le communiqué Sanctions n’a pas de valeur normative et ne saurait donc être assimilé à une loi pénale (§382). Elle estime aussi que ce communi- qué ne lui impose pas une méthode de calcul, un montant ou une four- chette particulière d’amende (§384) et qu’il lui appartient, en tout état de cause, de procéder à un examen spécifique de la sanction à retenir, à l’occasion de chaque espèce (§383). Ce raisonnement est très critiquable au regard des caractéristiques très particulières du nouveau Communi- qué Sanctions qui aboutit à l’occa- sion d’un changement de législation à une augmentation automatique des sanctions (par le doublement du coefficient par année de la pra - tique passant sur toute la période de 0,5 à 1alors que ce changement n’était pas prévisible compte tenu du choix de modération qui avait été opéré jusqu’alors en droit français d’un coefficient 1 la première année et de 0,5 pour les autres années par rapport à la pratique européenne) et les arguments mis en avant par l’Au- torité n’emportent absolument pas la conviction. Une sanction unique pour plusieurs griefs CAIRE prétendait qu’une seule et unique sanction devait être pro- noncée à son encontre, même si plusieurs griefs lui avaient été noti- fiés (§389). L’Autorité a déjà précé - demment considéré qu’une seule sanction peut être prononcée pour plusieurs griefs, en raison, d’une part, de l’objet général des pratiques et, d’autre part, de l’existence d’une certaine identité ou connexité entre les marchés en cause, identité qui pourrait avoir pour effet d’empêcher le rattachement des effets à l’une ou l’autre des infractions (§387). En l’espèce, l’Autorité estime qu’un tel lien n’existe qu’entre le grief n° 1 (ac - cord de baisse d’offre et de partage des créneaux horaires) et le grief n° 4 (fixation des prix et conditions appli - cables aux tarifs). En effet, ces deux griefs présentent de nombreux points
communs : même marché, pratiques de même nature, mêmes produits et même période infractionnelle. Pour le grief n° 2 ( échanges relatifs aux intentions tarifaires futures et prise d’engagements tarifaires réciproques sur les conditions tarifaires des billets en 2015) et le grief n° 3 (échanges relatifs aux intentions tarifaires futures et prise engagements tarifaires réciproques concernant la réintroduction des conditions de disponibilité des billets pour un achat à l’avance en 2016), l’Autorité ne retient pas cette identité/ connexité, dès lors que les pratiques ont été commises sur des périodes différentes (§392). Le découpage de griefs présentant des points communs est très inquiétant car dès lors que le plafond de l’amende d e10% du chiffre d’affaires du groupe s’applique par grief, la multiplication du nombre de griefs permet de prononcer dans l’absolu des amendes d’un montant considérable pouvant représenter dans certaines situations plusieurs fois le plafond de 10%, ce qui aboutirait à des sanctions exorbitantes, d’autant plus si l’on applique rétroactivement le nouveau communiqué Sanctions qui permet d’augmenter automatiquement le montant des amendes. Un retour à plus de proportionnalité apparaît souhaitable. • La détermination de l’assiette de sanction En l’espèce, l’Autorité avait proposé de retenir la valeur des ventes réa- lisées par CAIRE sur les lignes aé- riennes concernées (§401). CAIRE contestait l’étendue de cette assiette et estimait qu’il fallait déduire de ces ventes, le chiffre d’affaires produit par les ventes de billets par d’autres compagnies aériennes et les ventes de billets d’affaire (§402). L’Autorité rejette cet argument et considère au contraire que les pratiques mises en œuvre par Air Antilles sont suscep- tibles d’affecter l’ensemble des caté- gories de billets proposés par cette compagnie (§403). • Mise en lumière de la gravité de l’infraction L’Autorité a considéré que l’accord de baisse d’offre et de partage des cré- neaux horaires et de fixation des prix
• Application de la présomption d’influence Pour répondre à la question de l’im- putabilité des pratiques d’Air Antilles à sa société-mère, GAI, l’Autorité rap- pelle le principe selon lequel le com- portement d’une filiale peut être im - puté à sa société mère dès lors que cette dernière détient, directement ou indirectement, la totalité ou la quasi-totalité du capital du capital de la filiale (§334). Si tel n’est pas le cas, il appartient à l’Autorité de vérifier si, dans les faits, la société-mère exerce effectivement une influence détermi - nante sur la société filiale (§336). Selon l’Autorité, au regard du pour- centage que détient GAI dans Air Antilles (36%), la présomption d’im- putabilité ne saurait s’appliquer en l’espèce (§342). Cependant, l’Autori- té considère que l’instruction a bien établi l’existence d’éléments signi - ficatifs permettant de démontrer que GAI exerce bien une influence déterminante sur Air Antilles. En par- ticulier, GAI est administratrice de la société CAIRE (Air Antilles) (§345) et ces deux sociétés possèdent en commun plusieurs dirigeants et sa- lariés (§346). Ensuite, il existe des flux financiers importants entre ces deux sociétés (§349) qui, en plus, ont signé une convention de trésorerie avec les sociétés K Finance et K Fi - nance Investissement indiquant que ces sociétés se considèrent comme appartenant à un « même groupe » (§350). L’Autorité en conclut que les pratiques de CAIRE peuvent être imputés à la société GAI (§352). La décision rapportée confirme qu’il devient de plus en plus difficile voire quasiment impossible en pratique de combattre la présomption d’in- fluence. • Non-rétroactivité des dispositions pénales CAIRE contestait ensuite l’application à son égard du communiqué Sanc- tions de 2021 par l’Autorité, en raison du principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus dure et estimait que l’ancien communiqué, en date de 2011, devait lui être appliqué dans la mesure où le nouveau communiqué emporte un durcissement de la ré- pression en matière de concurrence. Cependant, l’Autorité considère que
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