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ECONOMIE
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JEUDI 22 JUIN 2023
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A l’inverse, le marché pharmaceutique a connu le désengagement de filiales des multinationales de la fabrication locale. Celles qui ont poursuivi leur activité de fabrication se comptent aujourd’hui sur le doigt d’une main. F.N.H. : Récemment, le ministre de la Santé a plaidé au Parlement en faveur d’une politique globale des médicaments génériques, et notamment le droit de substitu- tion. Quel est l’apport d’une telle démarche et que va-t-elle changer dans le quotidien des patients marocains ? A. B. : Le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Khalid Aït Taleb, avait clairement exprimé sa volonté de ne pas laisser le développement des médicaments génériques être balloté par les seules forces promotionnelles et marketing du marché. Les prix élevés des médicaments princeps leur permettent de réaliser des chiffres d’affaires plus impor- tants que ceux des médicaments géné- riques et de dégager des budgets promo- tionnels et marketing plus puissants que ceux de leurs concurrents. Cette force de frappe marketing et promotionnelle reste aujourd’hui l’arme fatale de domination du marché par les princeps, y compris ceux qui ont 30 et 40 ans d’âge ou plus, et que certains continuent de qualifier de médica- ments innovants. D’aucuns diront que nos génériques représentent aujourd’hui 45% du volume du marché, c’est-à-dire mieux que la France (38% en 2020). Mais c’est oublier de dire que les 45% du marché marocain ne représentaient que 154,7 mil- lions de boites en 2020, alors qu’ils étaient de 940 millions de boites en France. Quant au chiffre d’affaires des médicaments génériques au Maroc en 2020, il n’était que de 9.732,6 millions de dirhams, alors qu’il représentait pour la même année en France 7,1 milliards d’euros, soit l’équiva- lent de 79,5 milliards de dirhams. Le potentiel générique du Maroc est plus proche de 70%, soit plus que de son taux actuel de 45%. Par ailleurs, et malgré son rôle de véritable levier du marché pharma- ceutique des ventes en pharmacie, la part des génériques en volume ne progresse que d’un point par an en moyenne. De ce fait, notre pays a pris un gros retard en termes de développement des médica- ments génériques, malgré notre puissant tissu industriel pharmaceutique et qui est pour l’essentiel dédié aux médicaments génériques. ◆
La première tranche de prix des médicaments (inférieurs à 300 dirhams) représente 98,9% en volume de l’ensemble des médi- caments achetés en pharmacie.
en règle générale déjà très bas. Leur dérem- boursement ne pourrait pas générer de grandes économies en comparaison avec celles générées par un plus grand usage des médicaments génériques et biosimilaires, et dont le potentiel en termes d’économies est énorme et pas encore suffisamment exploité. F.N.H. : Dans les pays occidentaux, le financement des nouveaux médi- caments coûteux passe par l'en- couragement de l'utilisation des médicaments génériques et biosi- milaires, ce qui n’est pas le cas pour le Maroc. Qu’en dites-vous ? A. B. : Oui, en effet, le discours de l’as- sociation de ces multinationales pharma- ceutiques au Maroc est séduisant et bien construit dans sa forme. Mais sur le fond, il ne tient pas la route, car le financement des médicaments les plus couteux passe d’abord par le basculement du marché vers plus de génériques et de biosimilaires pour dégager de substantielles économies afin de financer l’innovation thérapeutique. Tout en rappelant que le terme «innovation» est galvaudé depuis des décennies pour dési- gner des nouveautés, même quand celles-ci n’apportent aucune valeur ajoutée théra- peutique réelle par rapport aux médica- ments existants, les véritables innovations thérapeutiques qui changent vraiment la santé et la vie des patients ne constituent qu’une petite partie des nouveautés. D’un autre côté, l’innovation thérapeutique n’est intéressante que quand elle est accessible, ou du moins supportable pour les assu-
rances maladies des pays, y compris et surtout les moins développés. Au niveau mondial, il y a aujourd’hui une tendance inquiétante. De nouveaux médica- ments arrivent sur les marchés occidentaux à des prix atteignant plusieurs millions de dirhams, voire près d’un milliard la boite. Ces nouveaux médicaments de luxe sont déjà difficilement supportables pour des systèmes de santé aussi robustes que ceux de ces pays occidentaux. Comment pour- raient-ils trouver une place dans des sys- tèmes de santé comme le nôtre ? F.N.H. : Ne faut-il pas investir dans les médicaments génériques ou encore biosimilaires pour réaliser de substantielles économies et financer les médicaments innovants qui sont en partie très onéreux ? A. B. : Tout d’abord, il faut rappeler que les médicaments génériques sont, en règle générale, fabriqués localement au Maroc, presque tous. Il faut aussi rappeler qu’avant les années 80 et même après, les multi- nationales pharmaceutiques constituaient l’essentiel du tissu industriel. Elles avaient joué un rôle important en termes de transfert technologique, et seuls quelques labora- toires nationaux existaient alors. A partir des années 90, les choses avaient commencé à changer. De petites unités industrielles à capitaux nationaux avaient commencé à s’installer et à grandir, essentiellement dans la fabrication des médicaments génériques. Ces unités ont progressivement grandi jusqu’à devenir pour certaines des leaders du marché en termes de fabrication locale.
Le dérembourse- ment des médica- ments de conseil ne pourrait pas générer de grandes écono- mies en compa- raison avec celles générées par un plus grand usage des médicaments génériques et bio- similaires.
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