FNH numéro 1007

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BOURSE & FINANCES

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 21 JANVIER 2021

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Risques financiers

◆ S’engager pour une finance verte, accompagner la transition énergétique, prendre en compte les nouveaux risques liés au réchauffement et aux aléas climatiques… : ces priorités s’ajoutent désormais à l’agenda -déjà très chargé- des régulateurs et établissements financiers marocains. ◆ Cet article est le premier d’une série consacrée à l’impact du risque climatique sur le système financier, aux initiatives prises par les régulateurs et au défi méthodologique de la mesure de ce risque émergent. Quand l’urgence climatique devient urgence financière C’ est un sujet très peu abor- dé, quand bien même il est important. s'élèvent à plus de 800 millions de dollars. sur les risques climatiques au Maroc, avec l’accompagne- ment d’experts internationaux. Objectifs : se préparer aux effets du changement climatique et gérer les risques financiers qui en découlent. Par Y. Seddik

nomie dans son ensemble en induisant un resserrement des conditions financières, augmen- tant le risque de défaillance des portefeuilles de prêts et dimi- nuant la valeur des actifs. Les seconds impactent les institu- tions financières à travers leurs expositions à des entreprises dont les modèles d’activité ne reposent pas sur les principes économiques de réduction des émissions de carbone. Le Maroc, pays très exposé Ces changements sont déjà une réalité au Maroc. Ce der- nier figure parmi les pays les plus exposés aux risques géo- logiques et climatiques dans la région MENA. Selon une étude de la Banque mondiale sur les risques liés aux catastrophes naturelles, les pertes annuelles moyennes du Maroc liées aux catastrophes naturelles

En raison de sa position géogra- phique, de la forte variabilité des précipitations et de sa topogra- phie, le Maroc est régulièrement sujet aux inondations (comme en témoignent les dernières intempéries à Casablanca), cau- sant des pertes estimées à plus de 400 millions de dollars par an. La sécheresse et les trem- blements de terre sont aussi sources de risques pour le pays.

Les changements climatiques provoqués par l’évolution des conditions météorologiques comportent des menaces consi- dérables pour le système finan- cier. Ils posent également plu- sieurs défis aux régulateurs, qui devraient quantifier ces risques et mettre en place des mesures adéquates pour y faire face. À ce jour, deux types de risques sont identifiés : les risques «phy- siques» induits par la hausse des phénomènes climatiques extrêmes et les risques «de transition» liés à la migration vers des modèles économiques à bas carbone. Pour schémati- ser, les premiers affectent l’éco-

Complexité de mesurer ces risques Les investisseurs font face à une double problématique. D’un côté, financer la transition énergétique qui nécessite des fonds colossaux (2,4 trillions de dollars par an dans les 20 pro- chaines années). Et de l’autre, intégrer ces nouveaux risques climatiques dans leur proces- sus de prise de décisions, alors que dans la pratique, l’analyse de cette nouvelle famille de risques n’est pas chose simple. D’ailleurs, Abdellatif Jouhari, wali de BAM, avait expliqué lors de la Conférence interna- tionale sur la finance verte que «les risques liés au changement climatique, qu’ils soient phy- siques ou de transition, sont complexes à appréhender et à mesurer». Pour lui, « cette complexité est accentuée en l’absence d’un langage ou d’une taxonomie commune permettant de dis- tinguer les actifs verts et bruns, d’un manque de données suffi- samment granulaires et d’outils d’évaluation de ces risques, dont la nature est certaine, mais dont l’ampleur et les impacts sur le secteur financier restent mal cernés» . A suivre… ◆

Les pertes annuelles moyennes du Maroc liées aux catastrophes naturelles s'élèvent à plus de 800 millions de dollars.

La Banque centrale à l’avant-garde

Afin d’y remédier, Bank Al- Maghrib a récemment mis en place un projet d’élaboration d’une directive règlementaire où elle liste ses attentes dans le verdissement du système financier marocain en tant que régulateur. Initié pour maintenir la stabilité financière, ce projet demandera aux banques d’in- clure les préoccupations liées au changement climatique dans leur gestion et leur stratégie. Il vise également à étendre leur cartographie des risques à ceux liés à la dimension environne- mentale. En cela, BAM exhorte les banques à communiquer sur ces menaces en intégrant progressivement les recomman- dations du TCFD (Task Force on Climate-related Financial Disclosures, un groupe de tra- vail créé en 2015 par le Financial Stability Board). BAM s’apprête parallèlement à lancer une étude nationale

Risques physiques et de transition Les risques que présentent les changements climatiques pour l’économie se transmettent essentiellement de deux façons, mais peuvent avoir de nombreux impacts.

Risques de transition (Politiques publiques, technologies, préférences des consommateurs)

Risques physiques (Phénomènes climatiques extrêmes et évolution progressive du climat)

Destruction des actifs

Migration

Reconstruction/ remplacement

Baisse de valeur des actifs irrécupérables

Hausse des prix de lʼénergie avec bouleversements

Bouleversement des activités

Économie

Diminution de la richesse des ménages

Baisse des bénéfices des entreprises, augmentation du nombre de litiges

Baisse de la valeur des biens et des actifs dʼentreprise

Répercussions négatives du resserrement des conditions financières

Impact de la baisse de croissance et de productivité sur les conditions financières

Secteur financier

Pertes de crédit (prêts résidentiels et aux entreprises)

Pertes de souscription

Risque opérationnel (notamment risque de responsabilité)

Pertes de marché (actions, obligations, produits de base)

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