Hors Série 44

P rotection sociale

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F. N. H. : Le chantier de la couverture sanitaire universelle ne peut être réalisable sans le ren- forcement des ressources humaines et sa mise en valeur, d’autant plus que la demande en ser- vices de santé va être en nette augmentation. Qu’en est-il ? A. B. : Les ressources humaines médi- cales des métiers de la santé repré- sentent aujourd’hui le plus grand défi à la réalisation effective d’une couver- ture sanitaire universelle. Je crois que de nombreux enseignements ont été tirés de la malheureuse expérience du Ramed, qui n’a fait que consacrer une santé à deux vitesses. Conscient de l’insuffisance des ressources humaines actuelles, le ministre de la Santé envisage le recours immédiat aux partenariats public-privé pour permettre à tous les citoyens de pou- voir se soigner aussi bien dans le sec- teur public que dans le secteur privé. Toutefois, la condition sine qua non est le respect du parcours de soins coordonnés, avec l’obligation de pas- ser d’abord par un médecin généra- liste, qu’il soit dans le secteur privé ou public, afin de mieux orienter, le cas échéant, le patient vers le spécialiste le plus adapté et adéquat à son état de santé. Ce parcours de soins coordon- nés permettra d’éviter les parcours de La refonte de la santé est un projet transverse dont la réussite dépendra de l’implication de plu- sieurs ministères de notre gouvernement.

soins erratiques, les redondances de soins inutiles et sans efficacité réelle ainsi que les dépenses de santé catas- trophiques. Mais il faut aussi rappeler que nous disposons aujourd’hui de 11 facultés de médecines (8 publiques et 3 privées) dans différentes régions du Royaume, qui permettront de rat- traper l’énorme retard en termes de formation de médecins et combler la carence de ses cadres. Mais l’ob- jectif est aussi d’arrêter l’hémorra- gie des fuites des cerveaux médicaux vers l’étranger à travers une valorisa- tion salariale et une amélioration des conditions de l’exercice de la méde- cine. F. N. H. : Ce projet d’envergure nécessite une enveloppe budgétaire colossale. Comment réussir le financement d’un tel chantier sans entraves et quel genre d’étapes nécessite-t-il ? A. B. : Pour ce qui est de l’aspect finan- cier, une importante enveloppe bud- gétaire a été mobilisée pour la généra- lisation de la couverture sanitaire uni- verselle et pour la protection sociale, soit 51 milliards de dirhams par an. Par le passé, le budget de la santé tournait à peine aux alentours de 6% du budget général du gouvernement. C’est un signe fort, qui émane d’une grande volonté politique au plus haut niveau de l’Etat. Bien sûr, la question qui se pose : Est-ce que ce budget sera suffisant pour satisfaire les énormes besoins de notre population en soins ? La réponse est qu’il est difficile de répondre aujourd’hui à cette ques- tion. Il faudrait un rodage d’au moins un an du nouveau système de santé, et d’une évaluation plus précise de

Le ministre de la Santé envisage le recours immédiat aux partenariats public-privé pour permettre à tous les citoyens de pouvoir se soigner.

retraite de base ne dépassait pas 4,27 millions de personnes, dont 80% affi- liés au régime de base de la CNSS et seulement 385.700 personnes étaient cotisantes à un régime complémen- taire, dont 80% à la CIMR, soit en tout 13% de la population marocaine qui était couverte. En langage clair, ceci veut dire que 87% de la popula- tion marocaine, c’est-à-dire 30,5 mil- lions de personnes, n’étaient affiliées à aucun régime de retraite. Situation inquiétante et grave pour toutes ces personnes vivant sans aucune pers- pective pour leur avenir et leur troi- sième âge et sous la menace de la précarité, mais pas seulement. Cette insuffisance des cotisants met aussi en danger les équilibres financiers de tout notre système de retraite. Et juste- ment, le projet de la protection sociale envisage de réaliser le rêve de plus de 30 millions de Marocains et leur espoir de pouvoir vivre décemment et dans la dignité leur 3ème âge. Mais la protection sociale, ce sont aussi les allocations familiales qui vont contri- buer à éduquer, soigner et scolariser tous les enfants du pays et notamment dans les familles les plus démunies. Les allocations pour perte d’emploi constituent aussi un filet de protec- tion pour de nombreux salariés en cas de mise en chômage. Toutes ces actions auront un coût et même un coût très lourd, ce qui explique pour- quoi la plus grande part du budget de la santé et de la protection sociale (72,5%) a été consacrée à la protection sociale, soit 37 milliards de dirhams sur les 51 milliards budgétisés.

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FINANCES NEWS HEBDO / HORS-SÉRIE N°44 80

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