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FINANCES NEWS HEBDO
JEUDI 15 MAI 2025
FOCUS DEEPTECH SUMMIT
Yassine Laghzioui, Directeur général de UM6P Ventures et directeur de l’Entrepreneu- riat et du capital-risque d’UM6P, revient sur la place grandissante de l’intelligence artificielle dans la DeepTech et les atouts stratégiques de l’Afrique. Les ambitions africaines Intelligence artificielle
moins risqués. Le capital-risque connaît donc une baisse, et l’Afrique n’échappe pas à cette tendance. Cela dit, au Maroc, on observe une évolution positive : en 3 à 4 ans, les montants investis ont été multipliés par trois. C’est un signal fort de confiance envers les startups marocaines. On note également un intérêt croissant pour le potentiel de l’Afrique dans la DeepTech et la Shallow Tech, dans des secteurs diversi- fiés. Des fonds régionaux et internationaux commencent à s’installer sur le continent. Grâce à la qualité des talents et au dyna- misme entrepreneurial, notamment à l’UM6P, nous voyons naître les premières histoires de succès. Celles-ci seront les fondations d’un écosystème plus mature. F.N.H : L’une des nouveautés de cette édition est le concept de pitch inversé. Est-ce un moyen d’inciter les investis- seurs à formuler leurs besoins auprès des startups ? Le Maroc dispose-t-il du capital humain et des ressources nécessaires pour y répondre ? Y. L. : Oui, c’est une innovation importante. Certains entrepreneurs, notamment ceux qui ont atteint ou approchent le «product-market fit», peuvent aujourd’hui choisir leurs inves- tisseurs. Dans ce contexte, on leur présente des industriels et des fonds d’investissement susceptibles de leur correspondre. L’idée est de renverser les rôles : ce sont les investisseurs qui doivent démontrer la perti- nence de leur offre, au-delà de l’argent. Car dans le capital-risque, l’argent a bel et bien une odeur : celle de l’accompagnement, du réseau, du soutien opérationnel. Ce modèle permet aux startups de collaborer avec des investisseurs ou des industriels capables d’accélérer leur développement, de mâturer leurs produits ou d’ouvrir de nouveaux mar- chés. F.N.H : A quoi s’attendre des conven- tions qui ont été signées cette année et quels sont les objectifs visés ? Y. L. : Ce que je peux vous dire, c’est que plusieurs conventions ont été signées avec des fonds de capital-risque locaux et interna- tionaux, ainsi qu’avec des entreprises souhai- tant développer des programmes d’innova- tion ou lancer des projets de recherche et de maturation technologique. Il ne s’agit pas de simples déclarations d’intention. Ce sont des accords concrets, orientés vers l’action, qui visent à tirer parti de la dyna- mique autour de la DeepTech, de la R&D, ici au Maroc, et plus largement en Afrique. ◆
Propos recueillis par Désy M.
Finances News Hebdo : Quel est l’objectif poursuivi par l’UM6P en axant la 2 ème édition du DeepTech Summit 2025 sur l’apport de l’IA dans un secteur déjà complexe qu’est la DeepTech ? Yassine Laghzioui : Il ne s’agit pas sim- plement d’ajouter l’IA à la DeepTech pour complexifier les choses, loin de là. Ce que nous avons observé au cours des derniers mois, c’est que l’intelligence artificielle est devenue le dénominateur commun à toutes les verticales de la DeepTech. Elle transforme en profondeur notre manière de conduire la recherche scientifique, de faire mûrir les pro- duits technologiques et d’optimiser leur cycle de développement. Depuis l’émergence de modèles comme ChatGPT, des avancées spectaculaires ont été enregistrées : par exemple, dans la modé- lisation des protéines et de leurs interactions avec certaines molécules thérapeutiques. Cela bouleverse les méthodes traditionnelles de recherche, notamment dans la découverte de nouveaux traitements. Il devenait donc indispensable d’intégrer cette dimension à notre sommet. L’IA est aujourd’hui au cœur de la réinvention de la recherche scientifique appliquée et du développement de solutions technologiques de pointe. F.N.H : Une phrase forte a marqué cette édition : «De l’Afrique vers le monde». Dans ce croisement entre DeepTech et IA, que peut apporter l’Afrique ? Quelle est sa valeur ajoutée ? Y. L. : L’Afrique dispose de nombreux atouts. D’abord, un marché immense de 1,4 milliard d’habitants, un espace idéal pour tester des solutions, les faire évoluer à grande échelle et générer des opportunités économiques. Certes, ce marché reste fragmenté, mais le potentiel est réel. Ensuite, il y a le talent. Alors que les pyra-
mides démographiques s’inversent ailleurs, l’Afrique reste jeune. En 2035, nous serons plus de 2 milliards sur le continent. Ce vivier humain constitue le carburant nécessaire au développement de technologies innovantes et d’entreprises disruptives. Enfin, la diaspora africaine joue un rôle clé. Lorsqu’on lui donne les moyens, notamment les infrastructures, l’encadrement et le finan- cement, elle démontre une capacité remar- quable à innover. Des talents africains créent des licornes, mènent des recherches dans les meilleurs laboratoires mondiaux, et veulent désormais contribuer à l’essor d’un écosys- tème DeepTech sur le continent. F.N.H : En 2022, le secteur de la DeepTech ne représentait que 3,5% des investissements en capital-risque captés par l’Afrique. En 2025, constate- t-on une amélioration ? Et Comment l’IA peut-elle contribuer à débloquer les freins et réduire les risques autour de la DeepTech ? Y. L. : À l’échelle mondiale, les investis- seurs se tournent actuellement vers des actifs
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