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FINANCES NEWS HEBDO MARDI 29 JUILLET 2025
Réforme du CNP
Bensaid esquive le guet-apens politique
Par D. William Q uand un ministre touche à la presse, il marche sur des œufs. Quand il réforme son organe d’autorégulation, il égratigne des sensibilités. Et quand il le fait dans un contexte de muta- tion, c’est un petit miracle politique. Mohamed Mehdi Bensaid, ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, vient de réaliser ce tour de force avec l’adoption, par la Chambre des représentants, du projet de loi n°026.25 portant réorganisation du Conseil national de la presse (CNP). Et autant dire les choses clairement : ce n’est pas tous les jours qu’un ministre choisit la tempête plutôt que la tranquillité.
témoigne d’une volonté d’écoute réelle. Et le nombre d’amendements montre, tout autant, qu’il y avait à dire à propos de ce texte, notam- ment en ce qui concerne le mode de désigna- tion des membres du CNP. En effet, les journalistes seront élus, mais les éditeurs, eux, seront désignés. Un choix qui n’a pas plu à l’opposition, qui y voit une atteinte au principe démocratique. «L’élection est la forme la plus noble de l’exercice démocratique» , ont plaidé les députés critiques, redoutant un retour en arrière. Mais Bensaid a assumé. «Le choix de l’élec- tion pour les journalistes professionnels et de la désignation pour les éditeurs est dicté par la nature de ces deux catégories» , a-t-il expli- qué, ajoutant que cette désignation repose sur une logique de «représentation fondée sur le consensus» . Cette position, courageuse dans un contexte aussi sensible, rappelle une vérité que beau- coup aimeraient oublier : la démocratie, en matière de gouvernance sectorielle, consiste à toujours trouver le bon équilibre. Bref, à l’heure où certains médias sombrent dans le sensationnalisme pour survivre et où d’autres se battent pour exister face aux géants du web, la consolidation du CNP apparaît comme une réponse structurante. Et même si l’opposition et certains observateurs sont critiques, il est difficile de nier la cohérence globale du projet, qui doit atterrir par la suite à la Chambre des conseillers. En attendant, Bensaid semble avoir réussi son pari, en esquivant ce qui s’apparentait à un guet-apens politique, avec notamment une presse marocaine parfois ombrageuse, une classe politique toujours en alerte quand il s’agit de liberté d’expression et des ONG internationales promptes à dégainer leur clas- sement. Bien sûr, tout n’est pas parfait. On peut légiti- mement continuer à s’interroger sur le traite- ment différencié entre journalistes et éditeurs. Sur le rôle futur du CNP dans la lutte contre la désinformation. Ou encore sur sa capacité à accompagner une transition numérique encore balbutiante. Mais on ne peut pas, honnête- ment, balayer d’un revers de main ce travail de refonte. Il fallait le faire. Il fallait oser. Et il l’a fait. ◆
nantes du secteur, puisqu’il est né de la concer- tation et du dialogue avec les profession- nels, répond aux défis structurels du secteur: lectorat en chute libre, érosion des recettes publicitaires, modèle économique en panne, émergence des réseaux sociaux et difficulté d’adaptation au numérique. C’est pourquoi les choses ont été réorganisées en profondeur. Le texte prévoit ainsi la création d’une commis- sion indépendante pour superviser les élections professionnelles. Il met également à jour les dispositifs de médiation et d’arbitrage, accorde une meilleure lisibilité aux procédures discipli- naires et corrige certaines dispositions jugées liberticides, à l’image de la suppression de la suspension pouvant frapper un journal pour trente jours. Là encore, Bensaid a tenu à replacer la réforme dans son contexte : «ce texte vise à parvenir à un équilibre entre la liberté de la presse et la nécessité de respecter les règles profession- nelles et déontologiques» , ajoutant qu’ «il reflète une compréhension approfondie que la liberté de la presse, garantie par la Constitution, ne peut être réalisée que par les mécanismes d'autorégulation». 45 amendements retenus Durant son parcours législatif, ce projet de loi a cependant su évoluer. En effet, sur les 249 amendements déposés, 45 ont été retenus. Cette souplesse dans le débat parlementaire oui , je souhaite m’abonner à cette offre spéciale pour 1 an BULLETIN D’ABONNEMENT Mon abonnement comprend : ❑ 48 numéros Finances News hebdo & 2 numéros du Hors-série. Voici mes coordonnées : ❑ M ❑ Mme ❑ Mlle Nom/Prénom : ................................................................................... Adresse : ............................................................................................ Ville : ............................. Code Postal : ............................................ Tél : ........................................ Fax : ................................................. E-mail : ............................................................................................. Mon règlement ci-joint par : ❑ Chèque bancaire ou virement bancaire à l’ordre de JMA Conseil : Banque Populaire, Agence Abdelmoumen, Compte N° 21211 580 5678 0006-Casablanca - (Maroc)
A l’origine de cette réforme, un constat sans appel : le cadre juridique issu de la loi 90.13 pro- mulguée en 2016 avait montré ses limites avec, entre autres, les difficultés des commissions Ethique & Déontologie et Médiation & Arbitrage à s’acquitter correctement de leurs missions, ou encore le flou sur le mode de scrutin et l’autorité devant superviser les élections des membres du CNP. Bref, une belle architecture institutionnelle, mais des fondations fragiles. Il fallait reprendre le chantier, et Bensaid n’a pas hésité. «Il ne s'agit pas d’un simple nouveau texte législatif, mais d'une étape cruciale dans le processus de modernisation et de dévelop- pement du paysage médiatique», a-t-il souligné devant les députés. Ce projet de loi, qui s’appuie sur une approche participative saluée par toutes les parties pre-
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