Découvrez le numéro 981 de Finances News Hebdo, premier hebdomadaire de l'information financière au Maroc
Du 30 octobre 2025 - 8 DH - N° 1213
PREMIER HEBDOMADAIRE DE L'INFORMATION FINANCIÈRE AU MAROC
Directeur de la publication : Fatima Ouriaghli
Loi organique des Finances
Investissements Le pari budgétaire du gouvernement
Vers une obligation de résultats
P. 8/9
P.18/19
P. 12 à 15
PLF 2026 Une nouvelle impulsion pour un système de santé plus équitable
Maroc – Algérie L’intelligence militaire contre la force brute
Entretien avec Abdelmadjid Belaïche, expert en industrie pharmaceutique
P. 30/31
P. 16/17
Dépôt légal : 157/98 ISSN : 1114-047 - Dossier de presse : 24/98 - Adresse : 83, Bd El Massira El Khadra, Casablanca - Tél. : (0522) 98.41.64/66 - Fax : (0522) 98.40.22 - Adresse web : www.fnh.ma
SOMMAIRE
2
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
Voyons voir : Biya – Ouattara : L’île de la tentation Ça se passe au Maroc 4 5 ACTUALITÉ
25 L'UNIVERS DES TPME
Editorial
Entretien avec Ismail Rachdaoui : Nextwi, «Le Wi-Fi n’est plus un service, mais un levier de compétitivité pour les TPME»
BOURSE & FINANCES
26 28 POLITIQUE
Point Bourse Hebdo : Marché requinqué, convictions retrouvées Projet de Loi de Finances 2026 : Des partis de l’opposition déçus par le contenu du texte Loi organique des finances : Vers une obligation de résultats pour un budget plus efficace Maroc Telecom : L’opérateur confirme sa solidité au 3 ème trimestre 2025 Paiement digital : L’acceptation, dernier maillon du puzzle
6
Sahara marocain : Conversation secrète Entretien avec Mohamed Belmir : Sahara marocain, «Le régime militaire algérien a fait de la marocophobie une doctrine d’Etat»
7
Fatima Ouriaghli Directeur général, Responsable de la publication
8
9
10
Soudan
e Soudan meurt à petit feu. Dans un vacarme d’obus et une indif- férence assourdissante. Depuis plus de deux ans, deux hommes se disputent un pays comme on se dispute un butin. D’un côté, Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti, chef des Forces de sou- tien rapide (FSR), héritier des milices Janjawid, responsables des massacres du Darfour dans les années 2000. De l’autre, le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée régulière et putschiste. Deux visages d’une même malédiction : celle du pouvoir pour le pouvoir, avec la guerre comme seul langage. Leur duel fratricide a plongé le pays dans un gouffre sans fond. Des villes entières ont été rasées, des villages brûlés, des femmes violées et des enfants exécutés. A El-Fasher, au Darfour-Nord, plus de 2.000 civils ont été massacrés dimanche et lundi dernier, selon les forces pro-gouvernemen- tales. L’ONU recense au moins 1.850 morts dans cette région depuis janvier, mais reconnaît que le chiffre est sous-évalué. Au total, ce conflit a déjà fait des dizaines de milliers de morts depuis 2023. L L’indifférence face à l’horreur Les humanitaires décrivent un enfer, avec des familles entières enterrées vivantes sous les décombres, des malades abandonnés faute de médi- caments et des enfants affamés. Le Programme alimentaire mondial parle d’une population «au bord de la survie». Près de 30 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire, dont 15 millions d’enfants. Mais le plan d’urgence de l’ONU reste financé à seulement 25%. Le reste n’intéresse personne. Ce pays dévasté est devenu un musée de la cruauté moderne, où les deux camps sont accusés de crime de guerre. Le Humanitarian Research Lab de l’Université Yale parle d’un «nettoyage ethnique systématique» des popula- tions non arabes Fur, Zaghawa et Bartis. L’ONU dénonce des «exécutions atroces» et des «viols de masse». Amnesty International parle d’esclavage sexuel, d’enrôlement d’enfants et de villages entiers rayés de la carte. Et que répond le monde à cela ? Rien, ou presque. Hormis des cris d’orfraie ici et là, inaudibles dans la fournaise du Soudan. L’Union européenne dénonce la «brutalité» des paramilitaires, la France «exhorte» à la négocia- tion, tandis que l’ONU «appelle» à la retenue. L’Afrique, elle, s’agite, mais en vain. Le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine publie des communiqués pleins de bonnes intentions, sans lendemain. Des mots qui ne sauvent personne. Ni les femmes. Ni les enfants. La communauté internationale a inventé une forme de compassion bureau- cratique : l’art de s’émouvoir sans agir. Et pendant que les grandes puis- sances sont occupées ailleurs, en Ukraine et à Gaza notamment, le Soudan, lui, s’efface des priorités diplomatiques. Même les médias font peu de cas de ce conflit qui est, pourtant, « l'une des pires crises de protection que nous ayons connues depuis des décennies », selon Kelly Clements, haut-commis- saire adjointe de l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Bref, le monde regarde ailleurs. Tournant le dos à un pays où le massacre s’inscrit dans la normalité et où les morts sont réduits à des statistiques macabres. u
29 SOCIÉTÉ
Zakat : Tout ce qu’il faut savoir sur la nouvelle Fatwa du CSO
Intelligence artificielle : Amal El Fellah Seghrouchni lève le voile sur la loi «Digital X.0» Maroc – Algérie : L’intelligence militaire contre la force brute Investissements : Le pari budgétaire du gouvernement Conquête spatiale : Pourquoi un spatiodrome pourrait devenir un levier économique et géostratégique pour le Maroc Entretien avec Charaf Louhmadi : Espace, Prochain terrain d’influence du Royaume ? Tiers-secteur : Comment le sortir de sa marginalité économique Numérique : Le Maroc passe de la sous-traitance à la création de valeur 12 16 18 20 22 23 24 ECONOMIE
30 SANTÉ
Entretien avec Abdelmadjid Belaïche : PLF 2026, Une nouvelle impulsion pour un système de santé plus équitable
32 GNL : Un paradoxe nécessaire ? DEVELOPPEMENT DURABLE
34 HIGH-TECH
Live Intelligence : Orange Maroc met l’IA au service des entreprises
• Directeur des rédactions & Développement : David William • Journalistes : Charaf Jaidani, Leïla Ouriaghli, Adil Hlimi, Youssef Seddik, Khalid Aourmi, Ibtissam Zerrouk, Désy Mbakou • Révision : M. Labdaouat • Directeur technique & maquettiste : Abdelillah Chamseddine • Mise en page : Zakaria Beladal
• Assistantes de direction : Amina Khchai • Département commercial : Samira Lakbiri, Rania Benchaib • Administratif : Fatiha Aït Allah • Édition : JMA CONSEIL • Impression : Maroc Soir • Distribution : Sochpress • Tirage 5.000 exemplaires • Dépôt légal : 157/98 • ISSN : 1114-047 • Dossier de presse : 24/98 • N° Commission paritaire : H.F/02-05 • S.A.R.L. au capital de 5.000.000,00 DH - C.N.S.S. 600 50 62 I.F. 1022303 - Patente 35770001 - ICE N° : 001526693000021
• Directeur Général responsable de la Publication : Fatima OURIAGHLI Contact : redactionfnh@gmail.com
VOYONS VOIR
4
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
Biya - Ouattara
L’île de la tentation
A Yaoundé comme à Abidjan, les électeurs ont fait un choix audacieux : celui de ne rien changer. Au Cameroun, Paul Biya vient ainsi d’entamer son huitième mandat avec 53,66% des voix. Un chiffre infini, si on le couche sur le côté. Issa Tchiroma Bakary, arrivé deuxième, crie à la mascarade, revendique 54,8% selon son propre calcul et appelle à défendre sa victoire. Le taux de participation, qui n’est que de 46,31%, en dit long : quand on tripatouille continuellement la démocratie, les convictions politiques s’étiolent et le vote perd tout son sens. A 92 ans, Biya vient donc de rappeler au monde que la politique n’est pas un sprint, mais un mara- thon avec arrivée à date indéterminée. Par D. William
Tidjane Thiam, recalé pour cause de «nationalité incertaine». Bref, ADO a couru seul et il a gagné. Mais ce quatrième mandat a l’inconvénient d’une victoire sans rival. Mode «replay» Biya et Ouattara ne gouvernent pas le même pays, mais forment une belle affiche du continent version «replay» . Parce que quelque chose de très profond les relie : la conviction intime que le pouvoir ne s’abandonne pas. Les Constitutions se plient à leurs ambitions, les conseils constitution- nels valident leurs rêves et les opposants font de la figuration. En Côte d’Ivoire, le mot «devoir» a servi de cau- tion morale. Au Cameroun, «stabilité» est brandie comme un talisman. C’est commode. Mais cela réduit la démocratie à de la fiction. On peut aimer Biya ou Ouattara. On peut même leur reconnaître des succès économiques, diplo- matiques ou militaires. Mais peut-on parler de démocratie sans renouvellement de la classe poli- tique ? Chez l’un comme chez l’autre, l’île de la tentation n’a pas les courbes d’une femme, mais celles d’un pouvoir auquel on ne saurait renoncer. Il serait injuste cependant de dire que Biya et Ouattara sont seuls dans cette catégorie. Non. Ils appartiennent à une confrérie ancienne et prestigieuse : celle des présidents qui ne partent jamais. Comme Teodoro Obiang Nguema, 83 ans (Guinée Equatoriale, 46 ans de règne), Yoweri Museveni, 81 ans (Ouganda, presque 40 ans de règne), ou encore Denis Sassou Nguesso, 81 ans (Congo, totalise 41 ans de règne). Pour ces dirigeants, quitter le pouvoir est encore plus difficile que de gouverner. Ils ne peuvent se résigner à renoncer aux cortèges, tapis rouges, avions officiels et autres privilèges que leur confère leur fonction. Alors, ils transforment le palais présidentiel en résidence personnelle. Et permanente. Mais les temps changent. A bout, les peuples grognent et les armées s’agitent. Du Gabon au Niger, en passant par le Burkina Faso, ces dernières années ont démontré un phénomène simple : un mandat de trop est souvent un mandat dangereux. Quand les urnes cessent de convaincre, les bottes s’expriment. Les militaires adorent «sauver la démocratie» . Souvent à coups de kalachnikov. ◆
de vétérans. Où l’ambition affichée est claire : gouverner jusqu’à la mort. Malgré les crises dans les zones anglophones, le chômage massif des jeunes et la détresse sociale, les Camerounais ont ainsi décidé de renouveler leur confiance à Biya. On objectera que la longé- vité n’est pas un crime. Certes. Mais elle traduit, dans le fond, une certaine résignation populaire. A Abidjan, l’histoire politique s’écrit avec un peu plus de style. Alassane Dramane Ouattara, ADO pour les intimes, 83 ans, a trouvé la formule magique : lorsque l’on veut prolonger son bail républicain, il suffit de dire que «le devoir peut parfois transcender la parole donnée de bonne foi» . Et si possible, le dire d’un ton grave. Cette phrase magnifique dit tout : la justification par l’impératif supérieur, la nécessité qui vient moraliser le reniement et la gravité qui maquille la décision politique en vertu civique. Et voilà com- ment un quatrième mandat, avec 89,77% des voix s’il vous plait, devient non pas une volonté, mais un service à la nation. Un score à faire pâlir les plus efficaces des partis uniques. Il faut dire que ses adversaires n’étaient pas fran- chement menaçants : Jean-Louis Billon, dissident du PDCI, plafonne à 3%, l’ex-première dame Simone Gbagbo à 2,4% et les autres se partagent les miettes. Les poids lourds ? Ecartés. Laurent Gbagbo, disqualifié pour cause de condamnation. oui , je souhaite m’abonner à cette offre spéciale pour 1 an BULLETIN D’ABONNEMENT Mon abonnement comprend : ❑ 48 numéros Finances News hebdo & 2 numéros du Hors-série. Voici mes coordonnées : ❑ M ❑ Mme ❑ Mlle Nom/Prénom : ................................................................................... Adresse : ............................................................................................ Ville : ............................. Code Postal : ............................................ Tél : ........................................ Fax : ................................................. E-mail : ............................................................................................. Mon règlement ci-joint par : ❑ Chèque bancaire ou virement bancaire à l’ordre de JMA Conseil : Banque Populaire, Agence Abdelmoumen, Compte N° 21211 580 5678 0006-Casablanca - (Maroc)
En cela, depuis 1982, le Cameroun revient inlas- sablement à la case départ. Dans n'importe quelle autre démocratie, un septième, puis un huitième mandat susciterait quelques sourcils levés, voire l’indignation populaire. Au Cameroun, c’est ancré dans la normalité. Après 43 ans au pouvoir, Biya, c’est un peu comme ce meuble ancien dans nos maisons qu’on n’a jamais osé changer : trop lourd et un peu poussiéreux, mais pour lequel on a une cer- taine affection qui pousse grand-mère à dire «on ne sait jamais, ça peut servir un jour». Dans ce Cameroun de 2025, où 62% de la population ont moins de 25 ans, le pouvoir donc reste une affaire
ÇA SE PASSE AU MAROC
5
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
Aéroports du Maroc
Plus de 23,9 millions de passagers enregistrés en huit mois
L e flux de voyageurs accueil- lis dans les aéroports du Royaume a dépassé 23,9 millions de personnes durant les huit premiers mois de 2025, en hausse de 11,7% par rapport à la même période un an aupa- ravant, selon la Direction des études et des prévisions finan- cières (DEPF).
Cette progression fait suite au renforcement du trafic interna- tional de voyageurs de 11,2%, conjugué à celui du trafic national de 15,8%, indique la DEPF dans sa récente note de conjoncture. Par faisceau géographique, cet accroissement revient à la croissance consolidée du trafic avec l'Europe (+10,6%), avec le Moyen et Extrême Orient (+15,5%), avec l'Amérique du Nord et du Sud cumulées (+23,2%), avec l'Afrique (+9,7%) et les Pays du Maghreb (+10%), précise la même source. Concernant le trafic aérien du fret, il s'est accru de 8,6% au terme des huit premiers mois de 2025. ■
Tourisme
18 millions de visiteurs attendus fin 2025 L es prévisions de clôture de l'année 2025 font état de 18 millions d'arri- vées touristiques, pour des recettes estimées à 124 milliards de dirhams, selon le rapport sur les établissements et entre- prises publics (EEP) accompagnant le pro- jet de Loi de Finances (PLF) de 2026. La hausse des arrivées, des nuitées et des recettes touristiques traduit l’impact des efforts engagés pour renforcer la connectivité aérienne et la promotion du Maroc dans le cadre de la feuille de route 2023-2026. Les investissements triennaux prévoient un budget de 2,5 Mds de DH à l’horizon 2026. A fin juin 2025, l’ONMT a investi 500 MDH sur une prévision annuelle de 2 Mds de DH, soit un taux de réalisation prévisionnel de 60%. L’Office compte poursuivre cette dynamique sur 2027-2028 à travers de nouveaux partena- riats aériens, la création de lignes et une stratégie marketing intégrée. Sa stratégie «Light in Action» vise à positionner le Maroc parmi les 15 premières destinations mondiales. ■ L a ministre de l’Aménagement du ter- ritoire national, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville, Fatima Ezzahra El Mansouri, a annoncé, lundi à la Chambre des représentants, que 71.114 personnes ont bénéficié à ce jour du programme d’aide au logement. Elle a également souligné que 24% des bénéficiaires sont des Marocains résidant
Droit de grève
Sekkouri explique les garanties de la loi organique A près plus de 25 mois de concertation avec les syndicats les plus représentatifs et le patronat, dans le cadre de l'institutionnalisation du dialogue social, le gouvernement est déterminé à faire de la loi organique, définissant les conditions et modalités d'exercice du droit de grève, un texte qui protège les
grévistes et les droits des Marocains tels que stipu- lés dans les dispositions de la Constitution. C’est ce qu’a affirmé Younes Sekkouri, ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, dans une déclaration à la presse à l'issue de sa présentation du projet de loi organique devant la Commission des secteurs sociaux. Le gouvernement veille à ce que cette loi protège également la liberté et la continuité de travail dans les entreprises, les établissements et les services publics, a-t-il relevé, ajoutant que la loi sur le droit de grève doit se mettre au diapason du Maroc du 21 ème siècle. Le ministère poursuivra les discussions avec les syn- dicats, parallèlement à son action visant la promulga- tion de cette loi, a-t-il dit, soulignant la nécessité du « consensus et du respect des droits des citoyens ». ■
Logement : L’aide directe de l’Etat séduit les jeunes, les femmes et les MRE
à l’étranger, 47% des femmes, et 54% des jeunes de moins de 40 ans. Elle a ajouté que 63% des bénéficiaires ont reçu une aide de 70.000 DH, contre 37% ayant perçu 100.000 DH. La moyenne mensuelle des bénéficiaires est passée de 2.400 unités en 2024 à 3.600 en 2025, traduisant, selon elle, le dynamisme du secteur. ■
www.fnh.ma
BOURSE & FINANCES
6
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
Point Bourse Hebdo Marché requinqué, convictions retrouvées
E Après un mois de repli, le marché renoue avec la hausse, porté par un climat psychologique apaisé et des opportunités jugées à nouveau séduisantes. ncore une fois, le marché nous rap- pelle que la psychologie pèse sou- vent plus lourd que les chiffres. La Bourse de Casablanca a repris de la hauteur cette semaine, portée par un regain de confiance nourri à la fois par le contexte géopolitique, un sen- timent de soulagement collectif et une envie claire de se repositionner sur des niveaux redevenus attrac- tifs. Après quatre semaines de repli, l'indice Masi s’offre un rebond franc de 5,34% à 19.443,32 points. Une remontée forte et pleine de sens, qui efface presque intégralement la baisse récente et replace l’indice dans le sillage de sa tendance haus- sière de fond. Par Y . Seddik
Evolution de l'indice Masi depuis début octobre 2024
tardé à converger dans leur lecture. Chez CFG Marchés, on estimait déjà que «cette phase n’invalide en rien la tendance de fond. Au contraire, elle ouvre de nouvelles opportunités pour ceux qui n’ont pas encore pro- fité de la hausse précédente» . Même son de cloche du côté d’African Financial Investment, où l’on consi- dérait que cette respiration avait per- mis un rééquilibrage des multiples de valorisation. Le ratio cours/ béné- fices prévisionnel du Masi, qui flirtait avec les 22x en avril, était revenu autour de 19x, un niveau plus proche de sa moyenne historique. «Le mar- ché s’est normalisé» , résumait alors Jérôme Boumangel, rappelant que la baisse «s’apparentait davantage à une phase de consolidation qu’à un signal de retournement». En clair, une correction technique, saine et rapidement absorbée. Parallèlement, ce regain d’inté- rêt s’est manifesté aussi dans les volumes, avec pas moins 2,12 mil- liards de dirhams échangés sur la semaine. Les opérateurs sont reve- nus dans le marché, sans précipita- tion mais avec conviction. Vicenne reste la valeur la plus travaillée avec 402 MDH, soit près de 20% des
TOP Performances
FLOP Performances
Salafin Sanlam Maroc Zellidja
-8,09%
+19,59% +14,66%
Vicenne Fenie Brossette Ennakl
-6,26%
-4,39%
+12,22%
flux hebdomadaires. Elle signe d’ail- leurs la meilleure performance de la semaine (+19,59% à 525 DH), suivie d’Ennakl (+12,22% à 65,13 DH) qui a publié ses indicateurs relatifs au 3e trimestre. Les grosses capitalisations ont aussi contribué à la dynamique : Attijariwafa bank (248 MDH) et TGCC (146 MDH) ont animé la cote. Sur le plan sectoriel, la reprise s’est élargie. Les indices Santé (+12,41%), Holdings (+11,15%) et Immobilier (+9,81%) signent les plus fortes hausses, tandis que seuls Financement (-3,56%) et Loisirs & Hôtels (-1,19%) terminent dans le rouge. Côté résultats, les choses sérieuses commencent. Maroc
Telecom retrouve son rythme nor- matif, avec un bénéfice de plus de 5,5 milliards de dirhams à fin sep- tembre. Le marché y voit un signe de stabilisation bienvenue dans un environnement globalement porteur. À deux mois de la fin de l’année, le ton reste plutôt confiant. Les ana- lystes d’AFI anticipent une année 2026 toujours haussière, même si elle pourrait être «moins dynamique» que 2024 et 2025. En attendant, la Bourse de Casablanca semble avoir retrouvé son aplomb : une phase de correction absorbée, une psy- chologie regonflée et un marché qui reprend sa marche en avant, calme- ment mais sûrement. ◆
Le bras de fer entre acheteurs et vendeurs n’aura donc pas fait long feu. Très vite, les flux acheteurs ont repris le dessus pour casser la phase d’hésitation observée début octobre. À ce stade, le marché a déjà retracé près des deux tiers de son dernier mouvement baissier, preuve que la structure technique de fond demeure intacte. La correction de septembre aura finalement servi de zone d’accumulation plutôt que de rupture. Les bureaux d’analyse n’avaient pas
BOURSE & FINANCES
7
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
Parti du progrès et du socia- lisme (PPS) a lui aussi mis l’accent sur «le sprint final du gouvernement pour initier les différentes réformes et réaliser les chantiers structurants avant fin de son mandat» . Rachid Hamouni, membre du bureau politique du parti, a déclaré que «nous allons exa- miner le PLF 2026 pour appor- ter nos remarques, et éventuel- lement les amendements qui s’imposent. Le texte doit veiller à la réalisation des projets de nouvelle génération à carac- tère territorial pour soutenir les régions qui en ont besoin» . Nabila Mounib, secrétaire géné- rale du parti socialiste unifié (PSU), relève pour sa part que «les indicateurs du Royaume ne sont pas satisfaisants tant aux niveaux économique que social. Les derniers chiffres du haut-commissariat au Plan (HCP) confirment ce constat. La pauvreté et l’analphabé- tisme atteignent des niveaux inquiétants. Le PLF 2026 ne comprend pas de dispositions pour relancer l’économie et créer des emplois» . La dépu- tée fait savoir que «de nom- breuses familles démunies ne perçoivent pas la subvention de 500 DH. Ce programme de soutien social est à revoir pour qu’il soit équitable». Elle note par ailleurs que «le PLF 2026 ne comporte pas les réformes fiscales tant attendues, notam- ment l’élargissement de l’as- siette et la réduction des exo- nérations». Certains partis de la majori- té ont, eux aussi, critiqué le PLF 2026 à demi-mot. C’est l’exemple de l’Association des économistes istiqlaliens qui a estimé qu’il faut prendre avec beaucoup de précaution les hypothèses retenues par le PLF 2026, notamment le taux de croissance qui dépend de la pluviométrie. Les écono- mistes préconisent de revoir le fonctionnement du Registre social unifié, qui exclut une partie de la population cible des programmes de subven- tions allouées. ◆
Les budgets dédiés à l'enseignement et la santé ont été sensiblement revus à la hausse dans le PLF 2026.
Projet de Loi de Finances 2026
Les formations de l’opposition ont été les premières à formu- ler de vives critiques à l’en- contre du texte. Le secrétariat général du Parti de la justice et du développe- ment (PJD) a affirmé, à l’issue de la dernière réunion de la for- mation politique, que «le PLF n’est pas à la hauteur des défis auxquels est confronté le pays et n’a pas pris en considération le contexte actuel marqué par des incertitudes et des troubles sociaux». Ils estiment qu’il n’a pas pris en considération le contexte particulier et difficile actuel. C’est le dernier PLF du mandat de ce gouvernement. Par C. Jaidani L Des partis de l’opposition déçus par le contenu du texte
e projet de Loi de Finances 2026 était particulièrement attendu. Dès sa publication, il a immé- diatement suscité des réactions de l’ensemble des partis poli- tiques, des associations pro- fessionnelles ainsi que de nom- breux autres acteurs. Dans son intervention, le chef du gouver- nement a souligné que le PLF 2026 s’inscrit dans la continuité de la stratégie conduite par l’Exécutif ces dernières années. Il articule ses priorités autour de plusieurs axes majeurs : la consolidation de l’Etat social, la relance de l’investissement et de l’emploi, la poursuite des réformes structurelles ainsi que la préservation de la stabilité des finances publiques.
répond pas aux attentes des citoyens en ce qui concerne l’emploi ou la réduction des inégalités sociales et régio- nales» . Bouanou reconnaît toutefois « l’effort budgétaire conséquent consenti pour sou- tenir les secteurs de la santé et de l’enseignement» , mais précise que «cette décision a été prise à la suite des ins- tructions royales et non à l’ini- tiative du gouvernement» . Et de préciser que «l'objectif final sera les résultats atteints et non les effets d’annonce. Notre pays doit réduire les déficits et combler les retards constatés dans ces deux secteurs, qui influent sur le classement mon- dial de l’Indice de développe- ment humain. L’urgence avec laquelle ces chantiers doivent être lancés ne doit pas omettre de veiller à la transparence et au respect de l’équité des mar- chés publics à attribuer». Toujours dans l’opposition, le
Abdallah Bouanou, membre du secrétariat du parti et président de la Commission des finances à la Chambre des représen- tants, a indiqué que «ce PLF revêt une grande importance, puisqu’il sera exécuté pendant la dernière année du mandat de l’actuel gouvernement, mar- qué par différents enjeux tant sur le plan économique que social. Il ressort de ses dif- férentes dispositions qu’il ne
De nombreuses familles démunies ne perçoivent pas la subvention de 500 DH. Le programme de soutien social est à revoir pour qu’il soit équitable, selon Nabila Mounib.
www.fnh.ma
BOURSE & FINANCES
8
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
les écarts constatés, l’évalua- tion des politiques budgétaires s’est améliorée par rapport aux pratiques qui régnaient aupara- vant. Par cette loi, le Parlement dispose désormais de plus de temps et d’outils pour examiner le projet de Loi de Finances et peut suivre l’exécution budgé- taire via des rapports de perfor- mance et des audits. Par ailleurs, la LOF en vigueur permet aux gestionnaires des deniers publics de disposer de plus d’autonomie, avec l’obli- gation de rendre compte des résultats obtenus. L’introduction du contrôle interne et la reddi- tion des comptes devient donc le grand pilier de la réforme bud- gétaire au Maroc. Toutefois, dix ans après sa mise en œuvre, la LOF a présenté plusieurs limites. Quid du retard de l’application de la reforme ? L’absence de mécanismes clairs de reddition des comptes et la faiblesse du suivi des indica- teurs de performance ont réduit la portée de cette réforme pour- tant saluée à son lancement. «Certes, la loi en vigueur consti- tue une grande avancée pour la gestion publique au Maroc. Techniquement, elle est plus exigeante, mais les indicateurs de performance manquent par- fois de pertinence ou ne sont pas bien suivis, ce qui rend plus difficile pour le gouver- nement, les parlementaires et les citoyens l’appropriation de cette loi» , précise El Fakir. Avec l’optique de l’obligation de résultats, la culture de l’éva- luation des politiques publiques est donc à l’ordre du jour. Des perspectives d’amélioration des indicateurs de performance et des mécanismes de suivi clair bien définis sont de mise. Pour le professeur El Fakir, le retard dans la réforme de la LOF s’explique par plusieurs fac- teurs. D’abord, c’est une ques- tion législative qui nécessite un long dialogue institutionnel et une bonne concertation entre les pouvoirs législatif et exé- cutif. « Pour tout pays, l’adop- tion d’un texte qui va cadrer le
Il faut que le budget devienne un instrument de résultats, non plus seulement un cadre de dépenses.
Loi organique des finances Vers une obligation de résultats pour un budget plus efficace
Au-delà des investissements sectoriels prévus dans le projet de Loi de Finances 2026, le gouvernement veut faire évoluer les règles du jeu budgétaire. La réforme de la Loi organique des finances (LOF) vise à introduire davantage de transparence, améliorer la soutenabilité de la dépense et renforcer le rôle du Parlement.
A
Par Désy M.
la veille de l’examen du projet de Loi de Finances (PLF) 2026, doté d’un budget global estimé à plus de 761,3 milliards de dirhams, avec un investissement public estimé à 380 milliards de dirhams, le Maroc s’apprête à franchir un cap majeur dans la gestion de ses finances publiques. En introduisant la notion d’obligation de résultats, le gouvernement ambitionne de renforcer l’efficacité de l’action publique et la transparence de l’exécution budgétaire. C’est un chantier qui s’ins- crit dans une logique de per- formance publique où chaque Dirham investi doit désormais être évalué en fonction de la
valeur ajoutée qu’il crée pour la collectivité. Et pour ce faire, il faut que le budget devienne un instrument de résultats, non plus seulement un cadre de dépenses. Cette évolution inter- vient dans le prolongement de la réforme de la Loi organique des finances (LOF) n°130-13, entrée en vigueur en 2015, qui avait déjà marqué une rupture avec la logique traditionnelle de moyens. Pour Rachid El Fakir, professeur d’économie monétaire, «le pas- sage d’une logique de moyens à une logique de résultats était l’un des points ambitieux ayant coupé avec l’ancienne législa- tion qui s’est focalisée sur les
crédits budgétaires, sans réelle évaluation des résultats ». Et d’ajouter qu’ «avec l’introduction de la notion de performance avec des objectifs, des indica- teurs et des rapports annuels de performance, la LOF espérait atteindre une meilleure évalua- tion de l’efficacité des politiques publiques, avec plus de transpa- rence et discipline budgétaire» , souligne-t-il. En effet, avec des documents budgétaires plus lisibles et plus accessibles, l’introduction du budget citoyen pour vulgariser les données financières à desti- nation du grand public, l’obliga- tion de publier des rapports sur l’exécution budgétaire ainsi que
www.fnh.ma
BOURSE & FINANCES
9
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
cice budgétaire de ladite année. Celle-ci prévoit des indicateurs stra- tégiques au niveau départemental, ministériel et institutionnel, destinés à apprécier l’efficacité des politiques publiques à moyen et long terme et d’en mesurer les effets sur l’amé- lioration du bien-être de la société sectoriellement et territorialement. Une avancée saluée par les experts, qui y voient un outil de pilotage iné- dit pour améliorer la redevabilité et la bonne gouvernance. ◆
futur des finances publiques est une question stratégique. Les rapports de force au sein du Parlement, entre opposition et majorité d’une part, et entre le Parlement et le gou- vernement d’autre part, affectent l’action législative et gouvernent toute volonté et bonne humeur de réforme» , explique-t-il. A côté de la volonté politique, El Fakir pointe aussi la complexité juridique et institutionnelle. En effet, la mise en place de l’obligation des résultats suppose des précisions légales et des mécanismes opérationnels en termes de sanctions, d’incitations et de liens formels entre résultats et crédits. Ces précisions demandent des amendements ou des décrets d’application. Cependant, les pro- blèmes de capacités de pilotage et de l’insuffisance des données et des systèmes d’informations fiables et performants, biaisent encore toute opérationnalisation de ladite obligation. Bref, les capacités, les ressources humaines et techniques conditionnent tout passage de l’obli- gation de moyens à celle de résul- tats. PLF 2026 : Un nouvel élan ? L’introduction de l’obligation de résultats dans le PLF 2026 présage quelques retombées positives sur l’action politique. El Fakir estime que cette approche constitue une réponse aux critiques récurrentes sur l’inefficience de l’investissement public, estimée à 66% selon Bank Al-Maghrib, contre une moyenne de 75% dans les pays à revenu inter- médiaire supérieur. Pour le HCP, les retombées du grand effort public d’investissement en matière de croissance économique, de créa- tion d’emplois et de productivité demeurent mitigées. Face à ces constats, une budgé- tisation axée sur la performance pourrait être la solution. Toutefois, «avec la clause de l’obligation de résultats sur l’exécution des inves- tissements, on ne pourrait s’attendre à une transformation du PLF 2026 en instrument d’efficacité et de gou- vernance que si elle combine un cadre légal clair, des capacités opé- rationnelles effectives, des contrôles externes renforcés et une transpa- rence plus active axée sur de fiables systèmes d’information», affirme
La réforme de la LOF est un chantier qui s’inscrit dans une logique de performance publique où chaque Dirham investi doit désormais être évalué en fonction de la valeur ajoutée qu’il crée pour la collectivité.
Rachid El Fakir. Dans ce cadre, l’amélioration conti- nue des documents de performance est un chantier ouvert par le minis-
tère de l’Économie et des Finances. Le PLF 2026 introduit une nouvelle maquette d’appui à l’élaboration des projets de performance pour l’exer-
u Maroc, la période a été marquée par l’attribu- tion des licences 5G et la préparation du lance- ment imminent du service, une étape décisive pour l’innovation et la création de nouveaux relais de croissance. Le partenariat stratégique avec Inwi se concrétise à travers la mise en œuvre des joint-ventures FTTH et 5G, qui ren- forcent la modernisation des infrastructures et l’accès au très haut débit. À l’international, les filiales Moov Africa main- tiennent une dynamique robuste, soutenues par la progression du très haut débit fixe et mobile, l’essor du Mobile Money et l’amé- lioration continue de l’expérience client. Ces performances traduisent la pertinence de la stratégie d’investissement ciblée du Groupe. L’opérateur confirme sa solidité au 3 ème trimestre 2025 Maroc Telecom poursuit sa trajectoire de performance au troisième trimestre 2025. Porté par le déploiement de la 5G, la montée en puissance du très haut débit et la dynamique de ses filiales africaines, le Groupe confirme la pertinence de son modèle intégré. Maroc Telecom A Le parc global dépasse désormais 81 millions de clients, en hausse de 1,8% sur un an. Le chiffre d’affaires consolidé atteint 27,3 milliards de dirhams (+1,2%), tiré par la performance des filiales (+6,5% au T3) et du très haut débit fixe au Maroc, compensant la baisse des acti- vités mobiles domestiques. L’EBITDA s’établit à 13,7 milliards de dirhams (-2,2%), avec une marge solide de 50,2%. L’EBITA ajusté ressort à 8,8 milliards de dirhams (+0,3%), tandis que le résultat net ajusté part du Groupe s’élève à 4,4 milliards de dirhams (-0,6%). Les investissements, hors fréquences et licences, progressent de 23,1% et repré- sentent 23% du chiffre d’affaires, conformé- ment à la stratégie d’accélération du déploie- ment 5G. Les flux nets de trésorerie opération- nels atteignent 6,6 milliards de dirhams, et la dette nette reste maîtrisée à 0,9 fois l’EBITDA. Cette performance confirme la résilience du modèle intégré de Maroc Telecom et son rôle clé dans l’accompagnement de la transition numérique au Maroc et sur l’ensemble de ses marchés africains. ◆
www.fnh.ma
BOURSE & FINANCES
10
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
analysés en sous-seconde, qui signale par exemple à l’émetteur lorsqu’un site subit une attaque. Il faut dire que le passage à l’ac- ceptation n’est pas sans effets tangibles : environ 70% des mar- chands déclarent une hausse du chiffre d’affaires, 64% constatent plus de trafic, et 91% sont satis- faits du process carte. Pour des zones touristiques comme les médinas, l’acceptation capte des ventes fugitives (touristes sans cash, impossibilité de retirer, etc.). «Ces chiffres montrent que l’ac- ceptation n’est pas un coût ban- caire, mais plutôt un investisse- ment de productivité» , a commen- té Romdhane, qui rappelle que «chaque terminal actif est un com- merce qui s’ouvre à de nouveaux clients». Autrement dit, accepter les paiements digitaux, ce n’est pas supporter un coût bancaire, c’est investir dans la performance : plus de confiance, moins de frictions à la caisse et une gestion comptable plus fluide. L’impact macroéconomique et les leviers d’adoption Au-delà des comptes d’exploita- tion, la bascule vers le numérique est macro dynamique, notamment sur la croissance, l’inclusion et la formalisation. La Banque mon- diale estime qu’une généralisation des paiements digitaux pourrait accroître le PIB de 3 à 5% sur 5 à 10 ans, hausser la productivité des services de 10 à 15% et, si leur usage progresse de 5% par an durant cinq ans, réduire de 11 à 13% le poids du secteur informel qui pèse encore entre 28 et 33% du PIB, selon le HCP. En parallèle, l’étude synthétise quatre leviers d’adoption : coût, formation & sen- sibilisation, transformation tech- nologique et sécurité. Concernant le coût, les commerçants réa- gissent au « prix facial» (1–3% selon domestique/international), mais l’enjeu est d’aligner la tarification sur la valeur, c’est-à-dire sur les gains réels en ventes, en trésorerie et en efficacité. Romdhane sou- ligne à ce propos qu’il est essentiel d’élargir la concurrence acquéreur pour diluer les coûts fixes et stimu- ler l’innovation. De leur côté, la formation et la
Au Maroc, le paiement digital promet croissance et inclusion, mais l’acceptation reste la faille du modèle.
Paiement digital L’acceptation, dernier maillon du puzzle L Malgré la progression du paiement digital, le Maroc reste freiné par un maillage d’acceptation encore limité. Dans sa dernière étude, Visa International Maroc en mesure l’impact et trace les voies d’une croissance rapide et inclusive. Par Y. Seddik
e Maroc compte des millions de cartes actives… mais encore trop peu de lieux où les utiliser. Pour Visa, c’est là que se joue désormais la bataille du digital : dans l’acceptation. L’entreprise en apporte aujourd’hui la preuve chiffrée. À Casablanca, lors d’une table-ronde médias tenue le 23 octobre 2025, le Directeur général de Visa International au Maroc, Sami Romdhane, a détaillé les enseignements de l’étude «Value of Acceptance» et esquissé les leviers pour sortir d’un modèle encore dominé par le cash. «Payment is an acceptance busi- ness». La formule, répétée par Sami Romdhane, sert en effet de fil rouge : l’émission de cartes pro- gresse, mais sans points d’accep- tation (TPE, e-commerce, in-app) la digitalisation plafonne. Menée auprès de 260 entreprises (nano, micro et small business) à Casablanca, Rabat et Marrakech, l’étude (Value of Acceptance
Study) conclut que le tissu mar- chand marocain a basculé psy- chologiquement dans le digital : 60% utilisent déjà des solutions de paiement numérique depuis plus de trois ans; deux tiers déclarent préférer le digital au cash, notam- ment pour la trésorerie; 67% jugent que ces paiements soutiennent leur croissance. Pourtant, le contraste est net côté terrain, puisque 42% des entre- prises restent «cash-only» , même si 55% disent vouloir s’équiper d’un TPE sous deux ans. L’étude estime à 1,2 million le potentiel d’entreprises et de commerces «adressables» pour l’acceptation, et rappelle que le cash représente encore 63% de l’ensemble des transactions dans le pays. Ainsi, le «gap d’acceptation» appa- raît aujourd’hui comme le princi- pal frein micro-économique à la diffusion des usages, et donc au rendement macro-économique de la digitalisation.
Un coût perçu élevé, un risque… surtout côté cash Côté perceptions, 71% des répon- dants jugent la gestion du cash ris- quée (vols, litiges), tandis que 56% estiment que la crainte de la fraude de la carte diminue avec l’usage et les protections (tokenisation, IA d’analyse des transactions). Les freins cités à l’acceptation sont les frais (42%), le confort du cash (38%) et les coûts d’installation/ entretien (25%). À ce sujet, Romdhane a souligné que « le digital apporte une meil- leure traçabilité et une sécurité renforcée », tout en insistant sur la nécessité de «continuer à rassurer et à simplifier l’accès aux outils pour les commerçants» . Sur le plan opérationnel, il a éga- lement rappelé le modèle à quatre parties (porteur, commerçant, acquéreur, émetteur) et le rôle de VisaNet dans l’acheminement et le scorage en temps réel des tran- sactions, avec jusqu’à 500 signaux
www.fnh.ma
BOURSE & FINANCES
11
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
sensibilisation sont tout aussi décisives. Les caravanes d’information menées avec les fédérations et les ministères montrent que l’explication du TPE, des règles et des bénéfices déclenche l’équipement. À mesure que les com- merçants comprennent la simplicité d’usage, l’adoption progresse. La transformation technologique, elle, accélère la démocratisation. Tap-to- Phone (TPE logiciel sur smartphone NFC) désintermédie le terminal phy- sique et abaisse la barrière d’entrée pour les plus petits volumes; côté e-commerce, la tokenisation et la Risk- Based Authentication (RBA) visent une expérience «transparent payment», autrement dit moins d’OTP sans sacri- fier le risque. Enfin, la sécurité reste le socle de la confiance. L’empilement IA, tokenisa- tion et authentification adaptative fait baisser le taux d’attaque visible côté commerçant et rassure sur la réception des fonds. Ceci étant, le momentum touristique, l’évolution locale de l’éco- système (arrivée de nouveaux acqué- reurs, montée des wallets, partena- riats fintech) et l’accueil d’événements majeurs créent une fenêtre d’adoption: «This is the right moment !» , résume la présentation. «Partnership is key», ajoute le DG de Visa International au Maroc, insistant sur le fait que l’enjeu n’est pas d’imposer un modèle, mais d’orchestrer banques, acquéreurs, fin- tech, opérateurs télécoms et pouvoirs publics pour densifier l’acceptation là où la valeur marginale est maximale (tourisme, mobilité, restauration rapide, artisanat export, services à domicile).
maintenant le problème à résoudre. La bascule ne se fera pas par l’émis- sion, mais par l’acceptation au der- nier mètre; cette «infrastructure de confiance» qui transforme des cartes dormantes en transactions produc- tives. «L’acceptation n’est pas une fin en soi, c’est un levier de croissance et de compétitivité pour le pays», a conclu Sami Romdhane. Le reste est une affaire de régulation pro-concurrence, de design d’incitations… et d’exécution partenariale. ◆
La Banque mondiale estime qu’une digitalisation des paiements peut augmenter le PIB de 3 à 5% sur 5 à 10 ans.
les marchés, les souks ou les coopéra- tives rurales. Enfin, il est indispensable de mesurer l’impact concret, en termes de productivité, de formalisation et de TVA, pour réallouer les incitations vers
les segments les plus rentables socia- lement. Au final, le Maroc est bien prêt. La demande d’acceptation est là, la tech- nologie est mûre, le coût perçu est
Ce que cela implique pour la politique économique
Ce constat appelle plusieurs implica- tions pour la politique économique. D’abord, il convient d’accélérer l’ac- ceptation là où l’élasticité est la plus forte, notamment dans les zones tou- ristiques et le commerce de proximité à fort passage, en combinant subven- tions ciblées (TPE/Tap-to-Phone) et incitations fiscales temporaires. Ensuite, l’ouverture de l’acquisition et la normalisation des outils comme la tokenisation ou la RBA doivent per- mettre de converger vers une expé- rience «un-clic», simple et homogène. En parallèle, la pédagogie doit être industrialisée à grande échelle, via des programmes filières et des actions menées avec les collectivités locales,
POUR NE RIEN RATER DE LA BOURSE @bourse_news @boursenews www.boursenews.ma Bourse news
www.fnh.ma
ECONOMIE
12
FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 30 OCTOBRE 2025
Intelligence artificielle
Amal El Fellah Seghrouchni lève le voile sur la loi «Digital X.0»
Invitée des «Nuits de la Finance», la ministre déléguée chargée de la Transition numérique et de la Réforme de l’administration a détaillé les chantiers structurants qui doivent ancrer l’IA dans les usages au Maroc, avec une nouvelle
loi-cadre («Digital X.0 ») centrée sur la gouvernance de la donnée, l’identité numérique et l’interopérabilité. Par A. Hlimi E
n ouverture, Amal El Fellah Seghrouchni situe l’IA là où elle compte : «nous devons être capables de rendre les systèmes proactifs, capables de surprendre uti- lement le client en allant au-delà de la simple extrapolation du passé» . Le mes- sage s’adresse directement aux banques, assureurs, sociétés de crédit et marchés: la course mondiale vers une «finance intelligente» est engagée et impose d’ali- gner simultanément technologie, régula- tion, infrastructures et compétences. Pivot du dispositif, la future loi «Digital X.0», concoctée par la ministre en poste depuis un an, se trouve au Secrétariat
général du gouvernement (SGG) avant son prochain examen parlementaire. Elle énonce les principes de gouvernance des données et cadre l’usage des algorithmes, en articulation avec la loi 09-08 sur les données personnelles. Deux innovations se détachent : • Identité numérique «à identifiants sectoriels» : au lieu d’exposer tout le «sac de données» d’un citoyen à chaque interaction, l’accès est borné à ce qui est strictement nécessaire par secteur (banque, santé, assurance…). Le banquier n’a pas, par principe, à connaître l’histo- rique médical, de même que la CNSS n’a
pas, par défaut, à connaître la totalité des revenus du citoyen. Cette granularité, dit la ministre, vise une protection effective par conception. • Interopérabilité sous consente- ment traçable : fini le «au revoir, utilisa- teur» après un consentement initial flou. L’architecture met en place des «demi- connexions» techniques : seules les don- nées expressément autorisées circulent entre administrations et, demain, avec des acteurs privés dans des cadres précis. C’est un changement profond de para- digme, autant juridique que technique. À ces deux blocs s’ajoute la cybersécu- rité, omniprésente. Tout doit être sécurisé. L’ambition n’est pas de «durcir» pour dur- cir, insiste la ministre, mais d’aligner des règles «accueillantes» aux usages tout en protégeant les citoyens, l’identité numé- rique et la confiance. L’interopérabilité publique (entre admi- nistrations) est le périmètre de la loi. Le privé (banques-assurances-fintech) doit, lui, s’auto-organiser sur des standards compatibles, avec à la clé des briques communes mises à disposition (signature électronique, identités sectorielles, ser- vices socles). Tout le monde reste astreint à la protection des données.
Sur le terrain, l’IA financière couvre aujourd’hui toute la chaîne. Elle va de la décision en temps réel - où la donnée alimente le conseil et des réponses instantanées - à la gestion du risque et de la conformité, avec le scoring de crédit, l’analyse de risque et la détection de fraude en vue 360° grâce à l’orchestration de multiples acteurs et sources. Côté relation client, elle fait passer les chatbots scriptés à de véritables agents intelligents (voix, interactions complexes) et à des modèles proactifs capables de proposer des solutions inédites mais pertinentes : l’exemple du «majordome digital», qui étend le service au-delà du produit bancaire (logement, crèche, etc.), préfigure ainsi la banque empathique. La ministre situe cette évolution sur une courbe de maturité qui mène du reporting descriptif à la prédiction, puis à la recom- mandation, avant la prescription. Du scoring à la détection de fraude, jusqu’aux «agents» proactifs Cas d’usage
www.fnh.ma
Page 1 Page 2 Page 3 Page 4 Page 5 Page 6 Page 7 Page 8 Page 9 Page 10 Page 11 Page 12 Page 13 Page 14 Page 15 Page 16 Page 17 Page 18 Page 19 Page 20 Page 21 Page 22 Page 23 Page 24 Page 25 Page 26 Page 27 Page 28 Page 29 Page 30 Page 31 Page 32 Page 33 Page 34 Page 35 Page 36Made with FlippingBook flipbook maker