IVG : La solution «maudite» Ce qui met ces femmes sur la corde raide, c’est l’obligation de garder cet enfant, car au Maroc ni la reli- gion ni la législation n’autorisent l’avortement. En se référant au cadre religieux, les articles de 449 à 504 du Code pénal interdisent l’avortement sous peine d’empri- sonnement, à moins que cette gros- sesse ne constitue un danger pour la santé de la mère. Avant son retrait du Parlement par le nouvel exécutif, une proposition de loi adoptée par le Conseil de gouvernement en 2015 prévoyait trois exceptions supplémentaires justifiant l’avortement. Il s’agit de la malformation fœtale, la souffrance d’un trouble mental pour la mère et la grossesse issue d’un viol ou d’un inceste. Mais, pour éviter ces com- plications juridiques, beaucoup de femmes choisissent comme issue de secours une IVG clandestine, mettant ainsi leur vie en danger. D’après les chiffres avancés par l’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin (AMLAC), entre 600 et 800 avorte- ments clandestins sont pratiqués quotidiennement au Maroc.
Hors-la-loi ! Le problème des mères céli- bataires est toujours tabou au Maroc. Malgré les multiples efforts consentis par la société civile, elles ne parviennent toujours pas à jouir d’une vie normale. Plusieurs fac- teurs alimentent cet acharnement dont elles font l’objet, notamment les aspects religieux et juridiques qui font qu’elles sont déclarées hors-la-loi. En effet, l’article 490 du Code pénal incrimine les relations sexuelles hors mariage; les concernés risquent ainsi des peines de prison allant d’un mois à un an. Dans la majorité des cas, consentement ou pas, la responsabilité est endossée par les femmes, puisque le géni- teur refuse souvent de reconnaître son enfant. «Au cas où une grossesse survient hors mariage, deux facteurs font que le géniteur se désiste. Le pre- mier est culturel : la personne n’ose pas informer ses proches; l’autre est financier et est relatif au manque de moyens pour gérer un foyer. Ce phénomène prend de l’ampleur au Maroc, conséquence notamment d’une absence d’éducation sexuelle
qui fait que certains couples n’ont pas recours à des moyens contra- ceptifs. D’où l’importance de la sensibilisation, que ce soit chez la petite enfance ou les adolescents, quitte même à l’intégrer dans le sys- tème éducatif» , explique Mouhcine Hichy, consultant en développe- ment humain et en sociologie. Pour sa part, Meriem Othmani considère que de nombreuses lois sont désormais obsolètes et ne répondent plus aux droits fon- damentaux des femmes, en géné- ral, et des mères célibataires et leurs enfants, en particulier. «Par exemple, la mère célibataire subit de plein fouet les conséquences de l’article 490, alors que le géniteur de cet enfant y échappe tout sim- plement. Pour un accès total aux droits fondamentaux, il est impéra- tif de revoir les lois en faveur de cette catégorie, entre autres, la recon- naissance de la mère célibataire en tant que cheffe de famille monopa- rentale, la garantie d’une identité à l’enfant, la systématisation de la reconnaissance de la paternité avec le test ADN, la jouissance des droits sociaux et de la protection sociale», détaille-t-elle.
De nombreuses lois sont obsolètes et ne répondent plus aux droits fondamentaux des femmes, en général, et des mères célibataires et leurs enfants, en particulier.
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93 HORS-SÉRIE N°44 / FINANCES NEWS HEBDO
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