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ECONOMIE
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VENDREDI 29 JUILLET 2022
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Stress hydrique
Ne plus regarder ailleurs… N ous y voilà ! En plein stress hydrique ! C'était prévisible depuis des lustres, mais rien n'y fait : il faut faire face, faute d'avoir anticipé ce que les spé- Par Mustapha SEHIMI Professeur de droit, Politologue
cialistes avaient redouté depuis plus de deux décennies. Quelques mesurettes à l'occasion, mais pas de véritable stratégie. Ainsi vont donc les politiques depuis le début des années 2000. L'eau ! Une ressource vitale évidemment. Mais qui accuse une raréfaction continue. Vulnérable aussi à la pollution. Voici plus de trois ans, l’Institut Royal d'études stra- tégiques (IRES) avait pourtant tiré la son- nette d'alarme dans un rapport circonstan- cié de quelque 170 pages. Et après, dira-t- on ? Pratiquement rien, pas grand-chose en tout cas. Globalement, le Maroc est semi-aride avec une déclinaison variable et une moyenne de 400/600 mm au plus. Une grande variabilité interannuelle tour- nant autour de quelques milliards de m 3 . La ventilation est la suivante : un potentiel de 18 milliards de m 3 / an pour les eaux superficielles et de 4 milliards pour les eaux souterraines. De fortes contraintes natu- relles pèsent sur ces ressources : les unes sont spatiales et temporelles; d'autres sont liées à la fréquence des années de séche- resse; à la vulnérabilité aux inondations (plus de 400 sites identifiés); à l’érosion des sols et l'envasement des retenues des barrages (12% environ); sans oublier les menaces sur les zones sensibles et les systèmes fragiles. Dans un autre cha- pitre, il vaut de relever les contraintes dites anthropiques, celles liées aux humains et à leur mode de vie : surexploitation des ressources en eau souterraines, pollution. Quant à la demande globale en eau, elle se présente comme suit : 10% environ d'eau potable, industrielle et touristique et 90% pour l'agriculture. Aujourd'hui, elle est esti- mée à 18 milliards de m 3 . Il faut aussi évoquer la question du chan- gement climatique et son impact sur les ressources en eau. Les sécheresses
deviennent de plus en plus fréquentes; il y aurait même des cycles de trois ou quatre ans selon les climatologues. Les niveaux des nappes accusent une baisse sensible et continue; le taux de remplissage des bar- rages en pâtit. De même, les inondations se multiplient et causent de grands dégâts (routes, ponts, habitations, agriculture,...). Enfin, l'on observe une baisse du potentiel couplé à la raréfaction des ressources. Tel est le cas dans les bassins suivants : Oum Er Rbia, Souss - Massa, Tensift, Moulouya, Sebou,... Si bien que le capital eau/habi- tant/an, qui était de 3.650m 3 /an/habitant en 1960, a chuté à 1.000 en 2.000, puis à moins de 700 en 2022. Préoccupant : il est l'un des plus faibles au monde, dans le lot des vingt pays les plus menacés par le stress hydrique. Une tendance soutenue par le réchauffement climatique, la baisse de la pluviométrie et, partant, des res- sources en eau. Quelle stratégie ? Que faire alors pour relever tous ces défis ? Une stratégie de l'eau a bien été présentée à SM le Roi, à Fès, voici plus d'une dizaine d'années – le 14 avril 2009. Quels axes stratégiques ont été alors retenus ? Le pre-
mier a trait à la gestion de la demande et à la valorisation de l'eau. Il s'agit des pro- grammes suivants : reconversion à l'irriga- tion localisée, amélioration des rendements des réseaux d'adductions vers les péri- mètres irrigués, tarification volumétrique, techniques d'économie d’eau chez les agri- culteurs. Il faut y ajouter, dans le domaine de l’eau potable, industrielle et touris- tique un potentiel d'économie : rendement des réseaux avec une moyenne nationale de 80%, recours aux technologies appro- priées, révision du système tarifaire... Le deuxième axe regarde, lui, la gestion et le développement de l'offre : poursuite de la réalisation de grands barrages, transfert Nord-Sud entre les bassins excédentaires vers ceux qui sont déficitaires, programme de petits et de moyens barrages, dévelop- pement de la mobilisation des ressources non conventionnelles, dessalement d'eau de mer, collecte des eaux pluviales, réu- tilisation des eaux usées épurées... Le troisième axe concerne la préservation et la protection des ressources en eau, du milieu naturel et des zones fragiles : lutte contre la pollution, sauvegarde et recons- titution des nappes ainsi que des bassins versants, des oasis et des zones humides.
Toute une économie industrielle est ainsi à
prioriser pour arriver à rete- nir des activi- tés à contenu élevé en main- d’œuvre qualifiée.
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