Le Dictionnaire Encyclopédique de la Psychanalyse

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V. LA CONTRIBUTION FRANÇAISE

V. A. Jacques Lacan Selon Lacan, le transfert constitue l'un des quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, avec la pulsion, l'inconscient et la répétition. Son approche du transfert repose sur l'idée freudienne selon laquelle le lien avec l'analyste accueille la répétition d'une expérience originaire provenant du passé, une réactualisation des signifiants dans lesquels les demandes d’amour de l’enfant pourraient avoir pris forme. Mais, même avant d'impliquer ces formes particulières, le transfert se révèle dans le processus de la demande d'analyse, en ce que le sujet s'adresse à quelqu'un doté d'une connaissance supposée. La figure de l'analyste en un sujet supposé savoir est centrale si l'on prend en compte le cours du traitement selon Lacan : pendant son analyse, l'analysant doit spécifiquement expérimenter l'illusion dans laquelle il se trouve lorsqu'il suppose que l'analyste détient la réponse à laquelle il s'attend, en qualité de patient, vis-à-vis de sa demande et de son devenir, de manière plus générale. Pour Lacan, toute exigence vise ce qui a été irrémédiablement perdu dans la parole. Cette dimension de l'expérience du transfert est, pour Lacan, la plus décisive : cela permet à l'analyste, qui représente la figure du grand Autre, de ne pas être concerné par le contre- transfert. Les lacaniens les plus orthodoxes considèrent que l'attention donnée au discours linguistique du patient est exclusivement utile, alors que l'attention portée aux processus mentaux de l'analyste constituerait une distraction au processus d'écoute. La fin du traitement, que l'éradication du transfert représente, coïncide avec le moment où l'analysant se détourne de cette illusion et le libère de sa position du sujet-supposé-savoir. Dans son article de 1951 (1966/2007), « Interventions on Transference » (« Interventions sur le transfert »), Lacan précise sa théorie du transfert en termes de ses aspects imaginaires et symboliques, en particulier dans le cas de Dora, étudié par Freud en 1905. Le transfert imaginaire, pour Lacan, comporte les sentiments extrêmes d'amour et de haine qui émergent dans le traitement et qui peuvent fonctionner comme une résistance, en particulier un obstacle narcissique entre le patient et l'analyste. Spécifiquement cela signifie que le transfert imaginaire est une résistance quand il devient la résistance de l'analyste. Coincé dans le drame imaginaire du patient, affirmait Lacan, l'analyste devient souvent sourd aux aspects plus symboliques du transfert qui permettent à l'analyse de se dérouler, portant le matériel inconscient à la surface et approfondissant le traitement. Dans le cas de Dora, Lacan souligne la stagnation du traitement lorsque Freud insiste sur l'amour que Dora aurait pour Herr K, une résistance qui avait souvent lieu pour Freud, avec ses patientes au début de ses travaux. Pour cette raison, Freud n'entend pas dans les rêves de Dora, et le déroulement de son histoire, la complicité et les sentiments qu'elle porte sur Frau K., ce qui aurait propulsé l'analyse à son prochain virage, que Lacan nomme la figure centrale du cas Dora. Celle-ci concerne l'énigme de la féminité et son propre désir (à l'opposé de sa préoccupation obsessive antérieure par rapport au désir des autres, c'est-à-dire son père, Herr K). Pour Lacan, Freud considère que le transfert est une résistance et que l'analyste en est responsable. « Il n'y a qu'une seule résistance, c'est la résistance de l'analyste ». (1978/1988, p. 228) L'accent porté par Lacan sur la

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