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JEUDI 10 OCTOBRE 2024 / FINANCES NEWS HEBDO
ECONOMIE
Le secteur de la justice marocain est plongé dans une tourmente sans précédent, avec des manifestations incessantes qui perturbent les tribunaux et désarçonnent un système déjà mal-en-point. Cette situation a un impact significatif sur les entreprises marocaines, surtout celles impliquées dans des litiges commerciaux. Addition salée pour l’économie nationale Par M. Boukhari L Paralysie des tribunaux
juger correctement les dos- siers, ce qui nuit à la qualité des décisions rendues», affirme Omar Azougar, avocat au bar- reau d’Agadir, Paris et Montréal et docteur en droit. Selon lui, cette situation a engendré un encombrement croissant des affaires civiles et pénales. «Les magistrats, confrontés à une charge de travail insurmontable, doivent juger une cinquantaine de dos- siers en seulement deux ou trois jours. Cela conduit à des décisions de justice souvent peu convaincantes, tant pour les magistrats que pour les avocats et les conseillers juri- diques. Cette situation entraîne une perte de confiance chez les justiciables, qui s’interrogent sur la qualité du traitement de leur dossier », dixit Azougar.
e secteur de la justice marocain traverse une crise profonde, marquée par des grèves répé- tées et une montée au créneau des différentes professions judiciaires, notamment les gref- fiers, les huissiers de justice et les avocats. Cette situation, qui paralyse le fonctionnement des tribunaux, entraîne des pertes économiques significatives et soulève des préoccupations quant à l'avenir du système judiciaire marocain. Les greffiers, qui jouent un rôle essentiel dans le fonc- tionnement des tribunaux, réclament une modification de leur statut professionnel. Bien que des négociations aient été engagées l'année précé-
subi une perte comprise entre 1,3 et 1,5 million de dirhams. Qui plus est, ce mouvement de contestation a également eu un impact direct sur le traite- ment des affaires juridiques à l’échelle nationale. «Les affaires en cours ont été reportées à une date ultérieure, qui coïncide avec un autre jour de grève. Cela entraîne une accumulation des dos- siers déjà en attente, auxquels s'ajoutent de nouvelles affaires. En conséquence, les audiences deviennent encombrées, avec potentiellement entre 100 et 500 dossiers à traiter par seu- lement trois magistrats. Ces derniers se retrouvent dans l'impossibilité d'instruire et de
dente avec les centrales syn- dicales, les promesses de réforme semblent stagner en raison de blocages au niveau du ministère de l'Économie et des Finances. Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, avait initialement prévu des retenues sur les salaires des grévistes, mais cette mesure a été reportée, reflétant une volonté d'apaiser les tensions. Les grèves menées par les gref- fiers ont eu des conséquences financières importantes. Les tribunaux marocains ont enre- gistré une perte estimée entre 3,8 et 4 millions de dirhams pendant cette période de crise. Les tribunaux de commerce de Casablanca, en particulier, ont
Les justiciables…, grands perdants
Omar Azougar explique par ailleurs qu’en termes éco- nomiques, le problème ne se pose pas réellement pour l’Etat, en raison de l’absence de pertes économiques directes. Toutefois, il soulève une autre problématique qu’est la présence de milliers de fonc- tionnaires qui perçoivent des salaires sans fournir de contre- partie en raison des grèves. En outre, Azougar précise que la véritable perte écono- mique réside dans le fait que les magistrats, qui sont dis- ponibles pour juger et accom- plir leur mission, se retrouvent dans une situation délicate. « Ils n’arrivent pas à mainte- nir les audiences en raison de l'irrégularité de la formation des tribunaux, souvent causée par l'absence de greffiers. Si la formation du tribunal n'est pas conforme à la loi, tous les jugements rendus peuvent être déclarés nuls», insiste-t-il. Les justiciables, eux aussi, se trouvent pris dans les filets de cet engrenage, étant considé- rés comme le maillon faible de ce système. «Le justiciable voit son dossier traîner sans
La crise que traverse le système judiciaire marocain a engendré un encombrement croissant des affaires civiles et pénales.
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