FNH N° 1178

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FINANCES NEWS HEBDO / JEUDI 26 DÉCEMBRE 2024

POLITIQUE

opposée à sa politique. Pour évi- ter que ce scénario ne se repro- duise, il faudra à François Bayrou gagner la confiance d’une partie importante des parlementaires, ou pour le moins, éviter, aussi longtemps que possible, la cen- sure de sa future politique. Dans une Assemblée nationale sans majorité, quelles stratégies Bayrou pourrait-il adopter pour négocier l’adoption du Budget 2025 ? Quelles concessions ou alliances pourraient être nécessaires pour assurer la stabilité politique et économique ? F.N.H. : Me A. D. : Avec une Assemblée aussi divisée, et particulièrement mobilisée contre le Président de la République, le nouveau Premier ministre devra faire preuve d’habi- leté, d’un grand sens de l’écoute, et surtout reporter à plus tard les questions qui fâchent : la loi sur l’immigration portée par le ministre de l’Intérieur, l’abrogation de la loi sur les retraites, les financements liés au réchauffement climatique, etc. Pour le budget, il y a très peu de chance qu’il puisse disposer d’une majorité pour son adoption, mais il pourra toujours utiliser le 49-3 pour le faire adopter. Ce qui ne devrait pas conduire à une nouvelle motion censure, notam- ment du fait que François Bayrou a toujours entretenu de très bonnes relations avec l’extrême droite de Marine Le Pen, seule force susceptible de s’associer à LFI pour le faire tomber. Dans tous les cas, le nouveau Premier ministre connait parfaitement les limites de l’exercice, et sait éga- lement combien son maintien à la tête du prochain gouvernement restera étroitement lié à une acti- vité limitée, sans éclat, ni réforme, mais essentiellement dédiée à la gestion financière et administra- tive du pays. En quelque sorte, le traitement des affaires courantes jusqu’aux prochaines échéances électorales.

dans la gouvernance d’Em- manuel Macron ? Pensez- vous que le Premier ministre pourra asseoir une légitimi- té suffisante pour mener à bien les réformes prévues ? Me A. D. : C’est difficile de dire que cette nomination représente un tournant politique, dans la mesure où François Bayrou a tou- jours soutenu Emmanuel Macron et qu’il a toujours adhéré à son programme. Enfin, son parti le Modem a systématiquement eu des ministres dans les précédents gouvernements de la Macronie. François Bayrou à Matignon, c’est une forme de continuité dans un changement qui n’en est pas un ! Il bénéficie d’une conjoncture politique instable et chaotique, qui lui permet de devenir oppor- tunément le Premier ministre de la France, et d’assouvir enfin, un rêve longtemps inespéré. Il n’en demeure pas moins que ses premiers pas dans la fonction de Premier ministre montre com- bien l’homme parait peu préparé pour un tel poste… F.N.H. : Quel impact la nomination de François Bayrou au poste de Premier ministre pourrait-elle avoir

sur les relations diploma- tiques entre la France et le Maroc ? Me A. D. : Concernant la charge des relations internationales, elle restera, sans aucun doute, le domaine réservé du Président de la République Emmanuel Macron. On peut en conséquence légi- timement penser que François Bayrou, ni aucun autre ministre de ce nouveau gouvernement ne viendra s'ingérer dans les rela- tions entre les deux pays. La coo- pération lancée il y a deux mois avec le Maroc va naturellement se poursuivre et probablement s’intensifier. F.N.H. : Pensez-vous que l’arrivée de François Bayrou à Matignon pourrait entraî- ner un changement dans la politique étrangère de la France vis-à-vis des enjeux géopolitiques au Maghreb, et plus particulièrement du Maroc ? Me A. D. : S’agissant des rela-

tions avec les États étrangers, encore une fois domaine réservé du Président de la République, il est évident que François Bayrou aura tellement à faire avec les problèmes intérieurs de la France, notamment la gestion quotidienne des difficultés éco- nomiques, financières et poli- tiques qu’il ne cherchera pas à s’immiscer, ni à interférer dans les relations entre notre pays et le Maroc. Faut-il le rappeler, Bayrou est très peu connu à l’international, c’est un homme de l’intérieur, il n’a pas vraiment d’histoire dans le domaine diplo- matique. Depuis la visite offi- cielle d’Emmanuel Macron au Maroc il y a deux mois, et les nombreux accords signés, il est évident que la France souhaite que le Maroc devienne l’un de ses partenaires privilégiés sur le continent africain. C’est pour- quoi je pense, qu’en préalable à cette rencontre et à ce dévelop- pement, le Président français a souhaité avant tout trancher la question du Sahara en faveur du Maroc. Une manière de donner des gages pour la suite, et aussi d’affirmer la volonté de la France d’être aux cotés du peuple maro- cain et de son Roi. ◆

La liste de ce gouvernement baroque, constitué de personnalités hétéroclites, disparates, me parait à l’image des débuts de Bayrou, très inquiétante.

F.N.H. : Cette nomination marque-t-elle un tournant

 Face à une Assemblée nationale particulièrement hostile, François Bayrou devra faire preuve d’habileté et d’un grand sens de l’écoute.

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