CHAPITRE 3
c’est à dire des collaborateurs non-LGBT qui affichent leur soutien à « la cause ». Ces deux stratégies permettent de lever trois difficultés parfaitement identifiées : l’invisibilité des LGBT au travail (on le rappelle de l’ordre de 50 à 65% 5 selon les études), germe du mal-être, mais aussi de l’homophobie ordinaire, l’absence, en conséquence, de modèles d’identification inspirants pour les LGBT et la crainte très hexagonale de risque de communautarisation de la société. Réseaux, « roles models », alliés : la stratégie des organisations matures Yves Desjacques, le DRH du Groupe Casino est de ces rares « roles models » LGBT 100% hexagonaux : « Je suis gay et ce n’est pas un scoop, tout le monde le sait dans l’entreprise. Je réponds très simplement aux questions qui me sont posées sur ma vie personnelle, voire je les anticipe de façon à ne pas mettre mes interlocuteurs mal à l’aise. Je considère qu’il est de ma responsabilité en tant que cadre dirigeant de faire savoir que l’on peut être pleinement soi-même chez Casino et que je n’ai jamais souffert d’être visible au travail ». Evidemment, un tel modèle est comme un graal pour les LGBT : la promesse d’une possible « normalisation ». Dès lors que des dirigeants et dirigeantes s’affichent comme LGBT, ils participent de la banalisation des minorités sexuelles, tout en prouvant, par l’exemple, que la méritocratie fonctionne pour tous et permet de monter au plus haut. Jacques Craveia, cadre supérieur chez Gecina, lui fait écho : « Lorsque je suis arrivé chez Gecina, mon N+1 a compris que j’étais homosexuel et cela n’a jamais été un obstacle dans mon évolution. J’ai d’ailleurs encadré jusqu’à 150 personnes. Quand je me suis marié en 2014, j’ai organisé un cocktail au sein de l’entreprise. Mon intention était de montrer aux collaborateurs qu’il était à la fois possible de vivre son homosexualité dans l’entreprise et d’avoir une vie professionnelle pleine et entière, de prendre des responsabilités ». « Dans les médias eux-mêmes, qui pourraient sembler plus libérés, il reste du boulot à faire », constate le journaliste et animateur Christophe Beaugrand, dont l’entreprise, le groupe TF1, vient de signer la Charte, consciente de sa responsabilité pour contribuer à faire évoluer les représentations des LGBT. Pour alimenter cette dynamique d’affirmation et d’émergence de « roles models », les réseaux professionnels LGBT constituent un formidable carburant. A cet égard, l’américain IBM constitue un modèle du genre : « Chez IBM, la diversité LGBT est un objectif clairement affiché, sans aucune forme de pudeur. Nous avons des indicateurs de performance par pays sur ce thème,
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Mon employeur a fait son coming out - L’Autre Cercle - Novembre 2016
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