ECONOMIE
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 13 NOVEMBRE 2025
organisme sous sa tutelle qui se rejettent la balle.
Et la jeunesse dans tout ça ? L’affaire aurait pu rester un simple désaccord technique si elle ne touchait pas à un secteur aussi stratégique que la forma- tion professionnelle, au cœur du projet royal de modernisation du capital humain. Car derrière les tensions bureaucratiques, c’est le fonctionnement même du programme des Cités des Métiers et des Compétences (CMC) qui s’en trouve ralenti. Ces structures, voulues par le Roi Mohammed VI, incarnent l’ambition d’un Maroc formant des jeunes compétents, adap- tés aux besoins de l’économie moderne. Le communiqué de l’OFPPT révèle que le programme des CMC a connu «14 mois d’in- terruption, faute de réunion du comité de pilotage» . Ce n’est qu’après l’intervention directe de la Primature et du ministère des Finances que le projet a repris, permettant l’ouverture de nouvelles Cités à Dakhla-Oued Eddahab, Marrakech-Safi et Guelmim-Oued Noun. Sans ces arbitrages au sommet, la dyna- mique aurait pu s’enliser. Comment ne pas voir dans cette situation un paradoxe ? La feuille de route pour la formation pro- fessionnelle a été présentée en grande pompe en 2019, et devait constituer l’un des leviers majeurs de l’insertion des jeunes et de la compétitivité des entre- prises. Alors que le Maroc y investit massivement, les que- relles administratives risquent d’en neutraliser les effets et d’impacter les chances de mil- liers de jeunes d’intégrer le mar- ché du travail. Le Roi lui-même n’a cessé de souligner la centralité de ce chantier. «Je ne me lasserai jamais de mettre en avant le rôle de la formation professionnelle, du travail manuel dans l’insertion des jeunes», a-t-il déclaré dans son discours du 20 août 2019. Et d’ajouter que «la promotion de la formation professionnelle est désormais une nécessité impé-
Selon l’OFPPT, le programme des CMC a connu «14 mois d’interruption, faute de réunion du comité de pilotage».
Formation professionnelle Vacarme bureaucratique ! I Le torchon brûle entre l’OFPPT et le ministère de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences. Au centre de la discorde, la gestion des bourses attribuées aux stagiaires. Au-delà, se posent la cohérence et l’efficacité du pilotage des politiques publiques en matière de formation professionnelle. Par F. Ouriaghli
l est des tensions administra- tives qui, à force de non-dits et de communiqués feutrés, finissent par éclabousser l’effi- cacité de l’action publique. Celle qui oppose aujourd’hui Loubna Tricha, Directrice générale de l’Office de la formation profes- sionnelle et de la promotion du travail (OFPPT), à son ministre de tutelle, Younes Sekkouri, en est l’illustration parfaite. Motif du différend : la gestion des bourses attribuées aux stagiaires. En effet, le 8 novembre, un com- muniqué au ton inhabituelle- ment ferme de l’OFPPT a jeté un pavé dans la mare. L’institution publique y exprime sa «grande stupéfaction» face aux décla- rations du ministre, qui l’aurait accusée de retards dans la ges-
tion des bourses et promettait un «profond réajustement admi- nistratif». Tricha réplique alors point par point, chiffres à l’ap- pui : « (…) Entre 2018 et 2022, un écart financier significatif a été constaté entre les transferts prévus et les montants effec- tivement versés, ce qui a créé une forte pression financière sur l’OFPPT. L’Office a dû mobiliser ses res- sources propres pour garan- tir la continuité du versement des bourses aux stagiaires». En outre, entre 2017 et 2025, au total 968 millions de dirhams ont été versés aux stagiaires, dont 296 millions, soit environ 30%, prélevés sur les ressources propres de l’OFPPT. L’Office, dit-elle, a comblé les retards de
financement d’un ministère sou- vent lent à transférer les crédits budgétaires et à valider les listes de bénéficiaires. Dans ce cadre, poursuit-elle, «pour l’exercice 2025, bien que le Conseil d’ad- ministration ait validé le budget en avril, l’OFPPT n’a reçu aucun versement avant le 7 novembre, soit un retard de quatre mois, sur un montant global de 500 millions de dirhams destiné à exécuter le programme annuel de l’Office, estimé à 1,5 milliard de dirhams». Le ton est poli, mais le message limpide : si dysfonctionnements il y a, ils viennent d’en haut, pas d’en bas. En creux, c’est tout un modèle de gouvernance administrative qui est mise à mal, avec un ministère et un
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