FNH N_ 1210

ECONOMIE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 9 OCTOBRE 2025

variation du prix international se répercute quasi automatique- ment sur le marché local, après conversion en Dirhams. L’absence de mécanismes de régulation et la prépondérance de l’informel accentuent la sensibilité du mar- ché marocain aux fluctuations mondiales» .

 D’après TradingEconomics, l’or a progressé d’environ 50% cette année, ce qui sug- gère qu’il pourrait s’agir de la meilleure performance annuelle depuis 1979.

Entre volatilité et manque de transparence

Ce mode de fonctionnement crée des écarts notables d’une région à l’autre et alimente parfois un sentiment d’opacité chez les consommateurs. Dans les souks de Casablanca, Marrakech ou Fès, les clients constatent des varia- tions de prix parfois importantes pour des produits similaires. Cette absence de transparence nourrit les comportements spéculatifs et fragilise la confiance dans la filière. Parallèlement, les bijoutiers relèvent une évolution de la demande. Les familles issues de la classe moyenne, qui achetaient autrefois de l’or pour l’épargne ou la dot, se tournent désormais vers des bijoux plus légers, voire s’abstiennent. L’or, longtemps perçu comme un placement popu- laire et symbolique, se transforme peu à peu en produit de luxe. Cette mutation traduit une fracture sociale : le métal précieux, jadis accessible, tend à devenir un actif réservé à une élite financière. Cette situation relance le débat sur la formalisation et la régulation du marché marocain de l’or. Plusieurs économistes plaident pour la créa- tion d’un cours officiel de réfé- rence en dirhams, mis à jour quo- tidiennement, afin d’éviter les abus et de stabiliser la filière. D’autres insistent sur la mise en place de mécanismes de traçabilité, de cer- tification et de contrôle des circuits de distribution. L’objectif serait de rendre les transactions plus trans- parentes et de protéger les petits artisans face à la concurrence informelle. Une telle réforme ren- forcerait la crédibilité du marché tout en sécurisant les consomma- teurs. Elle permettrait également, selon les experts, d’améliorer le suivi des flux financiers dans un secteur qui conserve une forte valeur culturelle et symbolique. ◆

Flambée de l’or Signe d’un déséquilibre global ou simple refuge de crise ?

traduisent une forme de méfiance structurelle vis-à-vis du système monétaire international dominé par le dollar» , explique-t-il. L Le métal jaune s’envole à des niveaux historiques. Au Maroc, cette flambée se répercute directement sur les prix et expose les fragilités d’un marché encore dominé par l’informel. Par K. A. Des Banques centrales en quête d’autonomie ’

or poursuit sa course ascendante et vient de franchir un cap iné- dit sur les marchés internationaux. Tout récemment, l’once d’or s’est hissée au-dessus du seuil symbo- lique des 4.000 dollars, un record absolu. Cet envol n’est pas anodin: il traduit à la fois l’inquiétude des investisseurs face au ralentisse- ment économique mondial et la montée des risques géopolitiques. Contrairement aux épisodes pré- cédents de hausse, cette poussée n’a rien d’éphémère. Elle s’ins- crit dans un contexte de désé- quilibres profonds, où les poli- tiques monétaires, la volatilité des marchés et la recomposition du pouvoir économique mondial s’entrecroisent. Pour l’économiste Mohamed Benchekroun, profes- seur de management, cette évo- lution dépasse la simple réaction des marchés financiers. «Au-delà de l’effet conjoncturel lié aux anti- cipations monétaires, des dyna- miques de fond nourrissent la ten- dance. Les achats massifs d’or par les Banques centrales, notam- ment dans les pays émergents,

loppées, notamment aux États- Unis, renforce cette dynamique. En effet, lorsque le coût de l’argent diminue, l’or actif non rémunéré perd moins face aux placements traditionnels. Ainsi, la détention du métal devient plus attrayante, ce qui entretient la hausse des cours. Un effet immédiat au Maroc Au Maroc, la flambée internatio- nale se répercute sans délai. Le Royaume, qui ne produit pas d’or, dépend entièrement des impor- tations pour alimenter son mar- ché local. Par conséquent, chaque variation du cours mondial se tra- duit directement par une modifi- cation des prix pratiqués par les bijoutiers. Ces dernières semaines, le gramme d’or 18 carats s’est approché du seuil des 950 dirhams, un record historique. Cette hausse exerce une pres- sion sur le pouvoir d’achat des ménages. Le marché marocain, déjà fragilisé par une forte pré- sence informelle, subit de plein fouet ces fluctuations. Mohamed Benchekroun, rappelle que «toute

Depuis deux ans, plusieurs puis- sances émergentes, notamment la Chine, l’Inde ou la Turquie renforcent massivement leurs réserves aurifères. Ce mouvement vise à réduire leur dépendance au billet vert et à protéger leurs éco- nomies contre les fluctuations du marché des changes. En parallèle, de grands fonds d’investissement réallouent leurs portefeuilles vers le métal jaune, perçu comme une valeur sûre à l’heure où les mar- chés boursiers se montrent hési- tants. Ce glissement graduel modifie en profondeur la structure de la demande mondiale. L’or devient à nouveau un actif stratégique : il attire autant les États que les investisseurs privés. De plus, la perspective d’une baisse des taux d’intérêt dans les économies déve-

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