FNH N° 1154-1

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VENDREDI 31 MAI 2024 / FINANCES NEWS HEBDO

ECONOMIE

La décompensation est décriée par de nombreux acteurs. L’agriculture et la restauration sont les secteurs les plus touchés. Quels effets socioéconomiques de la hausse des prix ? Par C. Jaidani L Gaz butane

Quand même, c’est une hausse de prix de 25% ! D’autres augmentations sont prévues les années à venir. Cette initiative va avoir des effets néfastes sur le pouvoir d’achat des consommateurs, car de nombreux secteurs uti- lisant le butane vont répercuter cette hausse dans leurs coûts de production, à l’instar des agriculteurs, restaurateurs, hôteliers et autres activités utili- sant ce produit». Par ailleurs, Kherrati estime que «la hausse des prix du butane présente des dommages éco- logiques du fait que dans le monde rural et les zones mon- tagneuses, les consommateurs devront chercher des sources d’énergie moins coûteuses comme le bois, amplifiant de ce fait le phénomène de la défo- restation». Chez les agriculteurs, l’annonce de la hausse des prix du gaz butane a été mal accueillie par les exploitants spécialisés dans les cultures maraîchères. «Le butane est la source d’énergie la plus compétitive pour le pompage de l’eau et l’irrigation. A travers des sub- ventions, l’Etat nous incite à utiliser l’énergie solaire, mais cette source d’énergie est pré- conisée pour les petites exploi- tations. Elle n’est pas adaptée pour le pompage de l’eau sur une longue distance ou quand la surface à irriguer est grande, nécessitant une puissance plus importante. Moi, je possède 40 hectares dont la moitié est dédiée à la culture des carottes et l’autre à celle des pommes de terre. Ces plantations néces- sitent de l’eau à volonté tous les jours. L’exploitation consomme en moyenne une vingtaine de bonbonnes de gaz par jour. Cela représente un surcoût de 200 DH/jour, soit l’équiva- lent de 6.000 DH/mois. Après les récoltes, je serai contraint soit d’augmenter les prix, soit de sacrifier ma marge bénéfi- ciaire», déplore Mohamed Taki, agriculteur dans la région de Benslimane. ◆

e Maroc s’est inscrit depuis des années dans un programme de décompensation des produits de base. Après les hydrocar- bures, le gouvernement s’at- taque actuellement au gaz butane. Ce produit engloutit en moyenne 80% du budget dédié à la compensation, qui com- prend également le sucre et le blé. Cette réforme est deve- nue nécessaire afin que le bud- get économisé soit alloué au système d’aide sociale directe basée sur le ciblage de la popu- lation démunie. Depuis le 1 er mai 2024, le prix d’une bonbonne de gaz de 12 kg est passé de 40 DH à 50 DH, et celui de 3 kg est passé de 10 DH à 12,50 DH. De nombreux syndicats et par- tis politiques sont montés au

secteur a be soin d’une véritable réforme». Pour sa part, Bouazza Kherrati, président de la Fédération nationale des associations de protection des consommateurs, indique que «le timing de cette décision est très mal choisi. Notre pays est toujours impacté par l’inflation. Même si le HCP parle d’une baisse, elle est tou- jours dans l’esprit des citoyens. Il fallait différer la hausse du prix du butane jusqu’à ce que la situation socioéconomique soit plus stable. Il ne faut pas oublier que cette hausse est entrée en vigueur quelques semaines après la fin du Ramadan et avant Aïd Al-Adha, deux événe- ments budgétivores redoutés par les Marocains. L’effet psy- chologique est très important.

créneau pour dénoncer cette hausse. Abdellah Bouanou, président du groupement du groupe du PJD à la Chambre des représentants, a affirmé que «le gouvernement a une logique purement comptable sans fournir l’effort d’innova- tion dans sa gestion budgé- taire. Au lieu de chercher de nouvelles niches imposables, d’élargir l’assiette, de renforcer le contrôle et de diversifier les ressources, il choisit la voie la plus facile. Ainsi, il veut com- penser la hausse des salaires décidée dernièrement et finan- cer le budget alloué à l’aide sociale par une hausse du prix du butane. On s’interroge aussi sur l’existence du monopole de quelques entreprises sur le marché du gaz au Maroc. Ce

 Le butane est fortement consommé par les exploitations irriguées. C’est la source d’énergie la plus compéti- tive pour le pom- page de l’eau.

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