FNH N° 1220

ECONOMIE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 25 DÉCEMBRE 2025

Emploi «Nous sommes très loin des prévisions de la Stratégie nationale de l’emploi élaborée en 2014»

un jeune marocain sur quatre, entre 15 et 24 ans, se trouve dans une situation de NEET, soit 1,5 million d’individus. Et le CESE de souli- gner «l’insuffisance des stratégies et politiques publiques consacrées à l’intégration socioéconomique de cette catégorie particulièrement vul- nérable» (1) . Différentes études ont identifié plu- sieurs causes ayant été à l’origine de ce profil (NEET) : • i la défaillance du système édu- catif : le décrochage scolaire massif est la première porte de sortie vers le statut NEET; • ii- la transition difficile vers le mar- ché de travail : la majorité des jeunes NEET sont des primo-demandeurs d’emploi qui se trouvent confrontés aux difficultés d’accès au marché de travail pour différentes raisons, dont principalement l’inadéquation de leur formation avec les besoins des entreprises; • iii- les conditions socioécono- miques : les barrières sociales et culturelles, plus particulièrement dans les zones rurales, restreignent l’accès à l’éducation et à l’emploi, surtout pour les femmes. Soulignons que la situation que vit cette catégorie sociale se traduit par une grande perte au niveau du potentiel humain avec des consé- quences lourdes sur les plans de la production, de la création des richesses et de la lutte contre la pauvreté et l’inclusion sociale. En comparaison internationale, le taux de chômage du Maroc en 2023 a été de loin supérieur à celui du monde (5,3%), des pays à reve- nu intermédiaire tranche inférieure (5,1%), des pays à revenu intermé- diaire tranche supérieure (5,7%) et des pays à revenu élevé (4,6%). Il est bien au-dessus du taux de chômage des pays arabes (9,3%) et

La croissance au Maroc ne contribue pas assez à la création de l’emploi. Le développement des nouveaux métiers du Royaume ne profite pas beaucoup à l’intégration locale. Entretien avec Lahcen El Amli, professeur universitaire d’économie.

Propos recueillis par C. Jaidani

Finances News Hebdo : Le taux de chômage au Maroc est actuellement de 13,1%. Comment l’expliquez-vous ? Lahcen El Amli : Rappelons tout d’abord que le taux de chômage exprime la part de la population active dépourvue d’un emploi (les chômeurs) mais qui cherche un travail, parmi la population active (HCP). Indicateur de la santé d’une économie, le taux de chômage reflète l’état ou l’importance du déséquilibre entre l’offre d’emploi et la demande d’emploi sur le marché du travail. Au Maroc, le taux de chômage se situe depuis plusieurs années toujours à des niveaux élevés. Il touche une proportion importante de la population active et nous avons affaire à un chômage massif et structurel. Sur la période 1998- 2023, il s’est situé entre 9% et 19%. En 2023, le taux de chômage (13%) était d’un niveau comparable à celui des pires années 1999 (13,9%) et 2000 (13,6%). Trois ans après 2020, année de la crise de la pandémie du Covid 19, le pays n’a pas réussi à revenir au taux de chômage enre- gistré en 2019 et qui était de 9,2%. Dans la réalité, le volume du chô- mage est certainement plus impor- tant que les chiffres avancés. Pour différentes raisons, nous pouvons

faire l’hypothèse selon laquelle une bonne proportion des personnes relevant du halo du chômage sont pratiquement des chômeurs. Il s’agit des personnes occupées dans des emplois très précaires, les décou- ragés du marché du travail, des emplois clandestins, les femmes au foyer qui veulent travailler mais ne trouvent pas du travail et sont comptabilisées comme inactives. Par ailleurs, du fait de la définition même de l’emploi, il suffit d’avoir travaillé une heure dans la semaine, dite de référence, pour ne pas être compté comme chômeur. Avec la faible création de l’emploi au Maroc, se développent de façon intensive des emplois précaires, à durée très courte, vulnérables…, le nombre de personnes dans le halo du chômage ne peut qu’augmenter. En prenant en considération le fait qu’une bonne proportion des

personnes classées dans le sous- emploi et des travailleurs «infor- mels» est concernée par des emplois très précaires et vulnérables, il convient alors de les classer comme chômeurs. Ce faisant, le taux de chômage se situerait à des niveaux beaucoup plus supérieurs que ceux établis officiellement. Par ailleurs, une bonne proportion de la population active désignée par l’expression «NEET (acronyme signi- fiant ni en emploi, ni en formation, ni en éducation») et dont l’intégration socioéconomique constitue un défi majeur et une préoccupation capi- tale pour l’économie et la société, relève de la catégorie des chômeurs et vient alimenter le volume du chô- mage et du taux de chômage au niveau national. Selon une étude du Conseil écono- mique, social et environnemental (CESE), le HCP a estimé qu’en 2022,

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