Dossier L’IA, on en fait quoi ?
qui n’affichent pas forcément chercher un emploi. On peut même imaginer qu’elle repère des profils potentiellement meilleurs que ceux qui auraient effectivement postulé. L’IA peut enfin aller jusqu’à échanger avec les profils repérés via la messagerie LinkedIn en envoyant des questions préétablies par le recruteur permettant de repérer des points pouvant être disqualifiants, comme le niveau d’anglais. Des entretiens oraux via des “bots” peuvent aussi être proposés… » Les candidats ne sont pas en reste. Sans aller jusqu’à maquiller les CV, l’IA permet une préparation des entretiens plus riche et pointue en s’adaptant au secteur visé (questions correspondant aux critères des recruteurs, scan et analyse des actualités et besoins de l’entreprise visée, évaluation par l’IA de différentes versions de speech de présentation…) Ne vous en privez pas pour préparer vos oraux !
tagera. Sur la base de données que nous lui avons fournies, cet assistant IA peut répondre aux questions de politique RH ou aux interrogations très opérationnelles des collaborateurs (ai-je le droit au télétravail ? j’ai oublié de badger ? comment remplir une demande de congés ?). Ce premier niveau de filtre nous fait gagner du temps pour justement développer davan- tage les relations humaines, échanger véritablement avec les collaborateurs. Autre profil d’assistant que nous avons développé : celui du coach. Il va aider les managers à piloter leurs équipes en proposant un plan d’action très précis selon les objectifs définis en entretien : telles étapes pour atteindre le chiffre d’affaires souhaité, tel plan de formation pour développer les compétences identifiées, tel format et tels contenus pour la fiche de poste d’un recrutement à venir… Les professionnels des ressources humaines peuvent aussi compter sur l’IA pour véhiculer la culture de leur entreprise. On donne un ton à l’IA, on lui inculque nos valeurs, on lui transmet notre politique RH, la grille de rémunération, les critères pris en compte pour fixer les augmentations… Bien calibrée, l’IA peut être une véritable ambassadrice d’une culture d’entreprise, mais attention aux risques de standar- disation de ce qui doit rester profondément humain. » Recrutement 1 partout, balle au centre ? 79% des recruteurs utilisent l’IA 68% « L’IA dans le recrutement, c’est un bouleversement pour le recruteur comme pour les candidats ! Le premier utilise l’IA pour analyser les CV et par exemple détecter la mention de compétences recherchées. Le second peut rendre sa candida- ture plus performante grâce à l’IA, parfois en “trichant”, jus- tement avec l’intégration d’un texte en blanc, invisible à l’œil nu, mais repéré par l’IA, ou en sollicitant ChatGPT durant un entretien… Les recruteurs développent une méfiance vis- à-vis de ces pratiques contournant les règles. Certaines des technologies aujourd’hui développées permettent de gérer le recrutement de A à Z presque sans aucune intervention humaine. L’IA génère une fiche de poste puis entame une chasse sur LinkedIn pour créer une short list des profils les plus pertinents, y compris en pouvant tenir compte de ceux générative pour des tâches telles que la rédaction d’offres d’emploi. 4 Enquête HelloWork, 2024 des recruteurs pensent que l’IA peut réduire les biais involontaires dans le recrutement. 4 Enquête Tidio, 2024 33% des entreprises françaises de plus de 10 salariés utilisent l’IA (France Travail, avril 2024) 68% des salariés français cachent leur usage de l’IA à leur hiérarchie (Enquête IFOP, 2024) 72% des entreprises mondiales ont adopté l’IA (McKinsey, The State of AI , avril 2024) 90% des investisseurs attendent une stratégie IA de la part des entreprises ( Business Insider , avril 2025)
Victor Planas Bielsa mathématicien et physicien, directeur de la filière Data Science & AI for Business de l’EDHEC.
Finance nouveaux équilibres 21% des
des entreprises testent des
13%
entreprises ont déployé
outils d’IA pour la cartographie et l’intégration des données financières. 4 KMPG, Trends of AI 2024
des solutions d’IA pour détecter et corriger les anomalies financières. 4 KMPG, Trends of AI 2024
« Tout ce qui est enseigné en Finance, du moins au sein du Master que je pilote à l’EDHEC, est fondamental pour acquérir une connaissance fine du secteur et des méthodes. Aucun des cours au programme n’a été éliminé avec l’arrivée de l’IA ; au contraire, des cours de machine learning , de compliance et d’éthique ont été ajoutés. Si la théorie pour constituer un por- tefeuille optimal n’a pas changé, on peut en pratique utiliser de nouveaux outils intégrant l’IA qui ne nous permettent pas for- cément de mieux travailler. Un niveau de maîtrise insuffisant de l’IA peut même se révéler une catastrophe dans les métiers de la finance. Si elle est bien utilisée, l’IA est en revanche, comme dans tous les secteurs, un amplificateur des perfor- mances, elle permet d’optimiser son temps, de pousser plus loin les analyses… Mais j’invite mes étudiants à la considérer aussi comme un risque qui s’ajoute à ceux que nous devons prendre en compte dans nos métiers. Beaucoup de questions se posent en matière de confidentialité des données, de copy- right , et tout va très vite sans que nous puissions encore nous appuyer sur une réglementation durable à l’échelle du secteur entier. DÉFIS EN VUE Difficile de dire exactement comment l’IA va faire évoluer les métiers de la finance, mais nous allons probablement assister à un changement de “niveaux”. La gestion de contrats complexes, qui prend aujourd’hui du temps, pourra être opérée par une IA qui fera
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n°18 Mai 2025
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