La problématique est très concentrée sur les deux-roues et les piétons qui sont les plus exposés avec 69% de tués.
Autonews : Narsa est une nouvelle agence qui s’est dotée de moyens financiers et humains importants. Quelle est sa mis- sion ? Benacer Boulaajoul : La création de Narsa est qualifiée comme une sorte de maturité en matière de management de la sécurité routière. Au lieu d’avoir plusieurs intervenants dans le domaine, l’idée était de fusionner plusieurs structures en créant un seul orga- nisme qui concentre toutes les attributions afin que l’action soit plus efficace. Nous avons récupéré l’ensemble des attributions de l’ex-Comité national de prévention des accidents de la circulation (CNPAC) notamment la partie éduction, communication et sensi- bilisation, plus la partie achat de matériel de contrôle et aussi la partie étude et recherche. L’agence s’est adjugée également une bonne partie des attribu- tions de la direction routière relevant du ministère du Transport, notamment la partie relative au permis de conduire, et celle concer- nant les véhicules comme l’homologation, le contrôle technique jusqu’au retrait du véhicule de la circulation. Nous avons également récupéré les attributions du Centre national d’essai et d’homolo- gation de Casablanca, du Centre national de traitement des infrac- tions, la partie dédiée au système d’information. Nous disposons de bases de données sur les permis de conduire et les véhicules. Nous avons, en effet, repris le système de gestion des infractions qui relie le ministère du Transport, celui des Finances, la Direction générale des impôts, la gendarmerie royale, la Direction générale de la sureté nationale (DGSN) et la douane. Autonews : Comment jugez-vous l’évolution de la sinistralité dans les routes marocaines ? B. B. : Il existe un management stratégique de la sécurité routière qui a commencé à partir de 2003. C’était une révolution par rapport à ce qui existait auparavant. Car, entre 1996 et 2003, on recensait une augmentation annuelle de la sinistralité routière de 4 à 5%. La première stratégie qui était étalée entre 2004 et 2013, avait pour principal objectif de stabiliser le nombre d’accidents. Nous avons pu atteindre cet objectif et même enregistrer certaines années des baisses. L’entrée en vigueur du code de la route en 2010 avait donné des résultats spectaculaires. Au mois de septembre de la même année, soit un mois avant le nouveau code la route, nous avons enregistré une hausse de la sinistralité de 20% et un mois après avec l’entrée du code une baisse de 19%. Malheureusement, cette régression n’a duré que trois mois. La loi 52-05 a exigé la preuve matérielle de l’infraction. Le parc de radars que nous avions à cette date, ne permettait pas de réaliser cette fonction. Pour déployer et financer l’acquisition de ces outils, cela a pris du temps. La sinistralité a alors repris de plus belle et 2011 a été une année macabre dans l’histoire des accidents de la circulation au Maroc avec 4 222 morts. Aujourd’hui, nous sommes à 3 417. La stratégie nationale de 2017-2026 a pour objectif de réduire de moitié le nombre de décès. En 2022, nous étions à -10%. Le cumul des vies humaines épargnées est de 1 500. Cependant, même si la tendance est baissière, nous restons loin des objectifs. Autonews : La sinistralité routière évolue plus vite dans le milieu urbain que dans le rural. Comment expliquez-vous ce phéno- mène ? B. B. : Sur les dix dernières années, nous avons gagné 10 points dans la part du nombre de tués dans l’urbain par rapport au rural. Nous étions sur une part de 50-50. Actuellement, nous sommes sur 60-40. La problématique est très concentrée sur les deux-roues et les piétons qui sont les plus exposés avec 69% de tués. Les pre- miers représentent 39% des décès. Malheureusement, la plupart sont des jeunes entre 15 et 29 ans, une catégorie qui représente 44% du nombre total. Si on passe à 35 ans, la part grimpe à 53%. Il est donc clair que le plan d’action doit être focalisé sur cette
cible. Pour ce faire, nous avons lancé un programme dit «Safe Moto», qui englobe la partie communication et sensibilisation et aussi la partie contrôle. Au niveau national, 78% du non-respect des feux rouges sont les deux-roues, et à Marrakech ce taux atteint 83%. Nous allons les intégrer au niveau des contrôles automatisés des radars fixes. Pour mieux les superviser au niveau de la vitesse, les blocs moteurs seront contrôlés car parfois ils sont transformés et ne correspondent pas à la réglementation en vigueur, notamment au niveau du volume de leur cylindrée et de leur puissance. A cet égard, les agents de la DGSN seront équipés de speed mètres pour veiller à leur conformité. Au programme figure également le renforcement du contrôle des casques à travers la mise en place d’une brigade mobile de la circulation routière. Elle sera lancée d’abord à Tanger avant d’être déployée dans plusieurs villes. Nous avons acheté 130 motos qui sont mises à la disposition de la DGSN afin d’avoir des unités mobiles qui circulent au niveau de la ville pour contrôler les dysfonctionnements comportementaux. Autonews : Outre la sécurité routière, quels sont les services assurés par Narsa ? B. B. : Quand on synthétise notre activité, elle s’articule autour de deux axes. Le premier concerne l’amélioration de la sécu- rité routière. Nous ne sommes pas les seuls intervenants dans ce domaine, il y a la gendarmerie royale, la justice, la DGSN et les finances. Le deuxième axe concerne un ensemble de services liés aux usagers de la route, comme le permis de conduire, les cartes grises et la visite technique. C’est Narsa qui donne les agréments pour les auto-écoles et qui assure leur supervision et leur contrôle avec tout le support didactique et pédagogique pour l’enseigne- ment de la conduite. Nous organisons l’examen pour les permis de conduire, la gestion du solde de points, leur retrait, leur attribution ou le retrait du permis. Depuis son démarrage, Narsa recense 1,6 million de permis touchés par le retrait des points. Au niveau de la partie véhicule, nous assurons l’homologation par type et celle liée à la réception à titre isolé qui concerne les véhi- cules importés de l’étranger ou ceux qui ont subi des changements comme les poids lourds. Pour le volet contrôle technique, nous supervisons tout le pro- cessus qui se fait à travers les centres de visite technique tout en développant de nouveaux métiers comme la partie expertise. Autonews : Qu’en est-il de votre collaboration avec les collectivi- tés territoriales pour organiser et gérer la signalisation ? B. B. : Nous collaborons avec les collectivités territoriales (CT) pour ce qui est des normes techniques des infrastructures. Et pour cause, il existe un manque patent pour l’ensemble des normes des infrastructures. A ce sujet d’ailleurs, nous avons élaboré un guide référentiel pour tout ce qui est aménagement de la sécurité. Les CT seront initiées à ce guide pour que l’espace soit aménagé selon les mêmes normes dans tout le territoire national et dispo- sons d’un département qui s’occupe uniquement de leur accompa-
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