T RIBUNE LIBRE
74
JEUDI 23 MARS 2023 FINANCES NEWS HEBDO
www.fnh.ma
Gouvernement Reprendre la main ? A vec la fin de ce premier tri- mestre, comment se pré- sente la conjoncture de cette année ? Certains clignotants sont préoccupants. Mais Par Mustapha SEHIMI Professeur de droit (UM5, Rabat) - Politologue
restructurés et placés sous la tutelle non plus du département de l'Intérieur, mais de celui de l'Investissement. Tout paraît se passer - enfin !... - comme si ce cabinet entendait désormais travailler sur le moyen terme. A preuve, encore, la convention-cadre sur le tourisme de plus de 6 milliards de DH pour la période 2023-2027. Ce faisant, des arbitrages sont à faire compte tenu des fortes contraintes budgétaires obligataires. Equation politique La sortie sur le marché international a été un succès avec un emprunt de 2,5 milliards de dollars, en deux tranches égales entre 5 et 10 ans, à un taux de 6%- la France emprunte à 2,8% et l'Allemagne à 2,2%... Pour 2023, il faut rappeler que le gouvernement devra emprunter 130 milliards de DH (MMDH) contre 105 en 2022 pour le finance- ment du Trésor, plus de 69 MMDH en interne et 60 MMDH en externe. Dans ce même registre, il faut men- tionner la ligne de crédit modulable de 5 MM$ sur deux ans accordée par le FMI, voici deux semaines. Le mar- ché financier international a continué à exprimer sa confiance dans l'économie du Royaume : gestion des grands équi- libres, rigueur des finances publiques, opportunités de croissance et rési- lience,... Enfin, le Maroc est sorti de la «liste grise» du GAFI : un bon signe. Reste l'équation politique actuelle : la capacité du cabinet à entreprendre les grandes réformes encore en instance (fiscalité, lutte contre la corruption, éco- nomie de rente,...). Le Pacte national devant prolonger le nouveau modèle de développement (NMD) n'est pas d'ac- tualité, deux ans après. Le Pacte social est laborieux et pas vraiment en bonne voie. Et bien des voix s'interrogent sur le volontarisme des politiques publiques à entreprendre et à finaliser les réformes, même à marche forcée. Une gouver- nance sans doute différente s’impose à l’évidence : elle seule peut entraîner l'adhésion. Et le soutien. ◆
par-delà les chiffres qui en témoignent, n'est-ce pas l'état d'esprit des ménages qui retient surtout l'intérêt. Avec le mois du Ramadan qui commence, il faut faire ce premier constat : l'inflation est au centre des préoccupations. Des pro- duits de grande consommation enre- gistrent une forte hausse - les tomates qui rebondissent à 12 DH, les oignons à 15 DH... C'est cela le quotidien ! Il faut être juste : bien des mesures anti-inflation ont été prises par le cabi- net actuel, déclinées autour d'aides et de subventions aux transporteurs, au tourisme et à d'autres encore. Mais sont-elles suffisantes ? En tout cas, le citoyen, lui, se voit confronté à une sensible et progressive détérioration de son pouvoir d'achat. Et le discours gouvernemental lui passe pratiquement au-dessus de la tête : il n'imprime pas. Les faits cumulatifs depuis trois ans à l'international n'ont pas aidé l'équipe Akhannouch : tant s'en faut. Ils sont connus : pandémie Covid-19 (2020- 2021), conflit Ukraine-Russie et son impact sur les prix des matières pre- mières et des coûts logistiques, etc. Le gouvernement n'a pas anticipé cette situation. Pas davantage, il n'a pas pu prévoir une forte reprise de la demande par rapport à l'offre, un facteur inflation- niste. Politique monétaire et stagflation Il faut y ajouter bien des interroga- tions quant à la politique monétaire. La Banque centrale a augmenté son taux directeur de 50 points de base pour se situer à 2,5%. Ce mardi, le Conseil de Bank Al- Maghrib s'est réuni et a décidé du resserrement avec un nouveau taux de 3% du crédit. Les termes de cette
équation sont les suivants : prévenir tout désencrage des anticipations d'infla- tion, favoriser le retour de l’inflation à des taux en ligne avec l'objectif de stabilité des prix et favoriser la crois- sance. D'une autre manière, comment contenir la hausse des prix et maîtriser la demande globale dans ses deux composantes que sont l'investissement et la consommation ? La stagflation priorisant la lutte contre l'inflation est- elle opportune et tenable ? Le gouvernement doit faire face à toutes ces contraintes qui ne pouvaient être inscrites dans son programme d'inves- titure d'octobre 2021. D'une crise à l'autre, il a été bousculé avec quelque dix huit mois passablement heurtés en interne et à l'international. L'inflation va certainement durer. Le Maroc importe 50% de ses besoins alimentaires - des secteurs inflationnistes avec les effets des intrants sur la production nationale. En même temps, il lui fallait actualiser et mettre en avant les réformes annon- cées englobant la santé, l'éducation et l'investissement. Pour les deux pre- miers secteurs, la charge budgétaire est importante; s'y ajoute celle de la protection sociale. Pour ce qui est de l'investissement, une Charte portant loi- cadre a été finalement adoptée et enre- gistre la publication de ses premiers textes règlementaires. Les CRI ont été
Des arbi- trages sont à faire compte tenu des fortes contraintes budgétaires obligataires.
Made with FlippingBook flipbook maker