Culture
Le 16 mars tombait l’annonce de la fermeture pure et simple des salles de cinéma, théâtres, salles de concerts, musées, librairies…, plongeant le pays dans un spectaculaire black-out culturel. Black-out
demander du soutien trébuchant. Le ministre de la Culture, de la Jeunesse et des Sports, Othman El Ferdaous, a débloqué 5.6 MDH pour la « liquidation des arriérés de soutien à l’édition et au livre ». Un total de plus de 721 dossiers étaient concernés, dont 176 remontent à la période 2016 et 2017. Très en deçà de ce que le secteur du livre réclame pour freiner le désastre. Pour ne pas étouffer les étals, en sommeil depuis des mois, des sorties seront supprimées ou reportées, au moins à l’automne. On risque de voir débouler dans la rentrée littéraire une majorité d’apprentis best-sellers et d’auteurs à succès lancés pour rattra- per le manque à gagner. On le voit, l’attente et l’angoisse sont énormes. Les décisions qui se font attendre ne sauraient consister seule- ment en une perfusion ponctuelle des- tinée à reconstituer les déséquilibres déjà à l’œuvre avant la catastrophe. La question de la survie du secteur est clairement posée, parce que ces structures sont chaînées les unes aux autres, ce qui fait que quand l’une d’elles trébuche ou met un genou à terre, toutes les autres suivent. Quand un festival s’arrête ou une salle de spectacle ferme, ce sont, derrière, les promoteurs, agents, pro- ducteurs, prestataires, techniciens, intermittents/travailleurs du spectacle et artistes qui se retrouvent pénalisés. Il est inenvisageable de ne pas réin- venter les politiques publiques après cette crise. La culture a un rôle à jouer à condition qu’on l’écrive dans le sens d’un grand rééquilibrage des ressources. Les prio- rités doivent être redéfinies. Voilà trop longtemps qu’on affiche la volonté de faire de la jeunesse et de la culture une priorité absolue, tout en faisant exactement le contraire. u
D epuis que les ciné- mas ont tiré le rideau, l’ensemble de la chaîne de pro- duction des films accuse des dom- mages colossaux. Quand les salles rouvriront, ce sera la foire d’empoigne. Au cœur d’un embouteillage de sorties, les grosses locomotives risquent de s’arroger la part du lion sur les écrans. Tout aussi gelé depuis mars dans l’élan qui devait les conduire vers un été toujours riche en créations et pre- mières, le spectacle vivant compte ses pertes et boit la tasse. « Le spectacle vivant est en danger absolu », s’insurge un comédien. Pour l’heure, il s’agit donc d’un coma, avec plusieurs fonctions vitales touchées. Les musées et galeries souffrent eux aussi des dix plaies d’Egypte. Le confi- nement a creusé un trou abyssal dans les revenus, ils doivent reporter des expositions en chaîne - et en annu- ler d’autres, préparées pendant des années -, voire renvoyer des œuvres chèrement convoyées à leurs prêteurs sans qu’elles aient été vues, avec zéro visibilité pour la suite. Annuler les expos prévues ? Les reporter jusqu’à créer un embouteillage ? Et comment faire s’ils ne peuvent compter sur les prêts internationaux pour encore de longs mois ?
La Joconde, une peinture de Léonard de Vin- ci, décide, elle aussi, de porter un masque pour se protéger de l’infection.
Pour sa part, toute la chaîne du livre était elle aussi à l’arrêt, depuis la fer- meture des librairies. Car le cœur du réacteur, ce sont bien elles. Des mesures de chômage partiel ont été mises en place à tous les maillons. Et le secteur n’a pas attendu pour
La question de la survie du secteur est clai- rement posée, parce que ces structures sont chaînées les unes aux autres, ce qui fait que quand l’une d’elles trébuche ou met un genou à terre, toutes les autres suivent.
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FINANCES NEWS HEBDO [ HORS-SÉRIE N°39 ]
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