LIVRE BLANC

D ans certains cas de figure, les actes d’isolement, de dégradation des conditions de travail du salarié ou de pression morale et psychologique auront pu être matérialisés dans des échanges d’emails ou de correspondances entre la direction ou le supérieur hiérarchique et la victime. La production de ces éléments devant la juridiction prud’homale constitue une présomption de preuve non négligeable et face à laquelle l’employeur devra réagir et se justifier. Bien souvent la rupture des relations de travail par un licenciement ou une mise à pied conservatoire permet d’exclure brutalement la victime du cadre de l’entreprise. En cas de licenciement pour faute grave, la victime se voit supprimer toute période de préavis et se trouve donc licenciée le jour même. Dans le cas d’un licenciement pour motif réel et sérieux, l’employeur prendra le soin de dispenser la victime d’effectuer son préavis afin de la tenir éloignée de son poste de travail et de son entourage professionnel. L’éloignement du lieu de travail par un arrêt de travail médical, une démission forcée ou un licenciement, ne facilite pas la collecte des informations probatoires et ne laisse pas d’autre choix que de tenter de se rapprocher de collègues pour obtenir la copie de documents susceptibles d’étayer sa démonstration. E n parallèle, le harceleur ou sa hiérarchie n’auront aucune difficulté à supprimer les e-mails embar- rassants des postes de travail et n’hésiteront pas à “ fouiller ” dans la mémoire de l’ordinateur de la victime afin d’essayer de trouver tout élément exploitable y compris sur sa vie privée, au mépris des dispositions de l’article 9 du Code civil. Après avoir explicité les conditions légales et les écueils de cette procédure, l’avocat ou le délégué syndical présentera à la victime les principales pièces du dossier qu’elle aura à constituer pour démontrer le harcèlement moral ou homophobe dont elle fait l’objet dans l’entreprise. De communication usuelle et simplifiée dans d’autres cas procéduraux, leur réunion dans l’hypothèse d’un dossier de harcèlement moral ou de répression d’actes homophobes devient une véritable gageure.

Il semble que l’ambiguïté de cette situation ait échappé au législateur de 2003

Il semble que l’ambiguïté de cette situation ait échappé au législateur de 2003 lorsqu’il a opéré ce fameux renversement de la charge de la preuve et ce, dans la mesure où le harceleur se retrouve dans une situation optimale et protectrice avec un accès aisé et facilité à tout élément susceptible d’être une preuve matérielle.

La trop grande impartialité de la Médecine du travail. L a loi précise aussi “ d’altérer sa santé physique et mentale ou de compromettre son avenir professionnel… ” Cela permet en théorie de justifier l’intervention du médecin et donc de donner au juge les moyens de déceler les liens entre la santé d’un salarié et le fait d’être harcelé au travail. Cependant, le juge n’est pas doté de pouvoirs d’investigation concrets. La multiplication des certificats médicaux et l’inertie de la médecine du travail rendent cette disposition légale totalement obsolète et dénuée de toute efficacité. En mettant également l’action sur la prévention, le législateur ne s’est pas borné à renforcer les obligations à la charge de l’employeur, il a également souhaité impliquer de nombreux autres acteurs pour lutter contre le harcèlement moral. S’il apparaît primordial que les employeurs doivent protéger la santé physique et mentale des salariés et planifier la prévention en y intégrant notamment les risques liés au harcèlement (article L 122-51 et L 230-2 du Code du travail), le règlement intérieur doit de son côté rappeler les dispositions relatives à l’interdiction de toute pratique de harcèlement moral.

50

LE LIVRE BLANC de l’ Autre Cercle

Made with FlippingBook. PDF to flipbook with ease