Finances News Hebdo N° 1068

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POLITIQUE

JEUDI 9 JUIN 2022 FINANCES NEWS HEBDO

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faire des choix politiques courageux. Certaines réformes stratégiques, comme celle de la compensation, ne doivent pas tarder. Tout temps perdu impliquera des effets indésirables de taille. Par exemple, si la décompensation pour les hydrocarbures n’avait pas été adop- tée il y a quelques années, le budget

public aurait été mis à rude épreuve et l’Etat marocain aurait été inca- pable d’honorer ses engagements. S’il devait le faire aujourd’hui, ça aurait été préjudiciable à d’autres secteurs. Il est temps d’entamer le processus de décompensation pour le sucre, la farine et le butane et d’octroyer des aides directes aux populations démunies. Certes,

Certaines réformes stratégiques, comme celle de la compensa- tion, ne doivent pas tar- der. Tout temps perdu impliquera des effets indésirables de taille.

ce genre de décisions est très lourd de conséquences sur le plan politique, mais il faut les adopter et en assumer les responsabilités. Le PJD en est le parfait exemple. Il a fait des choix douloureux comme la réforme de la retraite et la compensation des hydrocarbures, ce qui l’a mené à perdre une bonne partie de son électorat, en chutant de la première à la huitième place sur l’échiquier politique. D’autre secteurs ont besoin de réformes et de plans de développement d’ur- gence. Je pense notamment à celui de l’eau, car le Maroc risque de subir une catastrophe dans les années à venir si aucun programme audacieux n’est lancé. Sans oublier la santé et l’ensei- gnement. F.N.H. : Avec des formations dis- persées, minoritaires et diamé- tralement opposées sur le plan idéologique, l’opposition peut- elle avoir un poids pour contrôler la majorité et être une force de propositions ? M. B. : De par l’article 10 de la Constitution, l’opposition parlementaire dispose d’un statut lui conférant des droits à même de lui permettre de s’ac- quitter convenablement de ses missions afférentes au travail parlementaire et à la vie politique. Mais, comme vous l’avez souligné, il existe une multitude de partis dont le référentiel idéologique est parfois diamétralement opposé. On trouve de toutes les couleurs : des partis conservateurs, des formations progressistes et d’autres libérales. Mais face à une situation difficile, les chefs de groupes parlementaires des par-

tis de l’opposition ont rencontré, il y a quelques semaines, leurs chefs de partis. L’objectif était de coordonner leur action politique pour construire une opposition homogène face à la troïka gouvernementale. Certes, il existe des divergences frap- pantes entre certains leaders, à l’image de Abdelilah Benkirane et Driss Lachgar. Toutefois, l’objectif n’était pas de récon- cilier les personnes, mais d’arrêter une position commune sur des sujets de grande importance afin d’atténuer l’hé- gémonie de la majorité. Quand on analyse de près le rythme de travail de l’opposition, je pense qu’il est assez satisfaisant. Cela est visible sur le nombre de questions orales et écrites posées, le travail en commission et les demandes d’enquête. F.N.H. : Certains ministres occupent aussi la fonction de président de commune. Le sujet du cumul des mandats ne néces- site-t-il pas une remise en ques- tion ? M. B. : Le cumul des mandats ne concerne pas uniquement les ministres, mais aussi les parlementaires et autres hauts commis de l’Etat. Ce phéno- mène existe dans plusieurs pays du monde, y compris dans les grandes démocraties. Certains pays imposent certaines restrictions dans ce domaine. Sur le plan juridique et institutionnel, au Maroc rien n’empêche ce cumul, alors qu’il est interdit d’être parlementaire et

président d’une commune de plus de 300.000 habitants. Nabila Rmili, qui était à la fois ministre de la Santé et maire de Casablanca, a été contrainte, sous la pression des réseaux sociaux, de renoncer à sa première fonction pour se consacrer exclusivement à la gestion locale. C’est une décision qui a été for- tement saluée par les citoyens. Un président de commune doit mener un travail de proximité et être proche des citoyens afin de suivre leurs pro- blèmes au quotidien. Un ministre dis- pose d’un bureau à Rabat, ses activités protocolaires se font le plus souvent dans la même ville et il doit être pré- sent chaque semaine au Parlement pour répondre aux questions écrites et orales et participer aux activités des commis- sions. De par sa fonction, il est appelé à entamer de nombreux déplacements à l’étranger. Donc, sur le plan pratique, il est difficile de mener à bien ces dif- férentes missions et être efficace pour les deux mandats. Mais les ministres concernés délèguent leurs pouvoirs et supervisent à distance leur attribution au niveau de la commune. Pour réus- sir ce challenge, ils doivent disposer d’une équipe qualifiée qui jouit d’un capital confiance. Il doit être soutenu par une majorité forte. Et pour conforter son pouvoir et contrer les poches de résistance émanant des membres de son bureau ou du conseil communal, le président d’une commune est appelé à faire des compromis. ◆

D’autre sec- teurs ont besoin de réformes et de plans de développe- ment d’ur- gence.

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