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CULTURE
FINANCES NEWS HEBDO
JEUDI 14 JUILLET 2022
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sionnante quand elle présenta un des titres de son album « Myriad Road » - même lorsqu’elle interpréta son dernier EP« Strange Days ». Le son frais, spon- tané, énorme, développé par cette Belge (d'origine égypto-anglaise) s’insinuait dans les sens des spectateurs, au point qu’ils en devinrent réceptifs, puis captifs. Et c'est sous des acclamations nour- ries, après avoir entonné une longue et sublime reprise du célèbre « It’s a man’s man’s man’s world » de James Brown, que Natacha Atlas prit congé de la foule. Lui succédant, l’immense et très engagé Brésilien, Gilberto Gil, avait à prouver qu’il n’est pas un has been , comme les mau- vaises langues se plaisent à le qualifier. De fait, ce maestro brésilien et record- man n’a rien perdu de son charisme légendaire, en dépit de l’âge (80 ans). Ce grand-père a tenu le public par le bout du cœur par un peps inattendu à l’écoute de ses plus belles et illustres chansons. Infatigable, bondissant, souriant et déci- dé, quoi qu’il arrive, il a emporté l'adhé- sion. Dès les premières mesures, c’était gagné. Et on est ressorti de ce concert situé au croisement du cool jazz et de la samba fortement ébloui, grisé à souhait, un tantinet chaviré. Asaf Avidan, caresses et chaos Un couple d’heures avant son show, l’iconoclaste touche-à-tout (il utilise indif- féremment le piano, la guitare…) Asaf Avidan, format crevette surmonté d’une crête de jeune coq, promenait un sou- rire qui ne trompait personne. C'était seulement de circonstance. En son for intérieur, notre écorché vif inconsolable, l’errant rimbaldien sans amarres ni bous- sole n’en menait pas large… Son art s’en ressent. Le public y est sensible et le fait savoir. Ce public nullement sectaire mais plutôt boulimique de musiques, ne se fait pas faute de l’acclamer à son entrée. Quand il paraît, un vent de folie emporte Casa Anfa. Asaf n’en revient pas d’être si chaudement accueilli. Aussi met-il du cœur à l’ouvrage. Avec « 900 Days », il a fait sensation. D’autant qu’on y découvre un poète sensible aux souf- frances et aux drames de la vie; encore habitant de son passé, dont il arpente les territoires à la fois heureux et endolo- ris. « Ma rupture sentimentale m'a laissé un sentiment de trahison. Non par mon partenaire, mais par l'amour lui-même, ou plus précisément par moi-même (...) J'avais besoin d'écrire cette chanson, de résumer le temps passé dans cette
relation pour pouvoir avancer », précise Asaf. Quand il chante « Rock of Lazarus », l'émotion prend à la gorge. Les 10 chan- sons de son dernier sombre et dense album, « Anagnorisis », sous forme de chroniques des maux, sanglots étouffés, mots d’esprit et cris de révolte élégam- ment poussés impressionnèrent la foule innombrable, suspendue au charme de sa présence scénique et de son timbre androgyne si particulier. Clin d'œil à la sensualité glaciale de Portishead, à la nostalgie de Janis Joplin ou au chagrin de Nina Simone et la dépression d’Amy Winehouse; sauf que là, la malheureuse est un homme. Un homme avec une voix perchée-écorchée de femme au plus mal, aux complaintes crève-cœur. Après avoir chanté son dernier titre, le groupe fit mine de regagner sa loge, le public le retint, réclame sur l’air des lampions le tube « Reckoning Song » dont le remix à succès de 2012 a été certifié Platine en France, mais aussi en Allemagne, Autriche, Belgique, Italie, Suède et Suisse… Bref, il s'exécute en invitant son public à jumper pour ainsi « défier les forces de la gravité ». Des «bis, bis !» retentirent. Il s’inclina. Le bonheur enfantin d’Asaf Avidan res- tera un des plus beaux moments du festival. Au terme du show, son visage prit réellement des couleurs radieuses. Alors heureux ? « Je suis bien sûr content d’observer que les Marocains, dans leur ensemble, apprécient ma musique », répondit-il. Propos euphémiques qui n’arrivent pas à refléter l’étendue du talent dont il a fait preuve sur scène. Un show de derrière les fagots, s’accordent à dire les personnes que nous avons interrogées : « Beau, sensible, mélanco- lique ! »; «u n excellent cru! »; « il a soulevé et fait danser la foule…quel talent ! Quelle voix ! Asaf m'a rendue heureuse ce soi r»; « magnifique à tous points de vue »… A contrario, un seul reproche : il a été plus que parfait. « Tous les sentiments et les histoires les mieux enfouis en moi étaient tous entrelacés dans un nuage complexe, abstrait et qui ne cesse de grandir. Le saisir serait voué à l'échec... Pourtant, quelle que soit l'impossibilité, j'ai ressenti le besoin de représenter ce paysage. Et, ça a donné ‘Anagnorisis ’», souligne Asaf. Quel bonheur ! Civiquement jazz En somme, une prestation époustou- flante de Jazzablanca, par laquelle ce dernier manifeste sa capacité à aller de l’avant et à étonner à chaque fois.
tôt sensibles, tantôt trépidants et parfois littéralement festifs. Au soir du samedi 2 juillet, rendez-vous était pris sur la Scène 21 avec la formation rbatie Urban Folklore. Dès les premières notes de leur EP, on s’aperçut que leur faculté de combiner jazz, folk et rock prouve surtout que le plaisir peut naître en des recoins inexplorés. Entre batterie, basse, saxophone, conga et guembri, ces cinq musiciens composent une symphonie passionnante. Le public est emballé. Il n’émerge de son enchantement que pour plonger dans un autre, suscité par la sul- fureuse Natacha Atlas. Cette diva du monde arabe assez plan- tureuse prend, cette fin d’après-midi, sa majestueuse ampleur devant l’immense foule renversée par sa voix, dont elle joue somptueusement. Une boule d'éner- gie vocale stupéfiante, il faut dire. Elle avait fait preuve d’une présence impres-
Une édition qui nous a agrémentés d’une suite non inter- rompue de moments tantôt sen- sibles, tantôt trépidants et parfois littéra- lement festifs.
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