BI No 1-36 combinés

L’invité* : Charles Trolliet

Vétérinaire, président du Conseil et Observatoire suisse de la Filière du Cheval, ancien président de la Fédération Suisse des Sports Equestres Et les animaux ? Les nuisances de toutes sortes liées aux éoliennes ne sont plus à démontrer et les témoignages de per- sonnes affectées, d’une façon ou d’une autre, par leur présence dans leur environnement sont extrême- ment nombreux : stress, insomnies, maux de tête, dépression, diverses maladies organiques

Mais il ne faut pas oublier que l’être humain est un « animal comme les autres » ! On peut donc raisonnablement penser que les animaux devraient être touchés également par ces nuisances et, à l’heure où l’on prêche, avec raison, le respect de la biodiversité et la bientraitance envers les animaux ainsi que le principe de précaution, il faut absolument prendre ceux-ci en compte dans le débat éolien. En outre, les animaux, de par leur sensibilité souvent plus aigüe à diverses nuisances, doivent être considéré comme des « sentinelles », dans l’optique de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler le concept « One Health » qui est une approche intégrée et unificatrice visant à équilibrer et à optimiser durablement la santé des personnes, des animaux et des écosystèmes. Dans ce cadre, on reconnait que la santé des êtres hu- mains, des animaux domestiques et sauvages, des plantes et de l'environnement au sens large (y compris les écosystèmes) sont étroite- ment liées et interdépendantes. Bien sûr, la première pensée qui vient à l’esprit lorsqu’on évoque les dégâts causés par les éoliennes sur les animaux est la question des oiseaux et chauves-souris directement victimes de ces machines. Même si leur nombre reste relativement faible par rapport aux autres causes de mortalité, tout facteur augmentant les pertes est inacceptable dans la situation actuelle en termes de biodiversité. Un autre groupe d’animaux, moins spectaculaire mais tout aussi emblématique, est constitué par les insectes. On estime, toutes espèces confondues, qu’une seule machine tue entre 3 et 400 kilos d’insectes par an respectivement que ce ne sont pas moins de 200'000 individus qui périssent journellement en été sur les pales d’une seule éolienne, réduisant d’autant la nourriture des insectivores de tout genre. En outre, lorsqu’on sait que les abeilles communiquent entre elles au moyen de sons de très basses fréquences, similaires à ceux créés par ces machines, on ne s’étonne pas des observations faites quant à la désorientation de certaines colonies, surtout au moment de l’essaimage. Outre la perte de biodiversité directe, c’est aussi la diminution des insectes pollinisateurs qu’il faut prendre en compte, avec toutes les con- séquences qu’on connait, en particulier pour les productions agricoles. Il ne faut pas oublier la faune sauvage : le bruit continu mais aussi les sons de fréquences inaudibles pour l’être humain sont une source de stress permanent. Une étude britannique, faite sur des blaireaux, a montré, au moyen de la mesure du taux de cortisol (l’hormone du stress) dans les poils de ces animaux que ceux habitant à faible distance des parcs éoliens étaient significativement plus stressés que ceux qui en étaient éloignés. En outre, en répétant ces mesures, on a constaté qu’il n’y avait pas d’accoutumance et que le stress persistait sur plusieurs années. On peut raisonnablement penser que ce stress est également ressenti par les autres espèces animales et qu’il impacte donc leur qualité de vie et potentiellement leur santé. On ne s’est que peu ou pas intéressé aux effets des parcs éoliens sur la faune du sol (ou pédofaune) constituée de diverses espèces d’ani- maux comme les lombrics par exemple. Pourtant tout porte à croire qu’ils pourraient également être affectés par les vibrations transmises par le socle des machines et par les courants électriques en relation avec les installations de transport de l’énergie. En ce qui concerne enfin les animaux domestiques, et plus particulièrement les animaux de rente, certaines études sont inquiétantes : on a relevé des effets négatifs chez des porcs et des oies élevés à proximité d’éoliennes par rapport à ceux élevés à plus grande distance : retard de croissance et prise de poids plus lente, variation dans la composition de la viande. D’autre part, les témoignages se multiplient sur des constatations faites dans des exploitations laitières (en France particulièrement) avec des morts inexpliquées, des problèmes de qualité du lait ou des troubles du comportement des animaux. Dans des élevages de moutons, on a rapporté des taux de malformations et d’avorte- ments anormalement élevés et, au Danemark, la mise en service d’un parc éolien a été associée à des troubles du comportement et à des avortements chez des visons. Toutes ces études et constatations doivent faire réfléchir ! Mettre en place, pour une production médiocre et aléatoire, des machines géné- rant autant de dégâts aux êtres vivants, des petits coléoptères à l’être humain, est irresponsable ! * « L’invité » est une rubrique qui donne la parole à une personnalité dont les préoccupations touchent d’une façon ou d’une autre à la pro- blématique des éoliennes. Les propos tenus n’engagent que leurs auteurs.

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