Finances News Hebdo N° 1113

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ECONOMIE

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 15 JUIN 2023

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législation du travail. La rémunération est disparate, en l’occurrence, le salaire moyen dans le secteur agricole est inférieur de 60% à celui de l’industrie et de 73% à celui des services. Un déséquilibre entre salaire et productivité est observé : tandis que la productivité a progressé de 1,9% entre 2014 et 2019, le salaire moyen réel a dégrin-

golé d’environ 0,88. Cette discrépance marque également d’autres secteurs vitaux de l’économie, en l’occurrence l’industrie et le transport. • En outre, les chiffres révèlent des inégalités salariales significatives entre les travailleurs informels et formels. Les employés informels reçoivent en moyenne une rémunération cinq fois inférieure à celle de leurs homologues

La proportion élevée de l’emploi informel soulève des inquié- tudes quant à l'équi- té, la productivité et la stabilité du marché du travail marocain.

travaillant dans le secteur formel. Cette disparité salariale met en évidence l'exploi- tation économique dont sont victimes de nombreux travailleurs informels. Ces travail- leurs, souvent peu organisés et mal informés de leurs droits, sont notamment vulnérables à l'exploitation salariale et aux conditions de travail précaires. De fait, la productivité des employés formels est 3,7% supérieure à celle de leurs homologues informels. • S’agissant du taux de féminisation, les femmes sont sous-représentées dans des emplois à forte qualification. Ainsi, 71% exercent dans des emplois manœuvres, souvent dans des secteurs informels et non qualifiés. Au demeurant, seuls 15% des femmes occupent des postes de cadre ou technicien. • Les implications de cette prévalence éle- vée de l'emploi informel sont multiples. Tout d'abord, cela compromet la collecte de recettes fiscales pour l'État, limitant ainsi ses capacités à fournir des services publics de qualité. Par ailleurs, cela entrave la crois- sance économique globale, car l'emploi informel est généralement associé à une productivité plus faible. De plus, les travail- leurs informels sont privés d'une protection sociale adéquate, ce qui les expose à des risques accrus en cas de maladie, d'acci- dent ou de perte d'emploi. F.N.H. : Les politiques mises en place au fil des années par les dif- férents gouvernements n’ont pas pu solutionner la problématique qui prend une ampleur de plus en plus grandissante. À votre avis, quelles sont les mesures à mettre en place pour limiter le travail informel ? A. Z. M. : Face à ces défis, il est essentiel que le gouvernement marocain mette en

œuvre des politiques visant à réduire la pré- valence de l'emploi informel et à favoriser une transition vers le secteur formel. Ces politiques devraient inclure des mesures fondamentales : • Tout d'abord, il est important de simplifier les procédures administratives, de réduire les coûts liés à la création d'entreprises for- melles et d’accélérer les procédures d’ob- tention de licence et de déclaration fiscale pour faciliter la transition vers le secteur for- mel. Cela encouragera les travailleurs et les entreprises à opter pour le secteur formel, en réduisant les barrières à l'entrée. • Ensuite, il est crucial de renforcer l'appli- cation des lois du travail pour protéger les droits des travailleurs et dissuader les pratiques informelles. Des inspections régu- lières et des sanctions sévères en cas de non-conformité doivent être mises en place. • Parallèlement, des incitations finan- cières et fiscales peuvent être offertes aux employeurs pour les encourager à embau-

cher légalement. Cela peut prendre la forme de réductions de charges sociales ou de subventions pour les entreprises qui opèrent dans le secteur formel. • Il est également important de promouvoir l'éducation et la formation professionnelle, en développant des programmes adaptés aux besoins du marché du travail et en four- nissant aux travailleurs les compétences nécessaires pour accéder à des emplois formels de meilleure qualité. • Également, il convient de renforcer la pro- tection sociale pour les travailleurs informels en mettant en place des régimes d'assu- rance maladie abordables, des régimes de retraite adaptés et des filets de sécurité sociale pour les périodes de chômage. • Enfin, la mise en œuvre de ces mesures devrait être soutenue par une coopération étroite entre le gouvernement, les syndicats, les employeurs et la société civile, afin de garantir leur efficacité et leur pertinence dans le pays. ◆

La prédo- minance du travail infor- mel entrave la croissance économique globale, car ce type d’emploi est générale- ment asso- cié à une productivité plus faible.

L’emploi informel n’est pas propre aux entreprises naissantes ou aux activités économiques paral- lèles. Celui-ci prend place également au sein de grandes entités. En effet, les données provenant du compte satellite indiquent que 7,3% de l’emploi des entreprises formelles sont informels. Pour ce qui est de la répartition sectorielle, le secteur du commerce représente la plus grande proportion, avec 47% du total des emplois informels, suivi du secteur de l’industrie (16,8%), puis les services marchands (13,3%), le bâtiment et les travaux publics, (10,5%), le transport (6%), l'hôtellerie et la restauration (5,5%) et la pêche (0,9%). Dans le cadre d’une autosaisine, le Conseil économique social et environnemental (CESE) s’est notamment penché sur les raisons de la prédominance de l’informel au Maroc. Le Conseil fait savoir que cette situation est essentiellement due à la persistance des entraves réglementaires à la formalisation, aux difficultés d’accès au financement, aux marchés et au foncier, à l’insuffisance du niveau de qualification qui exclut de nombreux actifs de l’économie formelle, ou encore à la faiblesse des opportunités d’emploi en milieu rural. Un phénomène persistant

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