FNH N° 1219

ECONOMIE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 18 DÉCEMBRE 2025

ZLECAF Un projet économique structurant pour le continent Le commerce africain devrait connaître une croissance annuelle de 3,5% d’ici 2033. Il y a urgence de bâtir un marché intérieur capable de résister aux chocs externes, en adossant l’ouverture commerciale à l’industrialisation, aux infrastructures et à une intégration équitable des territoires. Par D. William

De la promesse à l’impact Mais l’enthousiasme politique ne saurait masquer la com- plexité du chantier. Pour le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, «alors que partout les fron- tières se referment, l’Afrique est aujourd’hui la seule région qui cherche encore à ouvrir ses marchés, soit une position singulière qui impose d'accé- lérer plus que jamais les efforts engagés par les Etats du conti- nent» . Pour autant, ouvrir les marchés sans renforcer les capacités productives revien- drait à transformer la ZLECAF en simple espace de redis- tribution des importations, au détriment de la valeur ajoutée locale. L’enjeu est donc industriel, mais aussi humain. Pour Mezzour, l’intégration afri- caine ne se jouera pas uni- quement dans les textes, mais dans les compétences, l’expertise et la capacité des pays à mobiliser leurs talents. Sans ingénieurs, logisticiens, techniciens, juristes du com- merce international et autres cadres capables de piloter des chaînes de valeur régio- nales, l’intégration restera théorique. «L’Afrique dispose des ressources, des idées et des compétences nécessaires. Avec de l’investissement et de l’ambition, nous réussirons» , souligne-t-il. Omar Hejira élargit encore la perspective en rappelant que la ZLECAF n’est pas un accord commercial classique, mais un projet de transformation économique et sociale. «La réussite de la ZLECAF dépend de notre capacité collective à construire des partenariats concrets, équitables et mutuel- lement profitables, tout en assurant une justice territoriale africaine» , affirme le secrétaire d’Etat chargé du Commerce extérieur. En effet, l’intégration ne peut réussir si elle accentue les écarts entre pays côtiers et pays enclavés, ou encore entre économies industrialisées et marchés encore fragiles.

 La ZLECAF a pour ambition d’augmenter de 32%

L

les exportations intra-africaines.

a Zone de libre-échange conti- nentale africaine (ZLECAF) est désormais sortie de l’incanta- tion diplomatique pour devenir une réalité économique. Les messages lancés les 11 et 12 décembre depuis Marrakech, lors de la 2 ème édition du Forum des affaires de la ZLECAf, sont limpides à ce propos : l’Afrique n’a plus le luxe d’attendre que les vents mondiaux se calment pour organiser son propre mar- ché. La fragmentation du commerce international, la montée des politiques industrielles défen- sives et la volatilité géopoli- tique imposent au continent de se recentrer sur lui-même. Avec seulement 16% des échanges réalisés à l’intérieur du continent, l’économie afri- caine demeure excessivement

exposée aux décisions prises ailleurs, souvent sans consi- dération pour ses priorités de développement. Cette dépen- dance extérieure l’expose aux chocs exogènes, qu’il s’agisse de hausses tarifaires, de rup- tures d’approvisionnement ou de replis protectionnistes. C’est précisément ce constat qui donne à la ZLECAF sa dimension stratégique. Elle n’est pas pensée comme une simple arithmétique tarifaire, mais comme un cadre destiné à structurer un marché intérieur africain capable d’absorber les chocs externes. Le Maroc s’inscrit clairement dans cette logique. «Grâce aux hautes directives royales, le Maroc consolide son statut d’acteur central et de partenaire straté- gique dans le renforcement de

la coopération multidimension- nelle entre les pays du continent africain», a rappelé, à ce titre, le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, lors du Forum. La vision marocaine repose sur le postulat qu’une zone de libre- échange ne fonctionne que si elle s’appuie sur des infrastruc- tures capables de relier effica- cement les territoires et sur une base productive réelle. D’où cette insistance sur une Afrique «qui transforme ses ressources en valeur ajoutée sur place» , selon les mots d’Akhannouch, et qui relie ses régions «de la Méditerranée à l’Atlantique, du Sahel aux façades maritimes». Sans industrialisation et sans intégration physique des mar- chés, la ZLECAF risquerait ainsi de n’être qu’un espace com- mercial théorique.

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