FNH N° 1019

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BOURSE & FINANCES

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 15 AVRIL 2021

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Deux conditions de forme sont imposées par le législateur : • notifier une mise en demeure donnant un délai de 15 jours, faisant part de la déchéance du terme, et de la décision de mettre en jeu la clause du pacte commis- soire. • inscrire la mise en demeure après les 15 jours au Registre national des sûretés mobi- lières. Les intérêts du débiteur sont néanmoins soigneusement protégés, puisqu’il dispose d’une possibilité de faire opposition après réception de la sommation, ce qui actera l’échec de l’accord contractuel du pacte et le renvoi des parties devant le tribunal pour défendre leurs intérêts. Lorsqu’il s’agit d’un nantissement, certaines

contraintes liées à l’évaluation de la valeur du bien au moment de l’attribu- tion peuvent surgir si elles n’ont pas été réglées minutieusement par le pacte. Certains créanciers peuvent en outre être rebutés par la question de l’ap- propriation d’objets et matériels divers dont il faudra gérer le stockage puis la revente. Sans compter les questions fiscales liées aux immobilisations. Cependant, et en cas de gage qui induit, rappelons-le, la dépossession du bien

«Nous pouvons déplorer néanmoins que la réforme du droit des sûretés n’ait pas donné lieu à une modification concomitante du droit des difficultés d’entreprises».

Le gage et le nantissement sont des sûre- tés mobilières en ce qu’ils constituent une garantie conférant à «un créancier le droit de se payer sur la chose gagée ou nantie par préférence à tous les autres créan- ciers».

donné en sûreté en faveur du créancier, la mise en jeu du pacte commissoire sera simplifiée et l’appropriation plus directe, puisque actée matériellement sans le concours du débiteur. Le pacte commissoire est donc conçu comme un remède simple, efficient et rapide à la problématique des créances impayées, tout en visant le désencombrement des tribunaux et en allégeant les frais liés au recouvrement. Il vise clairement à conforter un meilleur cli- mat des affaires en apportant une sécurité juridique et une efficacité économique aux partenaires, à l’échelle du continent africain, puisque le pacte commissoire a été adopté dans la ligne du droit Ohada, qui a inspiré le législateur marocain. Cependant, et afin d’éviter le couperet des magistrats souvent prompts à rétablir les équilibres au profit des parties jugées les plus «faibles», les co-contractants devront faire preuve d’une totale rigueur dans la rédaction du pacte lorsque l’un des parte- naires est une personne physique, car les non professionnels, qui étaient exclus du dispositif dans l’avant- projet de la loi, ont finalement été admis à la conclusion d’une telle clause. Et ce, dans l’attente peut-être d’une future adaptation de la loi 31-08 sur la protection du consommateur qui date de 2011. ◆

de clause ou son mode de publicité rendent difficile, voire impossible sa mise en exécu- tion, sans compter les difficultés d’organiser matériellement la restitution de biens dans un pays étranger. Il est possible toutefois de libeller une telle clause tout en renonçant à sa mise en jeu le moment venu au profit de la réalisation d’autres garanties. Elle représentera sans nul doute une pression matérielle consi- dérable sur l’acheteur, qui sera privé de la propriété du bien jusqu’à l’apurement de sa situation avec son créancier. F.N.H. : Enfin, quelle est la centralité du pacte commissoire au sein du dispositif juridique relatif aux sûre- tés mobilières et quelles sont les limites de ce mécanisme ? N. Gh. : Le pacte commissoire est égale- ment une démonstration du changement de paradigme induit par la loi 21-18 quant au mode de réalisation des sûretés mobilières entre partenaires privés. Offrir de belles garanties aux entreprises sans s’assurer de la phase de leur mise en exécution aurait affaibli l’efficience de tous les nouveaux dispositifs de gage et nantis- sement. Jusqu’à l’avènement de cette loi, les rigidi- tés et lenteurs liées aux ventes judiciaires

et à la dévaluation du bien cédé par les tribunaux constituaient de véritables écueils désespérant les créanciers les plus tenaces. La réforme des sûretés mobilières a ainsi allégé et simplifié considérablement les pro- cédures de réalisation des garanties par plusieurs mécanismes. A côté de la vente de gré à gré, de l’adjudica- tion judiciaire, le pacte commissoire consti- tue un «outil d’exécution» radical, puisqu’il permet l’appropriation du bien donné en garantie sur un mode contractuel et sans l’intervention du juge. L’article 1.221 pose le principe : «Le créan- cier gagiste ou nanti peut convenir avec le constituant qu’à défaut de paiement de la créance garantie, le créancier devient pro- priétaire de la chose... dont l’attribution se fait par simple constatation de non- paie- ment». Il s’agit d’une forme de «dation en paie- ment» convenue contractuellement et en amont du litige. Cette disposition fait peser une réelle menace sur le créancier défaillant, qui peut être dépossédé de ses comptes bancaires, de son fonds de commerce, de son matériel, de ses véhicules, ou de tout autre bien qu’il aurait donné en garantie au moment de la mise en place du crédit ou de tout partena- riat ou acte commercial.

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