ECONOMIE
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 8 MAI 2025
risation plus ambitieuse des potentiels régionaux. Certaines régions, telles que Casablanca- Settat, Rabat-Salé-Kénitra et Tanger-Tétouan-Al Hoceima, concentrent aujourd’hui, comme vous le soulignez, plus de la moi- tié du PIB national. Pour corriger cette concentration et tendre vers un développement plus équili- bré, le Maroc doit construire un modèle économique plus inclusif, dans lequel chaque région contri- bue activement à la croissance nationale, en s’appuyant sur ses propres atouts. C’est pourquoi un modèle inté- gré de spécialisation régionale s’impose, fondé sur trois piliers: la spécialisation intelligente des territoires selon leurs avan- tages comparatifs (ressources naturelles, capital humain, posi- tion géographique), la complé- mentarité des filières à l’échelle interrégionale, et une coordina- tion stratégique entre les diffé- rents niveaux de gouvernance afin d’éviter les redondances et de mutualiser les efforts. Cela implique, par exemple, de conso- lider Tanger comme hub indus- triel et logistique, Marrakech-Safi comme moteur touristique, Béni Mellal-Khénifra en pôle agro- industriel, ou encore Dakhla comme plateforme de l’économie bleue tournée vers le Sud. Ces spécialisations doivent s’inscrire dans des chaînes de valeur terri- toriales cohérentes et bénéficier d’investissements ciblés. Mais cette logique ne peut fonc- tionner que si elle repose sur des modèles de développement régionaux pensés comme des déclinaisons concrètes du nou- veau modèle de développement. Chaque région doit pouvoir éla- borer une stratégie adaptée à son tissu économique, à ses res- sources, à son marché local, à son patrimoine culturel et à ses ins- titutions, formelles comme infor- melles. Il ne s’agit pas d’appliquer un modèle unique, mais bien de concevoir des trajectoires diffé- renciées, ancrées dans les réalités locales. C’est à cette condition que le Maroc pourra bâtir une croissance plus équilibrée, durable et véritablement partagée. ◆
Les grands projets d’infrastructure continuent de se concentrer sur les régions métropolitaines, creusant les écarts avec le reste du territoire.
tures et de l'absence d'un tissu économique structuré et attractif Pour relever ces défis, plu- sieurs stratégies territorialisées doivent être mises en œuvre. Il est d’abord essentiel de renfor- cer la formation professionnelle à l’échelle régionale, en l’adap- tant aux besoins des marchés locaux et aux spécificités du tissu économique local. Cela permet- trait une meilleure insertion des jeunes dans les secteurs porteurs de leur région. En parallèle, la création de zones industrielles et de technopôles décentralisés, notamment dans des régions à fort potentiel comme Tanger ou Béni Mellal-Khénifra, peut favoriser l’investissement privé et stimuler l’emploi local. Des politiques actives de l’emploi, incluant l’appui à l’auto-entre- preneuriat, l’insertion profession- nelle des jeunes et le dévelop- pement de l’économie sociale et solidaire, doivent également être déployées en priorité dans les régions les plus touchées. En complément, la mise en place de chaînes de valeur locales, dans des secteurs comme l’agro- industrie, le tourisme ou les éner- gies renouvelables, est essen- tielle pour diversifier les sources d’emploi. Toutefois, la réussite de ces politiques dépend d’une gouvernance intégrée et efficace. Cela suppose une collaboration
étroite entre l’État, les collectivi- tés territoriales et le secteur privé, ainsi qu’un renforcement de la coordination entre les différents niveaux de gouvernance. C’est à cette condition que les inves- tissements publics pourront pro- duire un impact réel et durable sur l’emploi régional. F. N. H. : Certaines régions, telles que Casablanca- Settat, Rabat-Salé-Kénitra et Tanger-Tétouan-Al Hoceima, concentrent plus de 50% du PIB national. Dans ce contexte, comment diversifier les moteurs de la croissance économique pour favoriser une crois- sance inclusive et réduire les disparités entre ces régions et celles moins développées ? Pr H. E. : Absolument, et c’est même une nécessité stratégique. La mise en œuvre de la nou- velle architecture régionale issue de la réforme de 2015 ne peut réussir sans une diversification effective des moteurs de crois- sance, reposant sur une valo-
risquent de produire des effets inégaux, compromettant ainsi l’objectif de convergence régio- nale et de développement inclusif et durable. F. N. H. : Le taux de chô- mage national a atteint 21,3% selon le recense- ment général de 2024, avec des disparités marquées entre les zones urbaines et rurales, ainsi qu’entre les régions, comme le montrent les enquêtes périodiques du HCP. Quelles stratégies le gouvernement met-il en place pour réduire ces iné- galités, notamment dans les régions les plus tou- chées par le chômage ? Pr H. E. : La lutte contre le chô- mage, qui atteint 21,3% selon le recensement général de 2024, et la réduction des déséquilibres entre les différentes régions nécessitent une approche adap- tée aux spécificités territoriales, notamment régionales. Dans les régions à dominante urbaine, le chômage résulte souvent de la surqualification ou de l’inadé- quation entre la formation et les besoins du marché de l’emploi. À l’inverse, dans les régions domi- nées par des milieux ruraux et souvent enclavés, les opportuni- tés d’emploi restent limitées en raison du manque d'infrastruc-
Aujourd’hui, trois régions concentrent plus de 50% du PIB national : une dynamique cumulative qui aggrave les fractures régionales.
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