ECONOMIE
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FINANCES NEWS HEBDO MERCREDI 30 AVRIL 2025
de qualité, à l’instar de ce qu’ils peuvent vivre dans d’autres pays comme l’Espagne ou encore la Turquie… Plusieurs leviers doivent être acti- vés par ailleurs, à commencer par une meilleure communication autour des destinations locales encore méconnues, la mise en place de partenariats public-privé pour soutenir des programmes de «tourisme pour tous», ainsi que des incitations fiscales pour les opérateurs qui développent des offres spécifiquement destinées au marché marocain (chèques vacances, aménagement des vacances scolaires…). F. N. H. : D’après vous, quel est aujourd’hui le principal frein au développement du tourisme national, et com- ment peut-on y remédier de manière structurelle ? S. M. T. : Le principal frein au développement du tourisme national au Maroc réside dans plusieurs facteurs structurels. Nous avons notamment un modèle touristique concentré et saisonnier, avec un taux d’occu- pation moyen inférieur à 60%, ce qui génère une instabilité des emplois et des revenus locaux, limitant la pérennité et la renta- bilité des investissements touris- tiques au niveau régional. Le tourisme a longtemps souffert de dysfonctionnements dans sa gouvernance et son pilotage stra- tégique. Il était loin d’être consi- déré comme un véritable pilier de l’économie nationale, et manquait d’une coordination efficace entre les acteurs publics et privés. Pendant des années, les opéra- teurs étaient livrés à eux-mêmes, avec une absence de méca- nismes de suivi rigoureux des projets touristiques régionaux. Les choses n’ont commencé à s’améliorer qu’avec le gouver- nement actuel. Il y a aussi des retards administratifs et une complexité réglementaire, où la mise en place de structures clés comme la Société de développe- ment régional de tourisme et les Conseils régionaux du tourisme est freinée, ralentissant ainsi le développement local. Enfin, force est de consta-
Le tourisme durable et responsable s’impose, porté par une demande croissante pour des hébergements écologiques...
ter un sérieux déficit en infras- tructures de transport, notam- ment aériennes, marqué par un manque de liaisons directes et de dessertes point à point. Cette situation limite l’accès à certaines destinations, freine l’arrivée des touristes et s’ajoute à une attrac- tivité et une compétitivité encore insuffisantes face à la concur- rence internationale. Pour faire face à ces blocages, il y a lieu de revoir le modèle de développement touristique pour le rendre plus résilient, territoriale- ment équilibré et capable d’assu- rer une activité touristique stable tout au long de l’année, en diver- sifiant les produits et en valorisant les régions moins exploitées. Un modèle de développement qui s’intègre parfaitement dans le nouveau modèle de développe- ment économique et social de notre pays. Il faut améliorer la gouvernance et le pilotage en créant et en renforçant les instances de coor- dination stratégique et opération- nelle, tels que l’Observatoire du tourisme, les Conseils régionaux du tourisme, des agences de développement touristique régio- nales pour assurer un suivi effi- cace des projets et une meilleure concertation entre acteurs. Il faut également impliquer davantage les professionnels représentés dans la Confédération nationale du tourisme. Il est nécessaire de simplifier et accélérer les procé-
dures administratives pour lever les blocages, notamment dans les régions à fort potentiel comme Draâ-Tafilalet, Ouarzazate, Dakhla…, afin de permettre la concrétisation rapide des projets structurants. Certes, un effort considérable a été constaté ces dernières années pour renforcer l’accessibilité de nos destinations. Toutefois, il est primordial d’ouvrir davantage de liaisons directes afin de faciliter l’accès aux différentes régions du Maroc, attirer de nouveaux marchés émergents et cibler des pays à fort potentiel d’émission touristique tels que l’Inde, le Brésil, les Amériques ou la Chine. Enfin, il est certain que la réus- site de ce projet passe par un renforcement de la promotion touristique et de la digitalisation. Il est également indispensable d’adapter les produits aux mar- chés interne et externe, tout en améliorant la compétitivité des destinations marocaines face à la concurrence internationale. F. N. H. : Le Royaume s’est fixé d’entrer dans le cercle des 15 premières destina- tions touristiques mondiales
d’ici 2030, avec un objec- tif de 26 millions de visi- teurs. Quelles orientations stratégiques doivent être adoptées pour atteindre cet objectif ambitieux ? S. M. T. : Nous devons réinventer notre tourisme marocain autour d’un tourisme durable qui valo- rise le patrimoine culturel et natu- rel, tout en intégrant les enjeux environnementaux et sociaux. Nos touristes sont à la recherche d’expérience de vie; il y a lieu de diversifier notre offre touristique pour attirer une clientèle variée, en développant notamment le tourisme dans les régions, pas uniquement sur l’axe Marrakech- Agadir. Nous devons répondre aux nou- velles attentes de la clientèle en développant un tourisme culturel, d’aventure et rural, réduire la sai- sonnalité et renforcer l’attractivité tout au long de l’année. Il y a bien entendu aussi le ren- forcement des infrastructures et des services, incluant le trans- port, l’hébergement, la formation des ressources humaines et la digitalisation, pour améliorer l’ex- périence touristique et la compé- titivité globale. Ces orientations, combinées à une approche intégrée et terri- torialisée, permettront au Maroc de consolider sa position sur la scène touristique mondiale et d’atteindre ses ambitions pour 2030. ◆
Nous avons un modèle touristique concen- tré et saisonnier, avec un taux d’occupation moyen inférieur à 60%, ce qui génère une instabilité des emplois et des revenus locaux.
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