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FINANCES NEWS HEBDO
JEUDI 5 DÉCEMBRE 2024
FOCUS MEDAYS
«L’Afrique a tout pour réussir, mais elle doit raconter son propre récit» Développement économique
gouvernance publique vertueuse. Nous avons besoin de dirigeants capables d’imaginer et de mettre en œuvre des politiques publiques de qualité. Ensuite, il faut garantir la stabilité poli- tique et institutionnelle sur 10 à 15 ans, car aucun investisseur ne prendra de risques dans un environnement incer- tain. Un autre levier clé est l’éducation. La moyenne d’âge en Afrique est de 29 ans, et au Mali, mon pays, elle est de 19 ans. Il est impératif de former cette jeunesse, mais pas avec des diplômes généralistes qui mènent au chômage. Nous devons prioriser les formations techniques et professionnelles dans des métiers d’avenir comme l’électro- mécanique, l’informatique ou encore les énergies renouvelables. L’investissement dans les infrastruc- tures économiques est également cru- cial. Oui, la route ne se mange pas, mais elle permet de manger. Une route ouvre des débouchés pour les produc- teurs locaux, leur permettant d’écouler leur surplus et d’augmenter leur pro- duction. Malheureusement, alors qu’il faudrait investir 150 milliards de dollars par an en infrastructures, nous n’en investissons que 30 milliards. Enfin, il faut régler le problème du finan- cement. Les besoins sont en Afrique, mais le capital est dans les pays du Nord. Nous devons trouver des méca- nismes pour attirer ces fonds. F.N.H. : L’intégration régionale est tout au long de ce forum citée comme une solution. Pensez-vous que l’Afrique peut devenir un marché unique ? M. B. : Absolument ! C’est non seule- ment possible, mais indispensable. Les 54 pays africains, pris individuellement, ne sont pas viables économiquement. Prenez le Mali, le Sénégal ou le Togo :
Entre potentiel inexploité et défis structurels, l’Afrique est à un tournant de son développement. Mossadek Bali, président du patronat malien et PDG de la chaîne Azalaï Hôtel, revient sur les opportunités offertes par le continent, les obstacles à surmonter et les leviers indispensables pour transformer cette richesse en une croissance inclusive et durable. Propos recueillis par Désy M.
Finances News Hebdo : Le panel auquel vous avez participé por- tait sur le thème «L'Afrique émergente : une nouvelle ère d'opportunités de croissance». Selon vous, quelles sont ces opportunités pour l’Afrique et comment peut-elle en tirer parti pour se positionner sur l’échi- quier mondial ? Mossadek Bali : L’Afrique est le conti- nent qui a le plus grand potentiel de développement au monde. C’est le seul
qui n’a pas encore réellement amorcé son développement. Avec une popu- lation de 1,5 milliard aujourd’hui et 2,5 milliards dans 25 ans, majoritairement jeune, le continent représente une force de travail et un marché de consomma- teurs énormes. De plus, l’Afrique possède 60% des terres arables mondiales et tous les minéraux critiques nécessaires à la transition énergétique. Malgré cela, nous importons encore massivement notre alimentation, ce qui est aberrant. Par exemple, pendant la guerre en Ukraine, plusieurs chefs d’État afri- cains ont dû négocier avec Kiev pour garantir leurs approvisionnements en blé. C’est inadmissible qu’un continent aussi riche en terres fertiles dépende autant de l’extérieur. Le défi majeur réside donc dans la trans- formation de ce potentiel. Plusieurs questions se posent dans les différents cercles de réflexions, à savoir comment faire pour que l’Afrique ne soit plus le continent de l’obscurité, avec 600 millions de personnes sans accès à l’électricité ? Comment relier les pays par des routes et des infrastructures, pour que l’on puisse voyager du nord au sud sans quitter le continent? Et surtout, comment offrir un avenir à nos jeunes, pour qu’ils ne risquent plus leur vie en traversant le désert ou la Méditerranée? Pour y répondre, j’ai dit dans mon inter- vention que tout commence par une
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