FNH N° 1170 (1)

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FINANCES NEWS HEBDO / JEUDI 24 OCTOBRE 2024

ECONOMIE

Viandes rouges

importants. Alors que pour le cheptel importé, il faut rajouter les frais de l’aliment de bétail qui est déjà à des tarifs très élevés. Au final, le prix à la consomma- tion aurait pu être plus élevé». Des professionnels du secteur n’ont pas manqué de pointer du doigt l’absence de concertation de la part des autorités. Ils esti- ment que ce genre de décisions peut donner des effets contro- versés. «Cette décision a été prise sans prendre en considération l’avis des professionnels du secteur, notamment les chevillards et les vendeurs de détail des viandes rouges. On n’a pas privilégié l’ap- proche participative pour aboutir à un schéma qui privilégie l’inté- rêt de tout le monde. Le pou- voir d’achat des citoyens s’est manifestement dégradé ces der- nières années. Il a eu un impact défavorable sur toute la chaîne de valeur, depuis les éleveurs, en passant par les chevillards jusqu’aux vendeurs de détail. Nous accusons un manque à gagner important et notre chiffre d’affaires a lui aussi drastique- ment baissé. Avec les impor- tations, il y a un risque de voir la situation se dégrader davan- tage, car l’importation et la dis- tribution de viandes surgelées ou réfrigérées ne peuvent se faire qu’à travers les grandes sur- faces» , affirme Youssef Loualja, secrétaire général de l’Associa- tion des vendeurs de détail des viandes rouges dans la région de Casablanca-Settat. Et de poursuivre : « nous ne sommes pas contre les impor- tations de ces produits, mais à condition qu’elles tirent les prix vers le bas. Par le passé, certaines opérations n’ont pas produit les effets escomptés, à l’image des importations du bœuf brésilien ou des ovins espagnols et rou- mains. Il faut noter également que la viande importée peut per- turber le secteur de l’élevage. Si les prix baissent trop, les exploi- tants ne pourront pas vendre à perte car le coût de production est déjà élevé. Ils risquent de délaisser leur activité». ◆

Impactées par la baisse du pouvoir d’achat, certaines activités du secteur risquent d’être davantage malmenées. La distribution des produits surgelés ou réfrigérés ne sera possible que dans les points dotés de chaînes de froid adéquates. Des réserves sur l’autorisation des importations

Par C. Jaidani

 Les marges des éleveurs sont déjà sous pression; les importations de viandes rouges risquent de les pénaliser davantage.

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ace à une offre de viandes rouges insuffisante ayant engendré une flambée record des prix, le gou- vernement a pris une série de mesures pour apaiser la situation. Il a ainsi décidé l’autorisation de l’importation de viandes surge- lées et réfrigérées. L’opération est supervisée par l’Office natio- nal de la sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA). La mesure fixe les pays à partir desquels il est possible d’impor- ter, dont particulièrement des pays européens. Il est stipulé que «toutes les viandes importées doivent être accompagnées d’un certificat sanitaire délivré par les autorités compétentes du pays d’origine,

ainsi que d’un certificat d’abat- tage halal délivré par l’organisme islamique habilité dudit pays. Les produits seront contrôlés aux postes d’inspection frontaliers conformément à la réglementa- tion en vigueur». Cette décision a été vivement saluée par les associations de protection des consommateurs, car, soulignent-elles, elle devrait vraisemblablement tirer les prix vers le bas. Toutefois, elles restent réticentes par rapport à certains aspects. «L’importation des viandes rouges est inévitable, autrement les prix auraient connu de nou- velles hausses. Outre le côté prix, ces produits présentent un niveau de salubrité élevé. Les pays à partir desquels il est possible d’importer les viandes rouges observent des normes très strictes en matière d’éle-

vage, d’abattage et de condition- nement. Par contre, chez nous, on relève des lacunes et dysfonc- tionnements à plusieurs niveaux. Dans de nombreux sites, notam- ment dans le monde rural et les petites villes, les abattoirs ne sont pas suffisamment équipés. Nombreux sont ceux qui ne dis- posent pas de chaîne de froid. Et les chevillards travaillent au jour le jour sans pouvoir constituer de stock», affirme Bouazza Kherrati, président de la Fédération des associations de protection des consommateurs. Concernant le choix d’importer de la viande surgelée et réfrigé- rée au lieu d’importer du bétail et assurer l’abattage localement, une source du ministère de l’Agriculture a expliqué que «le deuxième choix est plus pratique et plus facile à gérer. Il ne néces- site pas de moyens logistiques

L’importation des viandes rouges est devenue inévitable, autrement les prix auraient augmenté de nouveau.

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