Hors Série Finances News39

ABDELLATIF MAZOUZ Ancien ministre et président de l’Alliance des économistes istiqlaliens “J uste avant cette crise, certaines initiatives étaient de nature à redonner un peu plus d’espoir pour la relance d’une croissance inclusive de notre économie. Je citerai, à titre d’exemple, trois projets structurants initiés par Sa Majesté le Roi : • L’accélération du plan national de production d’énergies renouvelables et son intensification pour dépasser les 52% d’énergie propre en 2030; • Le programme national d’approvisionnement en eau potable et d’irrigation, doté de 115,4 milliards de dirhams sur la période 2020-2027; • Le programme «Intilaka» pour le financement de PME, TPE, start-up et l’inclusion financière du monde rural, doté d’une enveloppe de 6 milliards de dirhams sur 3 ans. C’est vous dire que l’opérateur économique avait com- mencé à reprendre confiance et voir de meilleures pers- pectives. Mais l’économie nationale, déjà chahutée par la sècheresse, est malheureusement très fortement perturbée par la pandémie de la covid-19 qui a mis le voile, en tout cas pendant cette période, sur ces projets structurants et qui dynamisent notre économie. Sans entrer dans les détails, les leviers qu’il faudra activer peuvent être nombreux. Cette activation doit prendre en considération, dans une vision globale, 3 phases : la reprise solidaire des activités pour les quelques mois qui viennent, la relance d’une croissance inclusive pour les années 2021 et 2022 et, parallèlement, la réinvention d’un pacte social comme base de construction de notre modèle de dévelop- pement humain durable. Les leviers sur lesquels nous devons agir, peuvent, à mon sens, être au nombre de 6 : • La Consolidation de l’élan solidaire pour atténuer les fortes vulnérabilités que nous laisserait cette crise. Une partie de la classe moyenne et les populations démunies en seraient les premières victimes. Des sacrifices seront exigés de nous tous (entreprises, administration, collecti- vités locales et citoyens) en cette période très particulière. • Le patriotisme économique basé sur l’appui à l’entreprise et à la production marocaines dans tous les secteurs où c’est possible et l’encouragement à consommer des pro- duits et des services «Made in Morocco». • La valorisation et la mobilisation de nos compétences humaines et la promotion de la recherche, notamment dans les domaines de la santé, de la technologie, de l’édu- cation et du savoir. La crise actuelle nous a révélé les capa- cités des compétences marocaines établies au Maroc et à l’étranger (Asie, Amérique et Europe) dans des domaines

très pointus. Nous devons engager une politique volon- tariste d’attraction de ces compétences vers les projets prioritaires. Leur mobilisation et déploiement doivent obéir à une rationalité plus importante que celle qu’on accorde aux ressources financières. • L’injection massive de fonds, accompagnée d’un ciblage rigoureux des affectations sociales, sectorielles et territo- riales, aussi bien pour les dépenses de consommation que pour l’investissement. S’il y a des projets à sacrifier, il faut que ce soit ceux qui se traduisent par des dépenses en devises. • L’accélération des transitions digitale, énergétique et éco- logique. Le Maroc a gagné des années dans son processus de digitalisation avec des effets immédiats sur les coûts économiques, environnementaux et sociaux (télétravail, télé-enseignement, télémédecine, dématérialisation de procédures administratives et bancaires …). Des start-up marocaines ont émergé et l’innovation et le génie marocain ont été mis plus que jamais en lumière. Il ne faut surtout pas faire marche arrière sur ces acquis; consolidons-les et faisons-en un levier systémique de notre développement. • L’anticipation des grands redéploiements régionaux des différentes chaînes de valeur de production des industries mondialisées. Le Maroc a une carte à jouer par rapport aux marchés européens et africains. Nous devons désigner la bonne offre compétitive et attrayante et être plus rapides et plus convaincants que nos concurrents». S’il y a des projets à sacrifier, il faut que ce soit ceux qui se traduisent par des dépenses en devises.

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FINANCES NEWS HEBDO [ HORS-SÉRIE N°39 ]

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