hôtellerie
l’édito
Jean-Joseph Permal
L’EXCELLENCE MAURICIENNE !
Autrefois, nous pensions naïve- ment que le sable blanc et les eaux tur- quoise suffiraient à maintenir Maurice au firmament des destinations touris- tiques. Quelle erreur ! Sous les palmiers du paradis tropical se joue un drame silencieux, celui d’une hospitalité en danger. Car ne nous y trompons pas : ce n’est pas dans le béton de ses luxueux resorts que réside l’âme touristique mauricienne, mais dans le sourire et la compétence de ceux qui y travaillent. Or, ces piliers invisibles de l’économie mauricienne désertent en masse un secteur qui ne sait plus les valoriser ni leur offrir un avenir. Les chiffres sont là, implacables : pendant que les brochures vantent un service légendaire, les écoles hô- telières se vident et les meilleurs élé- ments s’évaporent vers d’autres ho- rizons professionnels. Comment s’en étonner ? Mal payés, peu considérés, sans véritables perspectives d’évolu- tion, les travailleurs du tourisme mauri- cien sont les grands oubliés du miracle économique insulaire. Faut-il pour autant se résigner ? Certainement pas. La création d’une
Académie nationale du tourisme d’ex- cellence constituerait un premier pas décisif, à condition qu’elle ne soit pas un énième gadget administratif mais une véritable pépinière d’excellence, ouverte sur le monde. Plus ambitieux encore serait un système de certification profession- nelle qui reconnaîtrait enfin la valeur de l’expérience acquise. Car c’est bien là le paradoxe mauricien : on vante l’hospitalité insulaire dans toutes les langues, mais ceux qui l’incarnent peinent à faire reconnaître leurs com- pétences. La revalorisation des métiers du tourisme passe également par un changement radical de regard. Quand comprendra-t-on que servir n’est pas servile et que l’excellence relationnelle vaut bien l’expertise comptable ou l’in- génierie informatique ? Face aux stratégies low-cost de certains concurrents régionaux, Mau- rice doit faire le choix courageux de l’excellence humaine. Non pas comme un slogan marketing de plus, mais comme une politique cohérente alliant formation, reconnaissance et innova- tion sociale.
Le temps presse. À l’heure où les Seychelles, les Maldives et même Ma- dagascar affûtent leurs armes, Maurice ne peut se permettre le luxe de l’im- mobilisme. L’avenir touristique de l’île se joue maintenant, dans la capacité des pouvoirs publics et des opérateurs privés à réinventer ensemble un mo- dèle d’hospitalité qui a fait ses preuves mais qui s’essouffle dangereusement. Alors, Maurice saura-t-elle relever ce défi existentiel ? La réponse appar- tient autant aux décideurs qu’à chaque citoyen mauricien. Car ce n’est pas seu- lement d’une industrie dont il s’agit, mais d’une certaine idée de Maurice, celle d’une île où l’excellence n’est pas un vain mot. Jean-Joseph Permal
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