Hors Série 43

C ulture

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l’écrit, vint l’ère de l’image. Le des- sus du panier, la véritable élite, ce sont «les people», ceux avec des mil- lions d’abonnés sur Youtube, TikTok et Instagram. Leur prestige, ils ne le tiennent ni de leur naissance ni de leurs diplômes, mais de leur audience. C’est là où le bât blesse. Être animateur influenceur.se est le plus sûr moyen d’accéder désor- mais à la renommée. Hier, ils étaient de parfaits inconnus. Ils sont aujourd’hui portés au pinacle par la foule, en raison de la médiatisation de leurs publications «oiseuses, fri- voles et bêtifiantes». Zineb Obeid, Leila Hadioui, Fati Jamali, Safae Hbirkou…qui écu- ment les cathodes, sont considérées comme des idoles. Mohamed Miftah, Naïma Elmcherqui, Nezha Regragui, Fatima Khair, Khadija Assad, Saâdia Azgoun, Hassan foulane, Mohamed El Khyari, Abdallah Didane, Latifa Ahrar, Houda Rihani, Bouchra Ijork…? Qui sont ceux-là ? Tant les Marocains ne font pas grand cas de leurs lumières, cependant qu’ils Si captivant soit sa virtuo- sité visuelle et technique, un film n’a pas la moindre chance de devenir une machine à succès s’il n’est pas servi par des inter- prètes d’envergure.

adulent, encensent les locataires de la petite lucarne, plutôt bas de pla- fond qu’éclairés. Nous n’avons fait aucun cas de notre passé, pour être instruits de la manière la plus adéquate dont nos anciens acteurs abordaient les tournages et des vertus qu’ils mobilisaient. En tout cas, ceux.elles qui ont marqué le cinéma ont leurs inconditionnels, quoique la fabrique à rêves adore maintenant le veau d’or. Rideau.

veau cinéma avec son précédent, se matérialisait dans la place accordée à la femme. Celle-ci n’était pas perçue comme un obscur objet de désir, mais telle une personne se définissant par une singularité affirmée. Là encore, les rénovateurs transgressaient un interdit inviolable. Mina, l’héroïne de «La plage des enfants perdus» de Jilali Ferhati, enceinte d’un amant décé- dé, n’a cure des pesanteurs des cou- tumes et met au monde son enfant au su et au vu des villageois sidérés. Décidément, le nouveau ciné- ma marocain s’est payé toutes les audaces ! Les interprètes ont-ils perpétué ce renouveau ? Mais si captivant soit sa virtuosité visuelle et technique, un film n’a pas la moindre chance de devenir une machine à succès s’il n’est pas servi par des interprètes d’envergure. Depuis belle lurette, une pléiade d’acteurs – ceux.elles qui ont fait notre cinéma - ne donnent plus signe de vie. Dès lors que leur envol s’est trouvé freiné avec le temps incom- préhensiblement, ils se sont éclipsés, puis enlisés. Disparition ou simple pause ? Nul ne peut le dire. Il y en a qui vous diront que les mœurs cinématographiques maro- caines ont changé, que le mythe de l’acteur.trice star est mis à terre et que notre cinéma moderne n’abrite que des faux dieux. Rien n’est plus faux. Après la parole,

Déclaration d’Amal Temmar

«Ce n’est pas la première fois que l’on me dit «vous avez disparu du grand écran». Pourtant, c’est vrai ! Ces dernières années, on voit presque les mêmes têtes qui reviennent, et on ne fait plus appel à l’ancienne génération. Pis encore, on ne regarde maintenant défiler que les influenceurs, sous prétexte

qu’ils ont beaucoup d’abonnés et ils enregistrent d’énormes chiffres en termes de nombre de vues. Oui, mais où est le talent, la créativité dans tout ça ? Pour être artiste, il faut d’abord avoir la passion. L’expérience, quant à elle, vous attrapera avec le temps. Cela me fait mal au cœur de ne pas voir Chaïbia Adraoui, Malika El-Omari, Hachmi Ben Amar, Mohamed El Khalfi, Abdelkader Moutaa, entre autres acteurs qui ont beau- coup fait et donné au cinéma marocain. On doit les célébrer, et faire appel à eux. La jeune génération doit les connaître … C’est lamentable ! Dans cette affaire, tout le monde est com- plice, à commencer par les scénaristes qui n’avancent pas des rôles taillés pour ces acteurs-là, les sociétés de production, les institutions de casting…».

FINANCES NEWS HEBDO / HORS-SÉRIE N°43 102

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