FNH N° 1152

Découvrez le numéro 981 de Finances News Hebdo, premier hebdomadaire de l'information financière au Maroc

Du 16 mai 2024 - 8 DH - N° 1152

PREMIER HEBDOMADAIRE DE L'INFORMATION FINANCIÈRE AU MAROC

Directeur de la publication : Fatima Ouriaghli

Catalyseur de l'écosystème technologique africain DeepTech

P. 19 à 25

FONDS MOHAMMED VI POUR L’INVESTISSEMENT Le capital investissement

marocain fait sa révolution

● Mohamed Benchaâboun, Directeur général du FM6I, fait un important point d’étape sur les réalisations du Fonds à l’occasion de la troisième édition des «Nuits de la Finance» organisée par Finances News Hebdo.

P. 2/10 à 13

Inclusion financière

Banques/Risques climatiques Les conclusions de l'étude de BAM et la BM

«Il y a une résistance à l’amélioration des offres bancaires»

P. 9

 Lahcen El Ameli, professeur universitaire d’économie

P. 14 à 16

Dépôt légal : 157/98 ISSN : 1114-047 - Dossier de presse : 24/98 - Adresse : 83, Bd El Massira El Khadra, Casablanca - Tél. : (0522) 98.41.64/66 - Fax : (0522) 98.40.22 - Adresse web : www.fnh.ma

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JEUDI 16 MAI 2024 / FINANCES NEWS HEBDO

SOMMAIRE

Editorial

26 30 31 26 ECONOMIE 27 28

4 6 7 4 ACTUALITÉ

Dialogue social : Difficile compromis sur les retraites et le droit de grève Cafés et restaurants : Un secteur au bord du gouffre Entretien avec Dr Ali Sami : Numérisation de la santé, «Notre ADN est basé sur l'innovation» Al Haouz : La reprise économique en marche Entretien avec Nabil Jadri : «Ameal adopte une approche globale et spécifique pour soutenir la création d'emplois dans ces régions»

Fatima Ouriaghli Directeur Général responsable de la Publication

Voyons voir : Gaza, un Sisyphe sans fin Ça se passe au Maroc Ça se passe en Afrique

D Le FM6I, catalyseur d'une renaissance économique

8 8 BOURSE & FINANCES

epuis son annonce en 2020, le Fonds Mohammed VI pour l’investissement (FM6I) s'est imposé comme un pilier central dans la stratégie économique du Maroc, reflétant l'engagement continu du Royaume de s’ins- crire dans une dynamique de croissance, d'innovation et de développement durable. Initié par le Roi, ce fonds incarne une vision audacieuse pour booster l'économie nationale, stimuler l'investissement privé et

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Point Bourse Hebdo : Les trimestriels relancent l'appétit des investisseurs Banques/Risques climatiques : Les conclusions de l'étude de BAM et la Banque mondiale Fonds Mohammed VI pour l’investissement : Le capital investissement marocain fait sa révolution Reportage photos Entretien avec Lahcen El Ameli : Inclusion finan- cière, «Il y a une résistance sérieuse à l’améliora- tion des offres bancaires» Bourse : Des corrections vite effacées, signe d'une tendance de fond solide Bourse : La semaine en chiffres

soutenir la prospérité à long terme. « Nous souhaitons vivement que ce Fonds joue un rôle de premier plan dans la promotion de l’investissement et le relèvement des capacités de l’économie nationale. Il interviendra pour doter les secteurs productifs du soutien nécessaire et pour financer et accom- pagner les grands projets envisagés, dans le cadre de partenariats public-privé », avait notamment déclaré le Souverain dans son dis- cours au Parlement le 9 octobre 2020. À l'heure où le Maroc cherche à donner une nouvelle trajectoire à son économie suite à la pandémie mondiale et à la crise née de la guerre russo-ukrainienne qui a entraîné de fortes tensions sur les prix des produits alimentaires et énergétiques, le FM6I se révèle être un ins- trument essentiel pour renforcer la résilience économique et créer de nouvelles opportunités. Doté d'une enveloppe initiale de 15 milliards de dirhams provenant du budget de l'État, et avec une prévision d'investissement totale atteignant les 150 milliards de dirhams, ce fonds offre une plateforme solide pour financer des projets d'inves- tissement d'envergure dans divers secteurs clés. Son déploiement s'inscrit dans une approche holistique visant à sou- tenir les petites et moyennes entreprises (PME), encourager l'inno- vation, moderniser les infrastructures et promouvoir des secteurs à fort potentiel de croissance. En partenariat avec le secteur privé, ce fonds catalyseur favorisera la création d'emplois, renforcera la com- pétitivité et contribuera à la transformation structurelle de l'économie marocaine. L'annonce, en janvier dernier, de la présélection de 17 sociétés de gestion de fonds sectoriels et thématiques marque une étape cru- ciale dans la mise en œuvre opérationnelle du FM6I. Ces partenariats stratégiques permettent de diversifier les canaux de financement et de mobiliser des investissements supplémentaires. En favorisant l'émergence d'une industrie du capital-investissement robuste, le Fonds ouvre ainsi de nouvelles perspectives pour l'entrepreneuriat et l'innovation au Maroc. Dans le même ordre d’idées, l'appel à manifestation d'intérêt lancé lundi 15 avril pour la création des «Fonds Startups» témoigne de la volonté du FM6I de soutenir l'écosystème entrepreneurial et de favo- riser l'essor des jeunes entreprises innovantes. Clairement, le FM6I s'affirme comme un catalyseur de la renaissance économique du Maroc. u

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L'UNIVERS DES TPME

Entretien avec Salma Kabbaj : Accompagnement des startups, «Nous combinons l’expertise d’Impact Lab et les outils de financement de Tamwilcom»

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18 19 FOCUS DEEPTECH

Transformation agricole : Réduire de près d’un tiers les émissions de GES DEVELOPPEMENT DURABLE

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Deep Tech : La révolution technologique en marche Entretien avec Yassine Laghzioui : Entrepreneuriat & Venturing, «L'Afrique a la capacité de se position- ner sur la technologie avancée» lnnovation technologique : Des avancées significa- tives dans les secteurs clés DeepTech : Aperçu de l'écosystème en Afrique Entretien avec El Mahdi Aboulmanadel : Deepleaf, Une innovation au service des agriculteurs Partenariat : L'UM6P et l'OSTI s’accordent pour booster l'écosystème de l'innovation

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35 E-Sports : Bien plus qu'un simple jeu 35 HIGH-TECH

• Directeur des rédactions & Développement : David William

• Mise en page : Zakaria Beladal • Assistantes de direction : Amina Khchai

• Journalistes : Charaf Jaidani, Leïla Ouriaghli, Adil Hlimi, Youssef Seddik, Khalid Aourmi, Ibtissam Zerrouk, Malak Boukhari, Meryem Ait Ouaanna, Désy Mbakou • Révision : M. Labdaouat • Directeur technique & maquettiste : Abdelillah Chamseddine

• Département commercial : Samira Lakbiri, Rania Benchaib • Administratif : Fatiha Aït Allah • Édition : JMA CONSEIL • Impression : Maroc Soir • Distribution : Sochpress • Tirage entre 15.000 et 18.000 exemplaires • Dépôt légal : 157/98 • ISSN : 1114-047 • Dossier de presse : 24/98 • N° Commission paritaire : H.F/02-05

• Directeur Général responsable de la Publication : Fatima OURIAGHLI Contact : redactionfnh@gmail.com

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VOYONS VOIR

Gaza

Un Sisyphe sans fin

appels à un cessez-le-feu se multiplient, notamment de la part du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, qui plaide pour une réouverture des points de passage et l'accès à l'aide humanitaire. De son côté, le Qatar, engagé dans les pourparlers de trêve, déplore un recul des négociations suite à l'offensive à Rafah. Aujourd’hui, ces négociations sur un cessez- le-feu et la libération des otages semblent dans l'impasse, le Hamas et Israël ne parve- nant pas à trouver un compromis. En parallèle, les ramifications régionales du conflit s'intensifient, avec des incidents le long de la frontière entre Israël et le Liban. Les affrontements entre les forces israé- liennes et le Hezbollah au Liban témoignent de l’instabilité de la région et de la propen- sion du conflit à déborder au-delà des fron- tières de Gaza. Tant que la politique des armes prévaudra sur la diplomatie, le cycle infernal de la vio- lence continuera à ensanglanter cette région déjà meurtrie. ◆

ter les générateurs des hôpitaux. Les écoles et les systèmes d'approvisionnement en eau et en électricité sont gravement endomma- gés, tandis que le manque de fournitures médicales, de nourriture et d'eau potable expose des milliers de civils à des condi- tions de vie inhumaines et à un risque accru de maladies et de malnutrition. C’est dire que les civils, pris au piège de ces violences et confrontés à des conditions de vie précaires, sont les premières victimes de ce conflit. Des milliers de Palestiniens ont été contraints de fuir leurs foyers et sont en détresse, cherchant désespérément refuge dans d'autres parties du territoire palestinien où l’intensité des bombardements n’a laissé qu’un champ de ruine. Face à cette escalade de la violence, les L’obsession du Premier ministre Benjamin Netanyahu à vouloir éliminer le Hamas par des moyens militaires semble inefficace.

L a situation à Gaza demeure tendue, marquée par des affrontements violents entre l'armée israélienne et le Hamas. Sur fond de com- mémoration de la Nakba, les combats se sont intensifiés et ont plongé la région dans un état de chaos et de désespoir, en dépit des avertissements américains contre une offensive majeure à Rafah, ville surpeuplée où se concentre une grande partie de la population palestinienne. L’obsession du Premier ministre Benjamin Netanyahu à vouloir éliminer le Hamas par des moyens militaires semble non seulement inefficace, mais aggrave davantage la crise humanitaire déjà critique dans la région. Actuellement, le système de santé, déjà très malmené, est au bord de l'effondrement en raison du manque de carburant pour alimen- Par D. William

oui , je souhaite m’abonner à cette offre spéciale pour 1 an BULLETIN D’ABONNEMENT Mon abonnement comprend : ❑ 48 numéros Finances News hebdo & 2 numéros du Hors-série. Voici mes coordonnées : ❑ M ❑ Mme ❑ Mlle Nom/Prénom : ................................................................................... Adresse : ............................................................................................ Ville : ............................. Code Postal : ............................................ Tél : ........................................ Fax : ................................................. E-mail : ............................................................................................. Mon règlement ci-joint par : ❑ Chèque bancaire ou virement bancaire à l’ordre de JMA Conseil : Banque Populaire, Agence Abdelmoumen, Compte N° 21211 580 5678 0006-Casablanca - (Maroc)

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ÇA SE PASSE AU MAROC

Batteries automobiles

910 M$ pour deux grands projets industriels

L e président de la Société d’aména- gement de Tanger Tech, Othman Benjelloun, a procédé, mardi 14 mai

2024, au siège de Bank of Africa, en présence du président de TMSA, Fouad Brini, et du président de la région Tanger- Tétouan-Al Hoceima, Omar Moro, à la signature d’accords pour l’installation de deux projets industriels d’envergure, opé- rés par des leaders mondiaux de l’indus- trie de batteries automobiles, le groupe Hailiang et la société Shinzoom, à la Cité Mohammed VI Tanger Tech.

Ces accords représentent un tournant majeur dans l’écosystème automobile marocain, avec l’accueil dans le Royaume d’un 1 er opérateur industriel de cuivre, à travers le Groupe Hailiang, et d’un 1 er opérateur d’anodes, la société Shinzoom. Le projet de Hailiang, qui s’étend sur une superficie de 30 hectares pour un investissement de 450 millions de dollars dès 2024, génère la création de 1.800 emplois. Celui de Shinzoom, d’une superficie de 20 hectares et d’un investis- sement de 460 millions de dollars dès 2024 prévoit, pour sa part, la création de 2.000 emplois. ■

Ciment

Les livraisons en hausse à fin avril

le ministre a relevé que les travaux d'extension de l'aéroport de Rabat-Salé devraient être achevés à la fin de cette année, faisant état de l'extension de l'aéroport de Tétouan après l'ouverture de la nou- velle piste, et de la programmation de l'extension de l'aéroport Mohammed V à Casablanca. D'autre part, Abdeljalil a souligné que l'Office national des aéroports avait programmé en 2019 l'extension de l'aéroport de Marrakech, un projet reporté en raison de la pandémie de COVID-19, assurant que le trafic en 2024 a connu une augmentation inat- tendue de 40% par rapport à 2019. ■ L es livraisons de ciment ont atteint plus de 4,10 millions de tonnes (Mt) à fin avril 2024, en hausse de 3,5% comparativement à la même période un an auparavant, selon l'Association pro- fessionnelle des cimentiers (APC). Pour le seul mois d’avril, ces ventes ont enregis- tré 867.743 tonnes contre 716.483 tonnes pour la même période en 2023, soit +21,11%. Par segment, les livraisons destinées à la distri- bution se sont situées à 2,37 Mt, suivies de celles adressées au BPE (béton prêt à l’emploi) avec 897.792 tonnes, au PREFA (béton préfabriqué) avec 396.129 tonnes, au bâtiment (130.372 tonnes), à l'infrastructure (282.304 tonnes) et aux mortiers (21.266 tonnes), précise la même source. L'APC se compose de Asment Témara, Ciments de l’Atlas, Ciments du Maroc, LafargeHolcim Maroc et Novacim. ■

Facultés de médecine

Les examens du deuxième semestre programmés début juin

L es examens du deuxième semestre dans les Facultés de médecine et de pharmacie sont programmés début juin, a indiqué, lundi au Parlement, le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation, Abdellatif Miraoui, ajoutant qu’ «il n'y aura pas de session extraordinaire». La prolongation du boycott ne permet pas de trouver des alternatives pour sauver l'année universitaire, a relevé Miraoui, précisant que «le scénario de 2019 ne se reproduira jamais».

Il a appelé, à cet égard, les étudiants en grève à retourner en classe, rappelant que 45 des 50 revendications ont été satisfaites, tandis que certaines revendications ne peuvent être acceptées. ■

Extension des aéroports de Marrakech, Agadir et Tanger

Aérien :

L es appels d'offres relatifs à l’extension des aéroports de Marrakech, Agadir et Tanger seront lancés au cours des pro- chaines semaines, a affirmé, mardi au Parlement, le ministre du Transport et de la Logistique, Mohamed Abdeljalil. «Ces projets sont destinés à doubler la capacité des aéroports dans le sil- lage de l'accompagnement de la dynamique que connait le transport aérien» , a-t-il précisé. En amont des préparatifs aux échéances impor- tantes prévues au Maroc, le ministère œuvre à atteindre les objectifs fixés, consistant à porter

la capacité de tous les aéroports marocains à 80 millions de passagers par an, au lieu des 40 millions actuellement, a-t-il indiqué. Par ailleurs,

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ÇA SE PASSE EN AFRIQUE

Sénégal - Mauritanie

La Banque centrale prévoit une croissance de 5% en 2024 Cap Vert

Avancée significative pour un grand projet gazier

Côte d'Ivoire

Gbagbo investi à la présidentielle par son parti, malgré son inéligibilité L’ ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, a été investi, à Abidjan, par son parti comme candidat à l'élec- tion présidentielle prévue fin 2025. « J'accepte d'être votre candidat » pour la présidentielle prévue en octobre 2025, a annoncé Laurent Gbagbo lors d'une céré- monie de sa formation, le Parti des peuples africains - Côte d'Ivoire (PPA-CI, opposi- tion). Dans son discours prononcé en fin de jour- née devant un millier de partisans, Gbagbo, 78 ans, s'est engagé « à faire un seul mandat (...), mais un mandat où tout sera bouclé ». L'ex-président ivoirien (2000-2011) est tou- tefois inéligible. ■ D es mois après l'annonce par l’ins- tance électorale tunisienne d'une date provisoire des prochaines élec- tions présidentielles, la scène politique en Tunisie demeure toujours suspendue à la publication d'un calendrier définitif de cette importante échéance pour le pays. Soucieuses de garantir un scrutin libre et transparent, plusieurs voix se sont élevées au sein des partis politiques et de la société civile en Tunisie pour réclamer une date pré- cise de la prochaine élection présidentielle, afin de mettre fin à la polémique autour de cette importante formalité dans tout proces- sus électoral. L'Instance électorale indépendante (Isie) avait indiqué que l'élection présidentielle tunisienne se tiendra dans les délais, soit entre septembre et octobre prochains. ■ La non fixation d'une date pour la prochaine Présidentielle fait débat Tunisie

L a Banque centrale du Cap Vert (BCV) a révisé à la hausse les perspec- tives de croissance de l'économie de l'archipel qui seront de 5% cette année, selon le rapport de politique monétaire publié à Praia. Cette prévision est supérieure de 0,3 point de pourcentage à celle réaffirmée par le Fonds monétaire international (FMI), lequel table sur une croissance de 4,7% en 2024, « convergeant vers une croissance potentielle de 4,5% d'ici 2028 ». Par rapport aux projections d'octobre 2023, la croissance réelle du PIB pour 2024 « a été révisée à la hausse de 0,3 point de pourcentage », a indiqué la BCV, notant que l'amélioration des prévisions pour cette année reflète une révision à la baisse des prix et la mise à jour des comptes nationaux. Selon la Banque capverdienne, il y a une stabilisation, sachant que la crois- sance du PIB en 2023 a été de 5,1%. ■

L e projet de produc- tion de gaz natu- rel en mer entre la Mauritanie et le Sénégal a franchi une étape impor- tante avec l'arrivée, après des mois de voyage, d'une unité flottante indispensable à la mise en exploitation, retardée de plusieurs mois. L'unité flottante de pro- duction et de stockage de gaz (FPSO) est arri- vée samedi par la mer sur le champ Grand Tortue Ahmeyim (GTA), a annon- cé la compagnie pétro- lière Petrosen, contrôlée par l'Etat sénégalais et associée dans le projet au britannique BP, à l'améri- cain Kosmos Energy et à la Société mauritanienne des hydrocarbures. La FPSO, stationnée dans l'Atlantique à environ 40 kilomètres des côtes et raccordée aux puits d'extraction environ 80 kilomètres plus au large, réceptionnera le gaz et en effectuera un premier trai- tement, avant que le gaz ne soit expédié vers une autre unité flottante qui le liquéfiera, à environ 10 kilomètres du rivage, pour faciliter le transport. ■

Procès de huit dirigeants d’un groupe français pour corruption en Afrique Pétrole

H uit dirigeants de la société française Bourbon, spécialisée dans les services maritimes à l'industrie pétrolière, sont poursuivis pour cor- ruption d'agents publics étrangers en Afrique, notamment au Nigeria, en Guinée équatoriale et au Cameroun. L'affaire avait débuté en octobre 2012 avec la découverte de 250.000 dollars en billets de 100 dans l'armature de la valise de Marc Cherqui, directeur fiscal de Bourbon, par les douaniers de l'aéroport Marseille-Provence, dans le sud de la France. Au terme de leur enquête, les juges d'instruction qui se sont succédé sur ce dossier, avaient conclu à l'existence d'un pacte de corruption entre Bourbon et l'administration fiscale de trois pays africains où le groupe parapétrolier développait ses activités. ■

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BOURSE & FINANCES

Point Bourse Hebdo Les trimestriels relancent l'appétit des investisseurs

Evolution de l'indice Masi depuis début mai 2023

A Grâce essentiellement au soutien des valeurs financières, le Masi imprime un nouveau plus haut annuel. Par Y . Seddik

les commentaires des dirigeants au terme de la communication financière au titre de 2023. Par ailleurs, le Masi Small & Mid Cap poursuit sa belle lancée, porté par les secteurs porteurs de l'immobilier et du BTP, et gagne 0,9% sur la semaine. De son côté, le secteur bancaire joue un rôle de stabilisateur, maintenant la valorisation glo- bale du marché à un niveau raisonnable. Sur la semaine, les échanges ont porté sur plus de 1,07 milliard de dirhams, réalisés principalement sur le marché central et dominés par les transactions sur Douja Prom Addoha (134,09 millions de dirhams - MDH), Label’Vie (123,49 MDH) et Résidences Dar Saada (116,73 MDH). Au final, il convient de rester prudent face à des mouvements de prises de profits qui pour- raient survenir d'ici la fin de la saison des trimestriels. Ces ajustements ne devraient tou-

près deux semaines de stabi- lisation, le marché actions se relance de plus belle. Cette semaine, l'indice Masi a en effet renoué avec la hausse, en progressant de près de 1% pour atteindre un nouveau plus haut annuel autour des 13.527 points. Cette performance est portée par un regain d'intérêt notamment pour les valeurs financières, à l'image de CFG Bank qui s'est envolée de 7% sur la période. La bonne dynamique du mar- ché s'inscrit dans le cadre du début de la saison des trimes- triels, qui devrait se poursuivre jusqu'à fin mai. Les investisseurs se (re)positionnent donc sur cer- tains dossiers de conviction et scrutent attentivement les résul- tats des entreprises cotées, à la recherche de signes pour vali- der leurs anticipations ou même des surprises. Pour l'heure, les signaux semblent plutôt encou- rageants, comme en témoignent

TOP Performances

FLOP Performances

Oulmès Akdital Salafin

-5,94%

+21,78% +13,81%

Rés Dar Saada S.M. Monétique Alliances

-5,58%

-5,16%

+11,11%

tefois pas remettre en cause la tendance de fond, qui reste réso- lument haussière. Sur le marché des taux, le Trésor a procédé durant la semaine der- nière à une importante levée sur la ligne 2 ans pour 6,5 milliards de dirhams, au taux limite 3,2583%, selon BMCE Capital Global Research (BKGR). Cette opéra- tion a induit une légère contrac- tion du taux primaire de cette maturité de 0,5 point de base

(pbs) à 3,22%, précise BKGR. Après deux séances seulement, le Trésor a d'ores et déjà levé près de 75% de son besoin annoncé pour le mois de mai, qui s'élève à 12,5 Mds de DH, fait savoir la même source. Compte tenu des importantes levées effectuées en ce début de mois, le marché primaire devrait res- ter relativement stable dans les semaines à venir, prévoient les analystes d'AGR. ◆

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BOURSE & FINANCES

à l'autre. Cela appelle à une vigi- lance accrue de la part des insti- tutions financières et des autorités de supervision. Face à ces défis croissants, l'étude propose une série de recomman- dations politiques visant à renfor- cer la gestion des risques clima- tiques au sein du secteur bancaire marocain. Ces recommandations s'articulent autour de plusieurs axes prioritaires, dont le renfor- cement des capacités techniques des acteurs du secteur bancaire et des autorités de supervision, l’in- tégration des risques climatiques dans le suivi micro et macropru- dentiel, ou encore le complément des directives prudentielles par des mesures spécifiques aux risques climatiques. L’amélioration de la transparence autour de l'orien- tation de la politique climatique des banques est aussi l’une des recommandations phares propo- sées lors de cette rencontre. La mise en œuvre effective de ces recommandations est donc essen- tielle pour garantir la résilience du secteur bancaire marocain face aux risques climatiques et contri- buer à une transition durable et inclusive vers une économie bas carbone. De son côté, Nabil Badr, adjoint au directeur de la direction de la Supervision bancaire chez Bank Al-Maghrib, explique que «la 2 ème phase après l'étude consiste en un transfert de savoir-faire de la méthodologie retenue par la Banque mondiale, pour pouvoir aboutir à une grille de risque propre au secteur bancaire marocain. Il y aura notamment un renforce- ment de capacités sur le sujet des risques climatiques via des forma- tions dédiées qui seront lancées dans les prochaines semaines» . Au final, cette étude conjointe entre les deux institutions consti- tue un jalon important dans la compréhension des risques cli- matiques auxquels est confronté le secteur financier marocain. Elle fournit également aux autorités et aux acteurs du secteur des outils précieux pour renforcer la gestion de ces risques et contribuer à la stabilité financière du pays à long terme. ◆

 A travers cette étude, BAM et la BM ont fait le point sur la réponse prudentielle aux risques climatiques et identifié les actions poli- tiques à mettre en œuvre.

Bank Al-Maghrib (BAM) et la Banque mondiale (BM) ont conjointement présenté les conclusions de l’étude sur les risques climatiques auxquels est confronté le secteur bancaire marocain. Une première du genre en Afrique. Les conclusions de l'étude de BAM et la Banque mondiale Par Y. Seddik P Banques/Risques climatiques

our Abderrahim Bouazza, Directeur général de Bank Al-Maghrib, «ce travail a pu fournir en effet les pre- mières estimations de l’impact des chocs climatiques, selon plusieurs scénarios, sur les bilans, la solva- bilité et la rentabilité des banques. L’étude a également permis de tirer les leçons des difficultés ren- contrées en termes de data sur les risques liés au climat et au plan de la modélisation, compte tenu de la complexité des liens entre les impacts macroéconomiques, financiers et climatiques». Il explique aussi que le travail en cours sur le développement de la taxonomie climatique au niveau du gouvernement avec les parties concernées, dont Bank Al-Maghrib, et avec le soutien de la Banque mondiale, devrait contribuer à réduire le gap en données. Et que cet exercice va permettre de conti- nuer à faire évoluer le cadre régle-

mentaire et à améliorer l’évaluation des risques climatiques, tout en remédiant aux défis conceptuels et techniques rencontrés. Plus en détail, l'étude, réalisée à l'aide de modèles climatiques et macro-financiers sophistiqués, s'est penchée sur deux risques majeurs : les sécheresses et les inondations. Les résultats révèlent des conséquences économiques considérables, pouvant atteindre 10,5 milliards de dollars, selon la gravité de l'événement et le scénario climatique envisagé. «La modélisation économique montre que les inondations extrêmes peuvent engendrer une perte de PIB de 2%, tandis que celle due aux sécheresses serait de 3,5%», indiquent Emma Dalhuijsen, spé- cialiste principale du secteur finan- cier, et Reda Aboutajdine, écono- miste du secteur financier chez le Groupe Banque mondiale.

Notons que contrairement aux sécheresses prolongées, les inon- dations, bien que de courte durée, ont un impact relativement faible sur les pertes de prêts et le capi- tal des banques, soulignent les deux experts qui présentaient les conclusions du rapport. L'analyse met en lumière l'ampli- fication croissante des effets du changement climatique sur les risques climatiques physiques, soulignant l'urgence d'une adapta- tion proactive. Au-delà des risques physiques, l'étude explore éga- lement les risques de transition auxquels le secteur bancaire est exposé, liés aux changements de politique et à l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Si l'impact global du changement climatique sur le secteur bancaire semble gérable à première vue, les répercussions financières varient considérablement d'une banque

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BOURSE & FINANCES

Fonds Mohammed VI pour l’investissement

Le capital investissement marocain fait sa révolution

Mohamed Benchaâboun, Directeur général du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, a fait un important point d’étape sur les réalisations du Fonds à l’occasion de la troisième édition des «Nuits de la Finance» organisée par Finances News Hebdo.

Ressources humaines Une denrée rare L

Par A. Hlimi

e Fonds Mohammed VI pour l’investissement est sur les rails. Les premiers fonds thé- matiques seront opérationnels d’ici fin juin et, sans surprise, l’engouement des opérateurs a été fort pour le fonds sou- verain qui a été pensé comme un outil de relance par le Roi en pleine crise pandémique en

2020. Mohamed Benchaâboun, pédagogue comme à son habitude, n’a pas manqué de rappeler, l’objectif, le rôle et les perspectives de dévelop- pement de cet outil conçu ini- tialement comme un «fonds de fonds» de Private Equity, avant de voir son champ d’actions élargi.

par le Fonds. «Ces sociétés de gestion vont gérer, d'un côté, les fonds sectoriels liés notam- ment à l’industrie, l’agriculture et le tourisme. Une dizaine de SDG ont été choisies pour cibler spécifiquement les PME qui ont été stratifiées à notre niveau en plusieurs catégo- ries selon la taille du ticket» , explique Benchaâboun, qui assure que la couverture du marché du Private Equity sera désormais totale.

Engouement des investis- seurs et des sociétés de gestion L’appel à manifestation d’inté- rêt lancé par le Fonds pour sélectionner des sociétés de gestion de capital investisse- ment a attiré un bon nombre d’opérateurs nationaux et internationaux. Ils étaient 46 soumissionnaires et, après un processus rigoureux de sélection, sur la base de cri- tères aussi bien quantitatifs, comme le Track Record, que qualitatifs, comme la qualité des équipes de gestion que le Fonds a rencontrées une par une, 17 Sociétés de ges- tion (SDG) ont finalement été retenues. A fin avril, ces SDG ont présen- té 14 Mds de dirhams d’enga- gements d’investisseurs, aux- quels il faut ajouter les 6 Mds de dirhams mis sur la table

Dans son intervention, Mohamed Benchaâboun a beaucoup mis l’accent sur la qualité des équipes de gestion dans le processus de sélection des 17 sociétés de gestion. Leur expérience, leur cloosing et sorties passées, leur capacité à délivrer les TRI (Taux de rentabilité internes) promis préalable- ment aux investisseurs ont été scrutés. De longs entretiens individuels ont été menés avec chaque équipe et le Fonds exige que les personnes clés soient maintenues dans les structures durant la période d’investissement du Fonds Mohammed VI. Selon son DG, c’est un facteur clé du succès. Lui-même a dû s’entourer de profils de qualité, des Marocains résidant dans le Royaume ou à l’étranger, pour s’assurer du bon fonctionnement des opérations.

Accompagnement des startups

Il y a quelques semaines, Mohamed Benchaâboun a annoncé, à l’occasion d’une rencontre à la CGEM, que le Fonds allait également cibler spécifiquement le segment des startups, avec un produit dédié qui arriverait à la fin du printemps. Aux «Nuits de la

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BOURSE & FINANCES

des projets qui demandent un investissement important et beaucoup de temps dans leur préparation. Nous y tra- vaillons avec les autorités publiques, qui sont souvent les donneurs d’ordres dans ce cas. Ces projets ont besoin d’une approche innovante de financement et d’accompa- gnement sur le volet juridique, financier et technique. Notre implication en direct rend les projets réalisables» , explique Benchaâboun. «Pick up the winner» Témoignant des attentes du Fonds par rapport à l’éco- système du capital-investis- sement marocain, Mohamed Benchaâboun a insisté sur le rôle dans cette industrie dans la détection de pépites capables de se développer au Maroc, mais aussi dans le reste du monde. «Il faut accompa- gner les PME et les convaincre qu’elles peuvent exporter leur savoir-faire et que le marché doit être abordé de manière globale en dehors du terri- toire national. Nos entreprises doivent être convaincues qu’il ne faut pas rester petit. Misez sur les meilleurs, ceux qui ont de l’ambition, «pick up the win- ner», a-t-il dit. «Prenez-les par la main et poussez-les à sortir à l’international», conclut-il. ◆

 Mohamed Benchaâboun, DG du FM6I

éléments ont été décrits de manière explicite dans l’ap- pel d’offres que nous avons lancé» . Un rôle important dans les projets d’infrastructure Le Fonds jouera également un rôle d’investisseur en direct dans de grands projets d’in- frastructure du Royaume. Des projets qui demandent un souffle long et où les cri- tères de développement sont tout aussi importants que les critères financiers. «Ce sont

Le Fonds jouera également un rôle d’investis- seur en direct dans de grands projets d’infras- tructure du Royaume.

Finance» , il fait le point sur ce projet : «L’appel d’offres a été lancé il y a quelques semaines et les soumission- naires ont jusqu’à mi-juillet pour répondre. Nous consta- tons déjà une dynamique intéressante qui ne nous sur- prend pas». Commentant la couverture de ce segment par les capital-investisseurs, Benchaâboun fait le constat d’une profondeur de mar- ché inférieure au potentiel du Maroc. Pour lui, par rapport à d’autres pays comparables, le Maroc doit encore fournir des efforts pour mieux se posi- tionner sur ce segment. Il sera ainsi, avec Innov Invest de Tamwilcom, le second opé- rateur public à investir cette catégorie. Et pour mitiger les risques liés à ce type d’entre- prises, le Fonds travaille sur un projet multidimensionnel

pour encourager les investis- seurs à participer aux levées de fonds. «Sur ce segment, le Fonds s’engage sur le tiers du financement, et nous avons demandé à la CDG de nous accompagner avec un deu- xième tiers. Il n’y aura donc qu’un tiers des fonds à lever réellement. Nous opérons également, avec le ministère de la Transition numérique et le ministère des Finances, afin qu’ils nous accompagnent dans la mise en place d’un mécanisme de garantie qui sera prêt au moment où nous aurons finalisé le processus de recrutement des SDG. Ce mécanisme, dit de First Loss, prend en charge les premières pertes qui pourraient surve- nir à concurrence d’une enve- loppe financière pré-établie avec le gouvernement. Ces

Fonds Mohammed VI pour l'investissement Les 3 principes directeurs

Le Fonds recherche dans ses investissements à la fois une rentabilité financière et un impact économique, social et environnemental. Le reporting des SDG sur les critères ESG est primordial. Le second principe est celui de l’additionnalité. Le Fonds investit dans des domaines peu ou pas couverts par le financement privé pour générer une additionnalité (horizons longs, capital patient, prépara- tion de projets, fixation de normes ESG élevées, etc.). Mohamed Benchaâboun a d’ailleurs souligné que des secteurs comme l’agri- culture et le tourisme, peu ou pas couverts jusqu’à présent, le seront avec le concours du Fonds. Lequel vise à mobiliser des financements privés impor- tants pour démultiplier les fonds propres investis. L’objectif principal est d’at- teindre un effet de levier de 10 fois pour que le capital initial du Fonds, de 15 Mds de dirhams, puisse financer 150 Mds de dirhams de projets et d’entreprises.

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F.N.H. : BAM et la Banque mon- diale ont annoncé le déploiement dernièrement «Douar Tour» pour développer l’inclusion financière dans le monde rural. Quel est votre avis sur ce concept ? L. E. A. : Actuellement, et dans le cadre de «Greenback-Maroc», BAM et la BM lancent le concept de «Douar Tour» visant à accompagner les populations rurales via le renforcement de capacités dans le processus de décisions finan- cières. Concrètement, ce concept est déployé à travers des messages ciblés sur la manière de s’informer pour mieux com- prendre les différents services financiers disponibles pour le transfert d’argent et leurs tarifications. La finalité du proces- sus est de faire profiter les bénéficiaires, autant que faire se peut, des opportuni- tés qui se présentent à eux. Des outils didactiques sont mis à la disposition des acteurs de l’écosystème financier et de la société civile pour les diffuser auprès des populations cibles. S’il est important de consacrer au monde rural un certain nombre d’actions s’ins- crivant dans le développement de l’inclu- sion financière, on ne peut s’empêcher de relever que cette initiative ou ce concept de «Douar Tour» porte sur un champ limité, à savoir les transferts de fonds. Or, sur ce terrain, il est connu qu’en dépit de l’absence de concurrence et de transparence sur ce marché, le flux des transferts d’argent des MRE au Maroc s’est renforcé au cours des années du Covid. Le développement de l’inclusion finan- cière à destination du monde rural requiert des actions conséquentes sur différents plans, dont la création de l’em- ploi en milieu rural via différents vec- teurs. Parmi ces vecteurs, on peut citer le soutien de la micro, petite et moyenne exploitation agricole (établissement des justificatifs des actes de propriété, finan- cement, subventions, conseil agricole et formation des producteurs agricoles, …), la création d’activités génératrices de revenus, l’ancrage des producteurs aux marchés d’écoulement des produits agricoles… C’est la création de revenus en milieu rural qui constitue un véritable levier de l’amélioration de l’inclusion financière. Outre ce levier, il est impé- ratif d’améliorer l’offre des organismes de financement (banques, microcrédit, crowdfunding…) qui doivent innover en matière de produits appropriés et adap-

«Il y a une résistance sérieuse à l’amélioration des offres bancaires» Inclusion financière

Le taux de réalisation des actions prévues n’est que de 6% pour les offres bancaires, 36% pour le mobile paie- ment et 53% pour la microfinance. Les banques ont un rôle important pour concevoir des produits financiers biens adaptés à différentes couches sociales. Entretien avec Lahcen El Ameli, professeur universitaire d’économie.

Propos recueillis par C. Jaidani

Finances News Hebdo : Quel est l’intérêt de l’inclusion financière pour l’économie nationale ? Lahcen El Ameli : Les pouvoirs publics ont pris un certain nombre de mesures et programmé des actions concernant le développement de l’inclusion financière, dont en particulier des mesures favo- risant l’accès au financement bancaire des TPME et des auto-entrepreneurs. Mais, depuis quelques années, dans un contexte caractérisé par la succession de crises, dont la crise sanitaire (Covid 19), les effets des événements géopo- litiques (guerre Russie-Ukraine, …) et l’impact de la sécheresse qui sévit au Maroc depuis plusieurs années, la ques- tion de l’inclusion financière suscite de plus en plus d’intérêt de la part de l’Etat. Ce dernier multiplie les actions pour améliorer les résultats de la stratégie nationale de l’inclusion financière qui a

été adoptée en 2019 sous l’impulsion et avec l’appui de la Banque mondiale. Cette stratégie a pour objectif «un accès équitable pour l’ensemble des individus et entreprises à des produits et services financiers formels (transactions, paie- ments, épargne, financement et assu- rance) pour une utilisation adaptée à leurs besoins et à leurs moyens, afin de favoriser l’inclusion économique et sociale tout en préservant leur droit et dignité» . Elle doit profiter en particu- lier «aux segments jusque-là exclus ou sous-desservis : femmes, ruraux, jeunes et TPE». Chaque année, un rapport sur l’inclu- sion financière est établi par, entre autres, Bank Al-Maghrib, le ministère des Finances… qui retrace l’évolution des indicateurs de l’inclusion financière. Dans le cadre des efforts déployés par les pouvoirs publics pour améliorer l’in-

clusion financière, Bank Al-Maghrib a récemment lancé l’initiative «Greenback- Maroc», qui a été conçue par la Banque mondiale et qui porte sur le dévelop- pement d’approches «innovantes» et «inclusives» au profit des différents seg- ments de la population pour la promo- tion de l’usage des moyens digitaux de transferts de fonds. Il est question aussi de développer des mesures d’éducation financière et de protection du consom- mateur pour aider les clients à choi- sir le service le plus adéquat. Le but recherché par la BM est de renforcer l’efficience du marché des transferts de fonds, notamment à travers la réduc- tion de leur coût. Rappelons ici que les transferts de fonds au Maroc par les MRE constituent un enjeu majeur pour le pays. Ces transferts ont joué un rôle capital en matière d’atténuation des effets de la pandémie du Covid 19.

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F.N.H. : Selon vous, quelles sont les contraintes qui perturbent le développement de l’inclusion financière dans le monde rural ? L. E. A. : Les contraintes au déve- loppement de l’inclusion financière en milieu rural sont nombreuses. Y figurent en premier lieu l’absence ou la fai- blesse des revenus et le manque de fonds, situation qui trouve son expli- cation avant tout dans la faiblesse de la production et l’absence de sources de revenus. L’agriculture et l’artisanat constituant les deux secteurs d’activité principale, il se trouve que ces derniers fonctionnent dans des conditions qui ne leur permettent pas de créer assez d’emplois et de revenus (manque de capitaux, faiblesse au niveau de la qua- lification professionnelle, problèmes de commercialisation des produits, etc..). Les très petites, les petites et les moyennes exploitations agricoles se reproduisent difficilement : faute de moyens financiers, les producteurs

tés, notamment au bénéfice des micro et petits producteurs agricoles, des arti- sans, des auto-entrepreneurs… Rappelons que l’étude «Agri-finance» réalisée par la BM, en partenariat avec la Banque centrale et le ministère des Finances, ayant pour objectif d’élabo- rer une stratégie favorisant un meilleur accès aux services financiers des agri- culteurs et des TPME agricoles et rurales, et dont les résultats ont été dévoilés fin 2022, a montré que le financement de l’agriculture et l’inclusion financière des exploitations agricoles, et plus largement de la population rurale liée à l’écosys- tème agricole, continue de présenter des déficits importants, particulièrement en ce qui concerne les segments des petits exploitants et des travailleurs agri- coles. L’offre des services financiers à destination du secteur agricole et du monde rural est limitée, à quoi il faut ajouter la faible présence des acteurs financiers privés (dont en premier lieu les banques commerciales) dans le monde

rural et la non couverture de plus des 2/3 des communes rurales par des points d’accès. Pour les auteurs de ladite étude (Agri-finance), des progrès ont été réali- sés en matière de financement agricole, mais le diagnostic a relevé «un faible niveau d’inclusion financière, notamment pour les petites exploitations informelles et pour les travailleurs agricoles, ainsi qu’une offre financière privée limitée et peu innovante adressée au monde rural». Dans un ouvrage que nous avons récem- ment publié «Le système bancaire au Maroc» , d’importants développements ont été consacrés à la question du finan- cement bancaire des TPME, où nous avons souligné que l’essentiel des exploitations agricoles n’y accèdent pas. Les petites et micro-exploitations qui parviennent à accéder au financement auprès des organismes de microcrédit, non seulement ne bénéficient que de très faibles montants, mais aussi supportent des coûts de financement très élevés (18 à 22% de taux d’intérêt).

ne peuvent pas créer d’actifs (bétail, machines, engrais, produits phytosa- nitaires, …) pour améliorer leurs pro- ductions et rendements. Et quand ils arrivent à produire, ils trouvent des diffi- cultés à commercialiser leur production. Un autre problème, non des moindres, auquel les exploitations agricoles se trouvent confrontées, réside dans l’ab- sence de justificatifs des propriétés, ce qui est un facteur de blocage pour l’accès au financement. Vient en second lieu l’offre des orga- nismes financiers qui est loin d’être adaptée à la réalité des populations du monde rural : nature des produits financiers proposés, coût des opéra- tions financières. Un troisième facteur est constitué par la faible couverture de plusieurs zones en milieu rural en matière de réseau des organismes financiers (banques, institutions de microfinance…). La proximité par rap- port à ces derniers est un facteur important ayant un impact qui est loin

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