LIVRE BLANC

Quelques techniques de harcèlement: — “ placardisation ” de la victime par un isolement complet et une déconsi- dération auprès de ses collègues de travail et ses interlocuteurs profes- sionnels; — conseils “ informels ” à l’entourage de ne plus lui adresser la parole, de lancer des rumeurs à son sujet, de la ridiculiser y compris devant la clientèle, d’imiter une gestuelle particulière pour la ridiculiser; — discrédit et critique systématique et injustifiée du travail de la vic- time. Sans aucune explication, la victime peut se voir retirer une à une ses attributions et être cantonnée dans des tâches très inférieures à ses compétences, voir humiliantes ou encore inexistantes; — opposer un véritable “ silence radio ” aux interrogations et aux demandes de la victime qui sera ainsi explicitement et publiquement ignorée; — critiques et insinuations sur sa vie privée; — multiplication des invectives ou avertissements tant verbaux qu’écrits au moindre écart du salarié.

Si ces agissements constituent des actes de harcèlement, force est de constater qu’aucune liste ou panorama exhaustif de comportements matériels visant des actes de harcèlement ne sauraient avoir un caractère indiscutable. La qualification de harcèlement en particulier de type homophobe dépend et varie en fonction du contexte professionnel mais surtout de la personnalité du ressenti de la victime.

La difficile verbalisation des agissements récriminés P arce que les actes de harcèlement se manifestent de manière sournoise et étalée dans le temps, cela contribue largement à l’apparition de contingences légales et psychologiques face auxquelles se trouve confrontée la victime. La loi parle de comportement qui doit être répété, “ des agissements répétés. ” Même avant la loi de modernisation sociale, doctrine et jurisprudence s’accordaient pour reconnaître que le terme de harcèlement supposait une récurrence des agissements coupables entraînant une véritable “ guerre des nerfs. ” Ainsi, un seul acte, même grave, ne peut conduire à la qualification de harcèlement moral. L e juge recherche la durée du comportement incriminé car c’est le caractère lancinant de remarques ou d’attitudes intolérables, désagréables ou attentatoires à la vie privée, qui rend insupportable et donc impossible la continuation des relations de travail. Mais la victime d’actes de harcèlement ne sait jamais à partir de quel moment elle peut être en droit de considérer subir des agissements susceptibles de revêtir une telle qualification. Elle hésite longuement, s’interrogeant même sur sa propre acception de cette situation, l’employeur masquant son comportement par des actes tendant à discréditer et à isoler son salarié. Peu de victimes osent se manifester auprès de leurs proches ou des services judiciaires, car elles considèrent qu’un acte isolé quelle que soit sa gravité, ne pourra pas leur permettre de paraître crédible dans leur propos. Bien souvent, cet acte isolé est largement annonciateur d’un long travail de “ sape ” qui n’apparaîtra que plusieurs semaines, voire plusieurs mois postérieurement. Il faut que la victime prenne conscience qu’elle rentre dans une dynamique inexorable face à laquelle elle doit se préparer pour se défendre et faire valoir ses droits. La loi n’exige pas que les agissements aient réellement et effectivement porté atteinte aux droits et à la dignité des salariés, il suffit qu’ils soient susceptibles de le faire.

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L’homophobie au travail : ça existe encore ?

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