Mon employeur a fait son coming out

CHAPITRE 3

confesse Laurent Depond d’Orange. Chose faite, les employeurs refermaient soigneusement la porte du placard. Silence. On vous l’a déjà dit, ce n’est pas un sujet d’entreprise. A l’opposé du spectre, les entreprises de culture anglo-saxonne, évoquées plus haut, ont dès cette époque parfaitement identifié le sujet, désormais intégré dans leur politique de promotion des diversités. « Chez AXA, l’impulsion « pro-LGBT » est venue des Etats-Unis il y a plus de dix ans. Elle est liée à l’existence d’un mouvement pour les droits des LGBT, inscrit plus largement dans une perspective de reconnaissance de toutes les diversités, qui a émergé là-bas bien plus tôt qu’en Europe », constate Rino Piazzolla, directeur des ressources humaines du groupe. Et, tenez-vous bien : « AXA sponsorise la Gay Pride de New York et le PDG d’Axa US y participe avec plusieurs centaines d’employés ». Mais, si leurs entités mères ont des années-lumière d’avance sur les entreprises françaises, leurs antennes hexagonales souffrent d’une retenue certaine, liée à l’environnement culturel français. Les salarié.e.s et agents LGBT qui témoignent confirment l’invisibilité structurelle du sujet dans les organisations françaises en ces temps protohistoriques : « Disons qu’avant la signature de la Charte, il y avait une invisibilité du sujet, personne n’en parlait », confie Laurent Chauvin de Volvo. » « C’est cela, avant on n’en parlait jamais, mais le sujet pouvait venir dans les conversations sous la forme de blagues sur les homos », confirme son collègue, Stéphane Laugère. Certains et certaines se permettent d’évoquer leur identité et leur vie privée avec quelques collègues de confiance, mais le sujet reste confidentiel et ne franchit pas les lignes du management direct, des ressources humaines et du top management. Difficile de généraliser vue l’hétérogénéité de notre panel, mais disons que la porte du placard s’entrouvre un peu avant les années 2010, sous l’effet conjugué de la reconnaissance du critère de l’orientation sexuelle comme source possible de discrimination en 2001 et du lancement de la Charte de la diversité en 2004. « En 2007, après avoir signé la Charte de la diversité, nous avons mené une étude au sein d’EDF et nous avons découvert que deux critères de discrimination, la religion et l’orientation sexuelle, non traités, non vus. Mes prédécesseurs ont alors entamé le travail », confirme Jean-Baptiste Obeniche d’EDF.

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Mon employeur a fait son coming out - L’Autre Cercle - Novembre 2016

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