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JUSTICE
FINANCES NEWS HEBDO
JEUDI 18 NOVEMBRE 2021
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lourde charge pour l’Etat. Chaque détenu coûte à l’Etat entre 30 à 40 DH par jour. Ces charges auraient pu être déployées dans d’autres domaines comme la santé, l’ensei- gnement ou les infrastructures. F.N.H. : On déplore également un taux de récidive élevé chez les déte- nus marocains. Comment l’expli- quez-vous ?
M. S. : Il n’y a que 5% de prisonniers qui ne sont pas récidivistes. C’est un taux alarmant. Après avoir purgé leur peine, certains ex-détenus récidivent au bout d’une semaine, car ils ont des avantages à l’intérieur des prisons qu’ils n’ont pas en état de liberté. Ils sont nourris et logés, font du sport, ont une
Il faut investir de nouvelles pistes pour lutter contre la récidive dans les pénitenciers marocains.
douche à leur disposition, peuvent pratiquer d’autres activités culturelles ou sportives sans le moindre effort. Mais leurs parents vivent un grand calvaire car, à chaque fois, ils doivent leur donner de l’argent pour qu’ils achètent ce dont ils ont besoin. Il est donc nécessaire d’investir de nouvelles pistes pour lutter contre le phénomène de récidive. F.N.H. : Le Code pénal marocain est calqué en grande partie sur celui français. N’est-il pas opportun d’établir dans la réforme envisagée un texte plus adapté à l’environne- ment marocain ? M. S. : Avant qu’un projet de loi ne soit abordé par la Commission de la Justice, de la Législation et des Droits de l’Homme relevant du Parlement, commence une série de discussions en dehors du Parlement à laquelle participent le ministère de la Justice, des magistrats, l’Association des Ordres des avocats au Maroc et d’autres acteurs de la société civile. Chaque partie donne son point de vue et livre des recom- mandations en fonction de l’environnement socioéconomique national et en s’inspirant d’autres pays. Au final, ils proposent une mouture du projet de loi au Secrétariat général du gouvernement (SGG) qui le fait suivre au Parlement. Les discussions abou- tissent à différents amendements pour que le projet de loi soit en phase avec la situa- tion culturelle, sociale, économique et poli- tique nationale. F.N.H. : Pensez-vous que le projet du Code pénal a été retiré du Parlement à cause des clauses relatives à l’en- richissement illicite comme cela a été évoqué par l’opposition ? M. S. : Le gouvernement a retiré ce projet
de loi du Parlement en vue de l’amender dans sa globalité, et non seulement à cause d’un article relatif à l’enrichissement illicite. Avant d’être ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi est d’abord un avocat, un militant et un défenseur des droits de l’Homme. Il a sa propre vision qui se veut plus moderne. F.N.H. : La réforme du Code pénal donne l’impression qu’il existe une confrontation entre le courant conservateur et le courant moder- niste. Par exemple, certaines voix militent pour l’interdiction de la peine de mort, la dépénalisation des relations consensuelles en dehors du mariage ou de l’acte de man- ger sur la voie publique pendant le Ramadan. D’autres sont contre. Quelle est votre lecture ? M. S. : Il faut rappeler que le Maroc est un Etat musulman ayant des principes indiscu- tables, mais qu’il faut néanmoins adapter avec l’évolution de la société marocaine et son environnement aussi bien national qu’international. Pour ceux qui veulent pré- server la peine capitale, ils doivent se poser la question : que va-t-on gagner avec une telle sentence ? Si on est conservateur, il faut dire que Dieu seul est capable de donner la vie ou la mort. Une personne ayant commis un crime passible de la peine de mort peut un jour devenir intègre. Personnellement, je suis contre cette peine qui est cruelle et ne donne pas les effets escomptés en termes de prévention contre les crimes les plus atroces. Il est possible de penser à des peines sévères, mais qui n’aboutissent pas à la peine capitale. Pour les relations sexuelles consensuelles
en dehors du mariage, il faut prendre en considération la réalité des choses. Pour une raison ou une autre, certaines personnes ne veulent pas se marier pour ne pas assumer une responsabilité ou honorer des engage- ments. Elles préfèrent préserver leur liberté individuelle et ne pas subir des contraintes. Ces relations consensuelles commencent à séduire de nombreuses personnes. Elles ne doivent être illicites que lorsque l’une des personnes est mariée. Car, dans ce cas, on parle d’adultère qui est passible de peine privative de liberté. C’est le cas aussi pour les déjeuneurs du Ramadan ou la consom- mation d’alcool en public. Ces actes sont sanctionnés pénalement. Pour la réforme du Code pénal, il faut trou- ver un équilibre entre le courant conserva- teur et le courant moderniste. F.N.H. : Quel est votre avis sur l’expé- rience des jugements à distance ? M. S. : Le système des jugements à distance a été dicté par des considérations sanitaires extrêmes. Mais, juridiquement, il est illégal. En France, la Cour suprême a, dans une décision, estimé qu’ils sont non conformes à la loi. Au Maroc, il n’y a aucun texte de loi qui l’encadre. Il s’agit d’un simple décret du gouvernement, établi en concertation avec l’Association des Ordres des avocats au Maroc, afin d’assurer la continuité de la Justice et d’éviter de longues périodes de détention préventive. La présence physique devant le juge est la règle et non l’exception. Cela permet au détenu d’échanger et d’être accompagné par son avocat. Le pouvoir discrétionnaire du juge est profondément impacté s’il n’a pas tous les éléments. ◆
Le Maroc est un Etat musulman. Il existe des principes indiscutables, mais il faut toutefois s’adapter avec l’évolution de la société marocaine et de son envi- ronnement aussi bien national ou international.
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