FNH N° 1120

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SANTÉ

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 7 & VENDREDI 8 SEPTEMBRE 2023

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et la justice. De ce fait, dès leur conception jusqu’à leur utilisation, les machines intelligentes doivent être conformes aux principes éthiques susmentionnés. À ce propos, les concepteurs et les pro- priétaires de ces machines partagent une responsabilité associée. D’ailleurs, il paraît logique de conférer à ces IA une «personnalité morale» via une conscience éthique algo- rithmique. Il va sans dire que la relation médecin- IA - patient doit s’articuler autour de cette notion de responsabilité. F.N.H. : La pratique médicale est- elle en phase avec l’ère des nou- velles technologies, notamment l’IA ? Pr I. H. : La pratique médicale requiert plus d’ouverture pour bénéficier de l’IA, car celle-ci offre une multitude de champs d’action. En effet, grâce aux algorithmes et au machine learning, l’IA permet d’accélé- rer la recherche et le développement de la santé au niveau des axes suivants : • La gestion et la planification : Des sys- tèmes d’IA peuvent faciliter les diverses tâches de gestion et de planification, la préparation de documents médicaux et des registres, ainsi que la réalisation d’or- donnances. Ceci permettrait aux prati- ciens de se consacrer pleinement à l’exer- cice de soignant. • Les soins de santé : Les technologies d’IA permettent aux médecins d’établir un diagnostic d’une grande précision et de personnaliser les traitements. L’IA assiste le professionnel de santé dans l’analyse et l’interprétation des données relatives à la santé du patient en tenant compte de ses antécédents ainsi que l’ensemble des informations recueillies lors des différents tests ou examens. • L’accès aux soins et à l’information : De nombreux systèmes d’IA s’adressent au patient, sous forme d’applications ou d’appareils connectés le plus souvent, et permettent ainsi le suivi des maladies chroniques comme le diabète ou l’hyper- tension artérielle. F.N.H. : Dans quelle mesure l’intel- ligence artificielle permettra-t-elle de conserver le sens de la relation soignante (patient-médecin) ? Pr I. H. : Le serment d’Hippocrate résume l’essentiel de la relation médecin-malade, telle que nous la connaissons depuis plus

L’intégration de l’IA dans la médecine procure aussi bien aux praticiens qu’aux

patients de nouveaux outils d’interaction et d’intervention.

de deux mille ans. Cette relation est fon- dée sur la confiance, l’empathie, le res- pect, le recueil de l’histoire de la maladie, l’examen clinique et le secret médical. Hippocrate disait de cette relation que « c’est la rencontre d’une confiance et d’une conscience ». D’autres aphorismes per- mettent d’approcher l’essence de cette relation ainsi que ses limites, car le contrat des soins est un contrat de moyens et non de résultats, tel « Primum non nocere- être utile, ou au moins ne pas nuire ». Cette vision traditionnelle de la relation médecin-malade, qui se retrouve dans le modèle du médecin accessible, dévoué, plus à même de ménager son patient que de l’informer précisément sur le pronos- tic de sa maladie, est critiquée par les nouvelles générations de médecins et de patients car jugée déséquilibrée, inéga- litaire, verticale et surtout fondée sur le paternalisme. Il faut dire que la relation médecin-patient ne cesse d’évoluer, et les patients plus informés notamment par Internet inter- viennent de plus en plus dans leurs par- cours de soins. L’intégration de l’IA dans la médecine procure aussi bien aux prati- ciens qu’aux patients de nouveaux outils d’interaction et d’intervention. • Pour les patients : l’accès aux informa- tions médicales sur différents canaux et notamment les sites spécialisés qui s’adressent au grand public, la gestion des maladies chroniques grâce aux applica- tions de suivi… • Pour les soignants : applications de ges- tion des dossiers, logiciels de planification

ainsi que les outils d’aide au diagnostic. L’IA en tant qu’outil permettrait au pro- fessionnel de santé de se concentrer sur sa pratique et sa relation avec son patient. Et au patient de bénéficier d’une médecine de qualité avec un meilleur contrôle du risque. Ceci étant, l’IA peut distancier le patient du médecin, alors que le but de ces technologies est d’élargir les possibilités dans la pratique médicale et non de se substituer à la relation médecin-malade. La communication entre le patient et le soignant étant une partie intégrante du parcours de soins. F.N.H. : Est-il vrai que les nou- velles technologies, notamment la dépendance des smartphones en milieu médical, soulèvent une question cruciale, celle de la place laissée au raisonnement clinique et à la prise de décisions face aux situations cliniques ? Qu’en est-il à votre avis ? Pr I. H. : Il ne s’agit nullement d’une problématique. Bien au contraire, avec l’avènement de l’IA, le smartphone avec son lot d’applications a tous les atouts pour être l’allié des médecins. Les smart- phones, dont l’utilisation est devenue courante, sont très utilisés par les méde- cins pour faciliter la communication et l’échange de l’information, accéder aux données scientifiques actualisées et des outils d’aide à la décision clinique et thé- rapeutique. Le raisonnement clinique, principal objec-

Il paraît logique de conférer à ces IA une «personna- lité morale» via une conscience éthique algo- rithmique.

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