37
FINANCES NEWS HEBDO / JEUDI 7 NOVEMBRE 2024
DEVELOPPEMENT DURABLE
ont été initiés dans le monde, le but étant l’amélioration de la productivité des électrolyseurs avec une électri- cité intermittente. Dans le cadre des relations Maroc- Pays-Bas, j’ai moi-même réalisé la conception d’un village R&D dans le sud du Maroc, et qui va s’occuper d’un grand nombre de questions relatives à la production de l’hydro- gène dans les conditions réelles. Ce centre est doté de plus de 50 projets de démonstration, et va impliquer un grand nombre de pays européens, dont la France bien évidemment. Il est prévu d’industrialiser certains équipements renouvelables, via un cluster qui va permettre de passer à la production de masse. C’est un espace Maroc-Europe qui va per- mettre à nos chercheurs de passer de la conception à la valorisation industrielle. L’importance de votre question réside donc dans les pos- sibilités de baisse des coûts des équipements de production de l’hy- drogène. L’intégration industrielle, qui est une composante fondamentale de l’offre hydrogène du Maroc, peut permettre une seconde baisse des coûts de production de l’hydrogène vert, après celle de la baisse des coûts électriques citée précédem- ment. Certaines projections très cré- dibles parlent d’un coût de produc- tion de l’hydrogène vert de 1 euro/ Kg, avec un coût de l’électrolyseur à 300 euros/kW en 2050. Ce qui est certain, c’est que le modele écono- mique de production de l’hydrogène n’est toujours pas au point; on parle de segment de coût. En conclusion à cette question, l’intégration industrielle constitue le deuxième levier de compétitivité du Maroc en matière de production de l’hydrogène vert. F.N.H. : Quel serait l’impact pour les investisseurs fran- çais et le secteur des énergies renouvelables marocain si les certificats carbone du Maroc étaient reconnus en Europe, dans le cadre du dévelop- pement du marché carbone local ? S. G. : Il y a quelques mois, j’avais réalisé une publication qui invitait les
Français à investir dans le domaine de la décarbonation au Maroc. La raison est très simple. En France, chaque kWh électrique émet 50 gr de CO2. Au Maroc, et en raison de la dominance du charbon et autres produits pétroliers (79% du mix élec- trique 2023), chaque kWh émet envi- ron 750 gr de CO2, ce qui veut dire qu’un même montant d’investisse- ment réalisé au Maroc et en France rapportera 15 fois plus de certificats carbone au Maroc. Si les certificats marocains sont reconnus en Europe, et nous devons impérativement batailler pour cette reconnaissance, nous pouvons avoir de grands inves- tissements renouvelables français au Maroc. Par exemple dans l’éolien, avec un surplus de production élec- trique pouvant aller jusqu’à 40% en raison des excellents facteurs de charge éolien du Maroc, et bien évidemment un plus grand nombre de certificats carbone pouvant être échangés au Maroc et en Europe. C’est un très grand domaine de coopération Maroc-France; c’est du win-win dans la mesure où le Maroc prépare sa sortie du charbon, et que ces investissements vont nous per- mettre de baisser notre empreinte carbone par kWh électrique produit. Il faut également regarder cette coo- pération sous l’angle de la decar-
bonation industrielle, question très urgente, et aucune solution n’est avancée. Il faut également noter que sans un nouveau cadre réglemen- taire relatif aux énergies renouve- lables, la coopération avec la France dans le domaine de la decarbona- tion va connaitre de sérieuses diffi- cultés à se concrétiser. F.N.H. : En matière de for- mation dans le domaine de l’efficacité énergétique, com- ment voyez-vous cette col- laboration avec la France eu égard au grand potentiel de réduction de la facture éner- gétique ? S. G. : Cela dépend de l’angle d’attaque de cette question. La for- mation dans ce domaine ne peut comporter des notions de phy- sique théorique. Ce qui est recher- ché dans ce domaine, ce sont des profils très compétents dans l’instrumentation et la mesure des grandeurs énergétiques. Imaginez chacune de nos usines, un grand bâtiment, disposant d’un Energy
manager, qui sait manipuler des compteurs intelligents et l’énergie 4.0 de manière générale, qui va éliminer des pertes énergétiques pouvant atteindre 71% (enregistré dans un batiment à Casablanca). Il manipule la sobriété énergétique, s’assure des rendements des pro- jets d’efficacité énergétique et gère l’énergie renouvelable de son entre- prise. C’est le profil recherché dans ce domaine, et ce sont des milliers d’emplois. Leurs salaires sont une partie des économies qu’ils vont réaliser. Un deal : emploi contre performances énergétiques. Le monde a évolué, et on ne peut plus réaliser des audits énergétiques à l’infini. Ce qui est attendu à travers la coopération avec la France, c’est la baisse effective et mesurable des consommations, pour être compta- bilisées selon les règles de l’art, de la même manière que les renouve- lables. L’apport de la France dans ce domaine sera précieux, dans la mesure où il serait possible de monter des formations conjointes dans le domaine de la gestion digi- talisée de l’énergie, la création de sociétés de services énergétiques qui réalisent une veille à distance sur les performances énergétiques de leurs clients. Nos attentes dans ce domaine sont très grandes. ◆
Les levées de fonds pour les startups sont vitales, puisque la construction de systèmes informatiques avancés est très gourmande en capital.
Le Maroc peut capter plus de 9% du besoin en hydrogène mondial, évalué à 600 millions de tonnes H2 en 2050.
www.fnh.ma
Made with FlippingBook flipbook maker