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SOCIÉTÉ
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JEUDI 29 DÉCEMBRE 2022
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du plan national multisectoriel pour la santé mentale intervient à un moment où «se met en place la refonte du système de santé pour nous préparer au projet royal et historique de la couverture sanitaire universelle (CSU), qu’on peut résumer en «Une santé pour tous». Ce pro- jet constitue une rupture avec «la santé à deux vitesses» qui avait toujours prévalu, et dans ce cadre, la santé mentale ne pourrait être occultée». Belaïche estime que le défi pour le ministre de la Santé est aussi grand que complexe, au vu des nombreuses actions à mener. «D’abord, il y a le manque de ressources humaines, la néces- sité de mise à niveau des struc- tures dédiées à la santé mentale, la mise à niveau de la législation devenue désuète et inadaptée. En effet, le dahir n°1-58-295 du 30 avril 1959 relatif à «la prévention et au traitement des maladies mentales et à la pro- tection des malades mentaux» n’a pas évolué depuis…63 ans. Ensuite, vient la sensibilisation de la population sur les maladies mentales et la lutte contre la stigmatisation et l’exclusion des personnes atteintes qui seront également nécessaires, sans compter un accès facilité aux traitements et aux hospitalisa- tions» , a-t-il noté. Même son de cloche chez Hafsa Abouelfaraj, psychiatre et psy- chothérapeute, qui explique que «tout programme national de santé mentale a pour but de pré- venir et combattre les troubles mentaux et psychosociaux, et de contribuer ainsi à l’amélio- ration de la qualité de vie et la productivité de l’ensemble de la population. Cela passe notam- ment par l’instauration d’une organisation de soins adaptée à la situation de la santé mentale au Maroc, principalement dans le sens de renforcer la préven- tion et en mettant en place des mécanismes de réhabilitation et des programmes de communi- cation pour l’éducation sanitaire des citoyens en termes de santé mentale».
En 2021, le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) a dénoncé dans son rapport annuel la répartition géogra- phique inéquitable des hôpitaux de santé mentale marocains, dressant le constat selon lequel la majorité de ces établissements était située dans les grandes villes, notamment Casablanca, Rabat et Marrakech. Une réalité qui faisait remonter à la surface l’inégalité d’accès aux soins sur le territoire national. Heureusement, la déclaration du CNDH n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Le ministre de la Santé a annoncé le 19 décembre la poursuite de la mise en place des services psy- chiatriques intégrés dans les hôpitaux publics, la construc- tion et l'équipement de 3 hôpi- taux de santé mentale à Agadir, Kénitra et Béni-Mellal, avec 120 lits chacun, ainsi que la recons- truction de l'hôpital psychia- trique de Berrechid. En revanche, Abdelmajid Belaïche affirme que tous les services psychiatriques ne se valent pas. Selon lui, l’hôpital Arrazi reste un modèle et une exception. Quant aux cliniques privées, «elles constituent, dans leur majorité, d’excellents modèles, mais sont malheu- reusement inaccessibles pour la majorité des patients maro- cains» , indique-t-il. Il rappelle, à ce titre, le coût très élevé d’une journée d’hospitalisation nécessaire aussi bien dans une structure publique que privée et qui est de 2.000 à 3.000 dirhams par jour, au vu des besoins d’ac- compagnement par différentes autres spécialités médicales ou non médicales. « Malheureusement, le ministère de la Santé avait par le passé consacré très peu de moyens aux services et centres psy- chiatriques, et notre pays avait occulté le champ du charlata- nisme qui s’était érigé en un véritable système informel de psychiatrie. Heureusement, Pr Louardi, ex-ministre de la Santé, avait mis fin à la scan- daleuse affaire de Bouya Omar.
Khalid Ait Taleb, ministre de la Santé et de la Protection sociale, a annoncé la construction et l'équi- pement de 3 hôpitaux de santé mentale à Agadir, Kénitra et Béni-Mellal.
Cette affaire avait révélé aux Marocains dans quelles condi- tions indignes et inhumaines étaient internées des personnes réellement atteintes de maladies mentales ou tout simplement de personnes dont certaines familles voulaient se débarras- ser souvent pour des raisons liées à l’héritage» , a-t-il regretté. Et d’ajouter : «ces structures informelles, en majorité concen- trées au village de Bouya Omar dans la région de Kelâa Sraghna, étaient malheureuse- ment là pour remplir un vide sidéral en matière de prise en charge des cas psychiatriques dans les hôpitaux publics. La formation des médecins spé- cialistes en psychiatrie et d’infir- miers spécialisés était aussi le parent pauvre des formations médicales». Rappelons que l’ex-ministre de la Santé, Houcine Louardi, a ini- tié le 11 juin 2015 l’opération «Al Karama », qui signifie littérale- ment dignité, avec pour objectif d’évacuer le mausolée Bouya Omar et libérer ainsi les 822 pensionnaires qui y subissaient un traitement tout sauf humain. Parmi les lacunes relevées dans le domaine de la santé men- tale, figure le manque criant de ressources humaines spéciali- sées. «Effectifs très faibles avec un rythme de formation très lent, ceci est inquiétant pour l’avenir de notre santé mentale. Comment peut-on satisfaire
les besoins de 37 millions de Marocains, dont la moitié des adultes est atteinte de maladies mentales, soit près de 12 mil- lions et demi de citoyens, avec des effectifs de professions médicales spécialisées et para- médicales aussi faibles. Nous comptons seulement 1 médecin pour 100.000 habitants, alors que la moyenne mondiale est de 1,7 et celle européenne est de 9,7», s’insurge Belaiche. Pour sa part, Hafsa Abouelfaraj explique la rareté des effectifs dans le domaine de la santé mentale par le désintérêt des futurs médecins envers cette spécialité. « Malgré l’évolution et les progrès qu’a connus la psy- chiatrie grâce à l’avènement des nouvelles technologies et des découvertes en pharmacologie, psychothérapie, neurobiologie, neuro-imagerie et en génétique, le psychiatre et sa profession font toujours l’objet d’un regard péjoratif de la part du grand public, y compris les profession- nels de santé. Ces derniers, qui sont les plus proches du psy- chiatre et de la psychiatrie et qui travaillent en collaboration avec ceux-ci, nourrissent eux aussi ces préjugés et les transmettent fidèlement entre collègues et futurs collègues, aboutissant à une stigmatisation de la psy- chiatrie et des psychiatres. Ceci ne motive certainement pas les jeunes médecins pour choisir cette spécialité» , conclut-elle. ◆
Tout pro- gramme national de
santé mentale a pour but de prévenir les troubles mentaux et de contribuer ainsi à l’amé- lioration de la qualité de vie et la pro- ductivité de l’ensemble de la population.
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