COLLECTIVITÉ
DE L’ART POUR TOUS
FRANÇOIS JOBIN frs.jobin@vl.videotron.on.ca
La salle commune de l’Office régional d’habitation Argenteuil (ORHA) s’orne désormais d’une murale colorée qui confère au lieu un petit air pimpant. Produit d’une réflexion collective à l’initia- tive de Mélissa Desmarais, la conception de l’œuvre a été confiée à Sophie-Stella Boivin, de Brownsburg-Chatham, et réalisée par un groupe de résidents. Elle a été inaugurée le 12 mai dernier dans la salle commune de cet organisme qui assure la gestion des logements sociaux. Mélissa Desmarais est une étudiante du cégep de Saint-Jérôme en Technique de travail social qui effectue son stage d’intervenante à l’ORH. On pense généra- lement que les stagiaires en entreprise se contentent d’observer, mais l’observation n’exclut pas les initiatives. Dynamique et entreprenante, Mélissa a eu l’idée d’embellir la salle communautaire de l’OHR. Comme elle avait déjà rencontré Sophie-Stella Boivin lors de son passage au Carrefour jeunesse- emploi, elle a spontanément a pensé à la création d’une murale, idée qui a été accepté avec enthousiasme par l’Association de locataires. Il n’a pas été difficile d’établir la struc- ture de financement, toutes les instances sollicitées ayant accepté de participer à l’aventure; la MRC d’Argenteuil dans le cadre de son Entente de développement culturel, la députée Agnès Grondin ainsi que le gouvernement du Québec ont contribué financièrement à la réalisation de l’œuvre. Sophie-Stella Boivin est bien connue dans la région. Formée en arts et en graphisme au cégep, elle est parvenue en quelques années à faire de la murale communautaire sa spécialité, ce qui l’a amené à travailler un peu partout dans la province y compris dans le grand Nord. Au début de sa carrière, elle effectuait des contrats privés, genre chambres d’enfants, et participait comme exécutante à des projets de murales publiques, Un jour , un camarade de travail lui suggéra de créer sa propre entreprise, ce qu’elle fit. Pendant 10 ans, elle travailla à Montréal partageant son temps entre murales et travaux de graphisme qui lui permettaient de gagner sa vie. Petit à petit, le graphisme céda la place au profit des murales qui sont devenues sa principale activité avec son travail de peintre d’atelier. Sophie-Stella Boivin aborde la murale en fonction de la communauté. Ce qui l’intéresse, c’est le travail d’équipe «avec des gens qui ont des choses à dire» parce que cela permet de rendre l’art accessible à un plus grand nombre. C’est la raison pour laquelle elle a choisi la murale. C’est
Sophie-Stella Boivin a mené le projet d’une grand murale dans la salle commune de l’Office régional d’Habitation d’Argenteuil (ORHA).- photo François Jobin
dire qu’elle se met au service du groupe qui l’engage pour réaliser les idées ou le message qu’il entend transmettre. Elle se considère comme un instrument entre les mains de ses employeurs, «c’est leur message que je porte; le mien, je le réserve pour mes œuvres». Tout commence donc par une séance de remue-méninge. Chaque membre du groupe énonce les idées ou les thèmes qu’il veut voir apparaître dans l’œuvre. Muni de cette feuille de route, Sophie-Stella élabore un pre- mier croquis qu’elle soumet au groupe. Elle se réserve le privilège d’éliminer certaines idées qui ont été émises, soit par ce qu’elles sont difficiles à traduire visuellement, soit parce qu’il y en a trop, ce qui arrive parfois dit la principale intéressée. En plénière, le croquis est discuté, modifié, revu et corrigé.
On prend aussi des photos d’objets ou de personnes que l’on veut voir figurer dans la murale. Puis Sophie reproduit le dessin retenu sur le mur et invite les participants à le peindre. Bien qu’elle n’aime pas le terme, c’est un peu le principe de la pein- ture à numéros… sans numéro. Chacun peut exprimer sa créativité par le choix des couleurs et des textures. Sophie-Stella privilégie les couleurs vives qui accrochent l’œil et donnent une image accueillante. L’artiste n’est pas avare de conseils pour les exécutants dont c’est souvent la première incursion dans le monde de la peinture. La durée du travail dépend évidemment de la taille de la murale mais s’étend en moyenne sur un mois. La murale de l’ORH comporte plusieurs thèmes qui soulignent la présence ou l’impli- cation des locataires. Elle représente toutes les générations des plus jeunes aux plus âgés. On retrouve également un groupe multi-ethnique qui atteste de la présence
de cultures variées au sein de l’ORH. Alors que la minorité LGBTQ+ est habituellement représentée par un arc-en-ciel, on a choisi plutôt comme symbole un arbre arborant les couleurs habituelles du prisme. Il y a même le dessin d’une guitare appartenant à un des locataires qui témoigne de l’importance de la musique dans cet ensemble qui regroupe quelque 700 logements. Tout cela au sein d’une nature lumineuse qui est celle de la région d’Argenteuil. Sophie-Stella Boivin a encore de beaux projets dans son carnet de commandes. Elle a déjà exécuté récemment deux murales pour l’hôpital de Saint-Jérôme, À Montréal, on lui a demandé une murale pour la Maison des grands-parents et une autre pour l’école Léonard de Vinci. Ici, dans sa région natale, la MRC d’Argenteuil lui a commandé une œuvre sur les insectes polinisateurs des- tinée au jardin communautaire de Lachute sur la montée Robert. Tant qu’il y aura des murs… il y aura des messages à livrer.
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