qui enrichit le modèle de rationalité grâce aux résultats issus des sciences du comportement. Plan et structure de l'ouvrage Ce précis d’économie comportementale est construit de manière à proposer une lecture intégrée de l’économie comportementale et de l’analyse économique traditionnelle, dont les principaux éléments sont rappelés dans le Chapitre 9 (et dont la lecture préalable au corps de l’ouvrage est vivement recommandée aux lecteurs novices en économie). L’ouvrage est structuré de manière à étudier d’abord la décision individuelle, dans la Partie 1, puis à en tirer les conséquences pour la compréhension des interactions sociales dans la Partie 2. Afin de comprendre les décisions d’agents économiques supposés rationnels, la théorie de la décision s’est dotée d’une représentation (1) des préférences, (2) du processus de décision fondé sur ces préférences, et (3) de la manière dont les agents se forgent une vision du monde qui les entoure (qui correspond à ce que la théorie économique appelle les croyances). 4 Ces trois aspects de la décision individuelle ont fait l’objet de prolongements comportementaux, qui sont présentés dans les quatre chapitres de la Partie 1. Le Chapitre 1 est spécifiquement consacré aux composantes comportementales des préférences et le Chapitre 2 aux fondements comportementaux du proces- sus de décision. Les prolongements comportementaux du processus de formation des croyances sont présentés dans le cadre des problèmes de décision qui font intervenir de l’incertitude sur les conséquences de ces décisions dans le Chapitre 3. Le Chapitre 4, enfin, étudie un autre problème de décision individuelle très particulier, dans lequel les décisions ont des conséquences qui sont décalées dans le temps et nécessitent de faire appel à des outils spécifiques permettant d’intégrer cette notion. La Partie 2 applique ces résultats à la question des interactions sociales, dans lesquelles ces pro- longements comportementaux de la décision individuelle doivent intégrer l’interdépendance des décisions de plusieurs agents. Le Chapitre 5 présente la manière dont les outils d’analyse de l’in- teraction stratégique issus de la théorie des jeux peuvent être adaptés aux fondements comporte- mentaux du processus de prise de décision et de la formation des croyances. L’implication d’autres agents a également conduit à repenser la définition des préférences, que l’on considérait comme étant centrées uniquement sur l’intérêt matériel de l’agent qui décide. Cette nouvelle conception des préférences, tournées vers les autres plutôt qu’autocentrées, est présentée dans le Chapitre 6. Le Chapitre 7, enfin, élargit la perspective aux interactions sociales qui font intervenir un grand nombre d’agents en étudiant les ressorts comportementaux du fonctionnement des marchés et

3 Un exemple célèbre est la conception de mécanismes d’allocation permettant de répartir efficacement les médecins spécialistes sur le territoire américain. Voir Eber & Willinger (2012) pour une présentation synthétique des diffé- rents champs d’application de l’économie expérimentale. 4 Cette structuration est inspirée de la contribution désormais classique de DellaVigna (2009).

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