FNH N° 1116

S OCIÉTÉ

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JEUDI 13 JUILLET 2023 FINANCES NEWS HEBDO

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◆ Divisé entre l’usage de plusieurs langues, le Maroc se dirige vers l’emploi exclusif de l’arabe dans les administrations et les établissements publics. Cette décision risque d’affecter l’accès à l’information et peut avoir des implications spécifiques vis-à-vis des MRE. ◆ La mise en place de politiques linguistiques inclusives ainsi qu’une planification stratégique sont nécessaires pour assurer une transition réussie et harmonieuse qui favorise le développement global du pays. ◆ Entretien avec Abdelkhalek Hassini, enseignant-formateur, conférencier, expert en migration et développement et président du Collectif des associations pour le développement de l’Oriental Europe (CADOriental Europe). «La transition vers l'arabe dans les administrations doit être abordée avec prudence» Politique linguistique

Propos recueillis par M. Ait Ouaanna

Finances News Hebdo : Le gouver- nement est visiblement détermi- né à imposer le tout arabe au sein des administrations maro- caines. Récemment, la ministre de la Transition numérique et de la Réforme de l’Administration, Ghita Mezzour, a indiqué qu’un jugement rendu par le tribunal administra- tif de Rabat stipule que l’usage du français par les administrations publiques n’est plus valable. Qu’en pensez-vous ? Abdelkhalek Hassini : La question linguis- tique au Maroc revêt une importance majeure et suscite de nombreux débats et contro- verses quant à l'usage des langues dans le pays. La diversité linguistique y est consi- dérée comme un trésor, avec plusieurs lan- gues coexistantes, telles que le français, la darija (arabe dialectal marocain), l'arabe clas- sique et l'amazigh (berbère), reflétant ainsi la richesse culturelle et historique du Maroc. Cependant, cette diversité présente des défis en termes d'inclusion, de développement économique et de stabilité sociale. Récemment, le gouvernement marocain a annoncé sa décision d'imposer l'arabe comme langue officielle dans l'Administration marocaine, ce qui a engendré des réactions variées au sein de la société. Cette déci- sion est motivée par la volonté de renforcer l'identité culturelle arabe du pays et de favo- riser l'utilisation de la langue nationale. Elle cherche aussi à faciliter l'accès à l'éducation et à l'information pour les citoyens marocains

L'imposition de la langue arabe dans l'administra- tion publique peut pré-

senter des défis pour

les investis- sements des entreprises étrangères au Maroc.

qui ne maîtrisent pas bien le français. La présence considérable de la langue fran- çaise dans la vie économique, l'adminis- tration, les médias et l'éducation au Maroc constitue un défi majeur dans la transition lin- guistique. Le français, héritage du passé colo- nial, est souvent perçu comme une langue «d'élite», ce qui peut engendrer du ressenti- ment au sein d'une partie de la population. De plus, le français est largement utilisé

dans les postes universitaires et les cursus d'études supérieures, ce qui rend son rem- placement difficile. Il est important de prendre en compte cet aspect lors de la réorientation linguistique, afin de garantir une transition en douceur. En favorisant l'utilisation de l'arabe, la poli- tique linguistique vise à assurer une plus grande accessibilité à l'éducation et à l'infor- mation, renforçant ainsi l'inclusion sociale et l'égalité des chances.

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